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Mastocytes

Les enfants stressés sont plus enclins à la dépression et à l’anxiété à l’âge adulte

Par Charlotte Arce

De nouveaux travaux menés par des chercheurs américains concluent qu’une période de stress au début de la vie peut créer à l’âge adulte un terrain propice à la dépression et à l’anxiété. En cause : le rôle joué par les mastocytes, des cellules immunitaires dont l’action est susceptible d’occasionner des troubles de l’humeur.

BrianAJackson/iStock

Les événements traumatisants vécus pendant l’enfance n’ont rien d’anodins. Occasionnant stress chez les enfants qui les vivent, ils marquent à jamais, aussi bien psychologiquement qu’en matière de développement neurologique.

C’est ce que met en lumière une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’Ohio State University, et présentée lundi 5 novembre lors de la réunion annuelle de la Society for Neuroscience, qui se déroulait à San Diego, Californie.

Selon ses auteurs, ce stress connu pendant l’enfance a de réelles conséquences sur le développement neurologique des jeunes gens qui y sont confrontés. Une fois adultes, ils sont plus susceptibles d’être touchés par la dépression ou l’anxiété en raison notamment de l’activité des mastocytes.

Le rôle-clé des mastocytes dans le développement neurologique

Qu’est-ce que les mastocytes ? Se trouvant dans les tissus conjonctifs ainsi que sur les muqueuses et dans tous les organes, les mastocytes sont des cellules qui jouent un rôle majeur dans la défense immunitaire de notre organisme. Elles sont en effet capables d'envoyer des signaux au système immunitaire lorsqu'elles sont en présence d'une bactérie ou d'un parasite et de déclencher une réponse immédiate de défense.

Jusqu’ici largement ignorées par les neuroscientifiques, les mastocytes sont au cœur de ces nouveaux travaux. "Nous constatons à présent dans les modèles murins qu’elles pourraient être responsables des changements observés dans le développement neurologique après un traumatisme infantile", affirme Kathryn Lenz, professeure adjointe de psychologie à Ohio State et co-auteure principale de l’étude.

En comparant des rats soumis à un stress et des rongeurs non-stressés, les chercheurs ont constaté que "le stress avait des effets différents" selon qu’il s’agit de stress prénatal, d’un seul facteur de stress ou de stress chronique (quand les jeunes rats étaient séparés de leur mère pendant longtemps).

C’est cette exposition au stress chronique qui leur a permis de constater des "différences significatives d'activité des mastocytes dans le cerveau" : les animaux concernés présentaient 30% de cellules immunitaires en plus que les rats non-stressés.

L’hypothèse des scientifiques est qu’une exposition chronique au stress contribue à rendre la barrière hémato-encéphalique plus perméable, ce qui pourrait expliquer la présence plus importante de mastocytes. En libérant de l’histamine, un médiateur chimique associé aux réactions allergiques, ces cellules sont aussi susceptibles d’altérer le développement du cerveau.

"Notre laboratoire s'intéresse aux facteurs de stress en début de vie et à leur incidence sur le fonctionnement des mastocytes. Nous essayons de mieux comprendre en quoi l'exposition à des expériences défavorables durant l'enfance pourrait entraîner des problèmes plus tard dans la vie", explique le Pr Lenz.

Les garçons, plus touchés que les filles

Au cours de leurs travaux, les chercheurs ont aussi noté que les rats mâles soumis au stress présentaient un taux de mastocytes plus importants que les femelles. C’est pour eux une donnée intéressante "car il existe des preuves que, chez l’humain, les hommes pourraient être plus vulnérables aux graves problèmes résultant d’un traumatisme précoce", note Kathryn Lenz.

Selon la co-auteure de l’étude Angela Saulsbery, ces résultats pourraient aider à établir des liens au niveau moléculaire entre les expériences traumatisantes vécues dans l’enfance et le développement de la dépression et de l’anxiété à l’adolescence et à l’âge adulte. "Les mastocytes peuvent également être une cible viable pour les médicaments prophylactiques qui aident à prévenir ces troubles psychologiques chez les enfants qui subissent ces événements traumatiques", ajoute-t-elle.