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Lombalgie chronique

Lombalgie chronique : comprendre le mal de dos qui dure pour mieux le soulager

Le mal de dos qui dure, ou « lombalgie chronique », a vu beaucoup de progrès ces dernières années qui permettent d’envisager un diagnostic plus précis de sa cause et donc un meilleur soulagement. La clé de cette meilleure prise en charge repose sur un diagnostic clinique et radiologique plus précis des structures anatomiques atteintes et sur la prise en charge associée de la musculature du dos qui permet un traitement spécifique associé à la réhabilitation du dos. Dossier réalisé à partir d'articles du Pr François Rannou, chef du service de rééducation de l'hôpital Cochin, à Paris et qui surpervise le groupe de malades souffrant de lombalgie chronique au sein de la cohorte ComPaRe

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Quand faut-il évoquer une lombalgie chronique ?

Selon la définition, une lombalgie chronique est une douleur du dos qui dure plus de 3 mois, mais en réalité, il ne faut surtout pas attendre cette limite fatidique des 3 mois, date à laquelle un déconditionnement musculaire du dos s’est déjà installé pour intervenir. 

Si une lombalgie aiguë n’a pas régressé au bout de 6 semaines, on est certes dans le cadre d’une lombalgie subaiguë, mais c’est une situation où le risque de passage à la chronicité est majeur et où il faut absolument tout faire pour poser un diagnostic lésionnel précis et faire un traitement adapté.

Comment diagnostiquer la cause d’une lombalgie chronique ?

L’interrogatoire et un examen clinique poussés de toutes les lombalgies chroniques sont considérés comme fondamentaux dans la perspective d’orienter correctement les examens complémentaires qui, sinon, ne permettront pas de poser un diagnostic précis.

En fonction des caractéristiques de l’interrogatoire et de l’examen clinique, le médecin doit être à même de prescrire l’examen complémentaire le plus adapté à la recherche de l’anomalie qu’il soupçonne : radiographies standard, avec ou sans clichés dynamiques, ou scanner lombaire avec reconstruction 3D, ou IRM, ou scintigraphie osseuse, ou PET-Scan.

Des radiographies standard de la colonne vertébrale sont le premier examen radiologique à réaliser quand un patient a mal au dos et s’il n’y a pas d’examen radiologique récent et elles sont systématiques s’il y a une douleur atypique (prédominant la nuit), voire accompagnée d’une fièvre. Ces radiographies standard montrent bien les structures osseuses (vertèbres), mais pas les ligaments, les disques intervertébraux, les muscles, les nerfs et les vaisseaux qui n’apparaissent pas sur ces clichés. Même en cas de douleurs importantes, les radiographies standard peuvent donc être normales et un disque intervertébral abîmé n’apparaîtra qu'indirectement : c’est un espace entre les corps vertébraux qui se réduit en hauteur (ou « se pince ») avec les corps des deux vertèbres adjacentes qui se rapprochent (« pincement discal »). L’arthrose est par ailleurs très fréquente sur les radiographies à partir d’un certain âge, mais ce n’est pas parce qu’elle est visible, qu’elle est responsable des douleurs ressenties par le malade. En pratique, les radiographies standard fournissent surtout des éléments essentiels pour écarter des maladies plus sévères et porter le diagnostic de lombalgie commune. Par ailleurs, il faut toujours conserver les vieilles radiographies et les apporter à votre médecin. Elles permettent d'apprécier l'ancienneté et la vitesse d'aggravation des lésions que l’on peut retrouver sur les radiographies plus récentes.

Une imagerie moderne (scanner, IRM) est souvent demandée dans la lombalgie chronique mais n’est le plus souvent pas justifiée, d’autant qu’un scanner lombaire est responsable d’une irradiation qui n’est pas négligeable. Ces examens détaillés, scanner ou IRM lombaires, ne doivent donc être demandés qu’à bon escient, c’est-à-dire après un bon interrogatoire et un bon examen clinique qui permettent de suspecter une cause anatomique précise à ces douleurs, ce qui permet au final de choisir l’examen le plus pertinent.
Si l’IRM a la faveur des spécialistes, car désormais peu coûteuse, non irradiante et parfaitement adaptée pour analyser une discopathie active, une arthrose articulaire postérieure en poussée et la recherche d’une inflammation ou d'une insuffisance musculaire, le scanner coupes fines avec reconstructions 3D est plus intéressant pour analyser les structures osseuses en général et les ouvertures latérales des foramens, par exemple.

D’autres examens sont parfois demandés par les spécialistes comme une scintigraphie ou un PET-scan, afin de rechercher une lésion osseuse active comme une lésion d’une articulaire postérieure.

Quels sont les risques des lombalgies chroniques ?

Le principal risque d’une lombalgie chronique est sa persistance et son impact sur la vie quotidienne avec le risque d’une perte d’activité professionnelle et d’une désinsertion socio-professionnelle, raison pour lesquelles il faut intervenir dès la 6ème semaine de douleur et de façon énergique.

Les risques d’une lombalgie chronique sur arthrose ou sur spondylolisthésis (glissement d’une vertèbre sur une autre) sont le rétrécissement des canaux dans lesquels passent habituellement les racines nerveuses et leur pédicule vasculaire, à savoir le canal médullaire (canal central) et les « foramens » ou canaux latéraux par lesquels sortent les racines à chaque étage. Ces lombalgies font partie des lombalgies chroniques mais méritent d’être individualisées sous la forme de complications car les racines nerveuses y sont comprimées et donnent 2 types de tableaux.
Le premier tableau est celui d’un conflit foraminal, qui est à évoquer quand s’associent des douleurs sciatiques à une arthrose articulaire postérieure : les signes cliniques qui semblent les plus prédictifs d’un conflit foraminal, par rapport à une sténose centrale, sont une radiculalgie claudicante (qui fait mal au bout d’une certaine distance), des douleurs nocturnes, des difficultés à se relever d’une station assise et à se retourner dans son lit.
Le deuxième tableau est celui d’un canal lombaire étroit ou d’un canal lombaire rétrécis, qui associent classiquement des lombalgies chroniques à des douleurs sciatiques. Un consensus d’experts récent a déterminé les 7 critères diagnostiques qui permettent de dire qu’une personne a 80% d’avoir ce diagnostic si elle a au moins 6 des caractéristiques suivantes : douleur du membre inférieur ou douleur des fesses à la marche, déficit moteur ou sensitif des membres inférieurs à la marche, douleur soulagée par l’utilisation d’un caddie ou d’un vélo (position penchée en avant), douleur soulagée par la position penchée en avant ou la position assise, des fourmillements (paresthésies) existent dans les pieds et sont symétriques, on retrouve une faiblesse des membres inférieurs et une lombalgie.
Enfin, il existe deux signes cliniques qui différencient l’étroitesse canalaire congénitale du canal lombaire rétréci : ce sont l’âge et la raideur rachidienne.
Dans le canal lombaire étroit, les personnes sont souvent jeunes et l’examen physique trouve une raideur de la colonne lombaire (« syndrome rachidien »), alors que dans le canal lombaire rétréci, les personnes ont volontiers plus de soixante ans et on ne trouve pas de vraie raideur rachidienne lombaire segmentaire.

Quand faut-il consulter un médecin rapidement ?

Classiquement, la lombalgie chronique appartient au groupe des lombalgies vertébrales communes, c’est-à-dire qui sont liées à des affections dégénératives des différents éléments de la colonne vertébrale. 

Il est cependant essentiel et systématique d’éliminer une cause « non commune » ou « secondaire » dans le langage des médecins. Pour ce faire, on dispose de ce qu’on appelle les « drapeaux rouges » à l’interrogatoire (« red flags » en anglais) qui permettent d’éliminer les lombalgies correspondant à une cancer primitif ou métastatique, ou à une infection vertébrale ou à une fracture vertébrale ostéoporotique ou à une spondylarthrite : ce sont essentiellement des douleurs qui prédominent la nuit et ne sont pas calmées par le repos, et qui s'accompagnent éventuellement d'une fièvre

Dans le cadre de la lombalgie chronique, au vu du délai de 3 mois, il est rare qu’une infection ou un cancer correspondent à une lombalgie chronique : ce sont plutôt des lombalgies aiguës, d’horaire nocturne, progressivement croissantes. Mais une fracture ostéoporotique ou une spondylarthrite ankylosante peuvent se révéler par une lombalgie chronique ou récidivante avec des douleurs nocturnes. Au moindre doute, il faut réaliser une imagerie pour rechercher ces lésions et donc il faut consulter un médecin.