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Coronavirus

Covid-19 : la deuxième infection entraînerait des formes plus sévères

Par Jean-Guillaume Bayard

Au moment de la deuxième infection, les anticorps faciliteraient la tâche du virus pour contaminer les cellules et contribueraient à créer des formes plus graves de la maladie.

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La virulence de la première vague d'infection en Italie serait dû à des cycles répétés d'infection, notamment chez les personnes âgées et le personnel soignant, qui provoqueraient des formes plus graves de la Covid-19.
Le rôle de facilitateur que jouerait les anticorps après une première infection expliquerait pourquoi de nombreux patients font une subite rechute dix jours après la première infection.
Si cette théorie se confirme, les candidats-vaccins devront également trouver le moyen d'empêcher les anticorps de jouer ce rôle de facilitateur.

L’immunité engendrée par une première infection à la Covid-19, apparaît de plus en plus comme une utopie. Des chercheurs italiens, affiliés à des universités, hôpitaux et agences de santé, ont émis l’hypothèse qu’une réinfection à la Covid-19 serait à l’origine de nombreux cas graves chez les patients contaminés. En cause, les anticorps développés par l’organisme qui, au lieu de jouer le rôle de gardien contre une nouvelle invasion du virus, seraient des facilitateurs pour ce dernier. Cette théorie, développée sous forme de commentaires dans le BMJ, doit être confirmée par d’autres études et pourrait compliquer la tâche dans la recherche d’un vaccin. Ce n’est pas la première fois que des chercheurs sèment le doute sur l’efficacité des anticorps. Récemment, une étude espagnole a montré que les anticorps disparaissent en quelques semaines à peine chez les personnes infectées qui n’ont eu que peu — voire pas — de symptômes. 

Les anticorps, à l’origine des infections biphasiques

Tout est parti de plusieurs observations faites par les chercheurs italiens sur la circulation du virus SARS-CoV-2 dans leur pays. Parmi celles-ci, les chercheurs ont exprimé leur surprise sur la virulence avec laquelle leur pays a été frappé par la première vague épidémique quand d’autres pays ont été moins touchés, comme l’Allemagne ou le Japon où la population est pourtant plus âgée et donc plus à risque. Une virulence qu’ils estiment due à des cycles répétés d'infection, notamment chez les personnes âgées et le personnel soignant, qui provoqueraient des formes plus graves de la Covid-19. “On peut donc raisonnablement soutenir que le SARS-CoV-2 circulait dans le pays depuis des semaines avant que le premier patient ne soit identifié”, estiment les chercheurs.

Ces réinfections expliqueraient également pourquoi certains patients font une rechute plusieurs jours après l’apparition des premiers symptômes. Après la première infection, l’organisme des patients contaminés produit des anticorps qui sont censés empêcher une nouvelle infection. Or, dans de nombreux cas, les infections sont biphasiques, c’est-à-dire qu’une dizaine de jours après l’apparition de la maladie leur situation s’aggrave subitement. “L'infection biphasique serait simplement le résultat immunologique d'une infection secondaire par d'autres coronavirus ou d'une réinfection par le SARS-CoV-2”, avancent les chercheurs. Une réinfection qui serait aussi la cause des “orages cytokiniques”, à l’origine de la plupart des décès liés au virus.

Les données sur les anticorps incomplètes

Si cette hypothèse réclame des preuves scientifiques, elle est décrite comme “fiable et crédible” par Morgane Bomsel, directrice de recherche au CNRS, impliquée à l'Inserm et à l'Institut Cochin dans la recherche sur la Covid-19, à Sciences et Avenir. Le coronavirus ne serait pas le seul virus qui engendre la production d’anticorps lui permettant de faciliter une réinfection. Le SRAS ou le MERS, qui partagent respectivement 79% et 50% du matériel génétique du SARS-CoV-2, en font partie.

Les implications de cette hypothèse pourraient bien rendre encore plus difficile la recherche d’un vaccin. Comme pour la dengue, où là aussi les anticorps jouent un rôle de facilitateur, il devra activer le système immunitaire en mimant plusieurs fragments viraux différents. “Des trois vaccins qui ont montré qu'ils généraient des anticorps, aucun n'a montré l'absence d'anticorps facilitants”, note Morgane Bomsel. Pour chacun d’entre eux, que ce soit celui développé par l’entreprise américaine Moderna ou ceux élaborés par l’université d’Oxford et à Wuhan en Chine, les données sur les anticorps sont incomplètes. “Il a déjà fallu plusieurs mois pour analyser la réponse immunitaire lors de l'infection par la Covid-19, maintenant il reste à analyser la qualité, la fonction des anticorps détectés”, appuie Morgane Bomsel. La chercheuse étudie les anticorps produits par les bronches des patients atteints de la Covid-19 et prévoit les premiers résultats pour la fin de l'été.