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Allaitement

Les bébés nourris au biberon deux fois plus touchés par la sténose du pylore

Par Afsané Sabouhi

Nourrir son bébé au biberon plutôt qu’au sein est associé à un doublement du risque de sténose du pylore, une malformation intestinale fréquente chez les petits garçons.  

JAUBERT/SIPA
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Les parents racontent des vomissements en jets très impressionnants chez des nourrissons de quelques mois, le plus souvent des garçons et des premiers-nés. La cause ? Une sténose hypertrophique du pylore. Autrement dit, le pylore, l’anneau musculaire qui fait la jonction entre l’estomac et l’intestin est trop gros et ne permet plus le passage des aliments même lorsqu’il n’est pas contracté. En moyenne, 2 enfants sur 1000 sont concernés et une petite opération chirurgicale doit être pratiquée pour leur permettre de s’alimenter normalement. Malgré la fréquence de cette malformation, sa cause reste encore inconnue du corps médicale.


Le 1er né est plus à risque

Une équipe de Seattle vient de montrer que l’allaitement pourrait jouer un rôle protecteur, selon une étude publiée dans la revue spécialisée Jama Pediatrics. En étudiant les dossiers médicaux de plus de 700 enfants atteints de sténose du pylore et de plus de 7000 enfants non atteints nés au même moment dans l’Etat de Washington, les auteurs ont constaté que 19,5% des enfants porteurs de cette malformation avaient quitté la maternité nourris au biberon et 9,1% nourris au sein. L’alimentation au biberon est donc associée à un risque de sténose du pylore multiplié par 2,3 en moyenne, par 3,4 si la mère est multipare et par 6 si elle a plus de 35 ans.


« C’est une association statistique forte et indiscutable mais ce n’est en aucun cas la démonstration d’une relation de cause à effet », nuance le Pr Frédéric Gottrand, pédiatre et responsable du pôle Enfant au CHRU de Lille. Il est en effet impossible de démontrer épidémiologiquement un effet de l’allaitement puisqu’il faudrait tirer au sort parmi les nouveaux-nés ceux à allaiter et ceux à nourrir au biberon. « Ce ne serait pas éthique, nous devons donc nous contenter de comparaisons, poursuite Frédéric Gottrand. Or, on sait que parmi ce qui pousse les femmes à choisir d’allaiter, il y a très probablement des facteurs de confusion importants comme par exemple le niveau socio-économique ».

Son confrère Patrick Tounian de l’hôpital Armand Trousseau à Paris est également extrêmement prudent quant aux résultats de cette étude : « On ne peut pas exclure qu’il y ait dans le lait maternel un facteur qui ait un effet protecteur contre la sténose du pylore mais cette étude ne permet en rien de l’identifier ».


Ecoutez le Pr Patrick Tounian
, chef du service de nutrition pédiatrique de l’hôpital Armand Trousseau à Paris : « Je ne crois pas qu’on tienne là l’explication de la sténose du pylore, mais un nouvel argument en faveur de l’allaitement maternel, oui. »


« C’est un élément de plus pour penser qu’il y a un bénéfice à allaiter mais cela ne rend pas le biberon responsable des sténoses du pylore », insiste Frédéric Gottrand. « Nous ne savons toujours pas si le risque de sténose du pylore est dû à l’alimentation au biberon ou à l’absence d’allaitement », souligne l’éditorial publié dans le JAMA Pediatrics avec l’étude des pédiatres américains. « Il ne faudrait pas qu’on utilise ce type d’étude statistique pour exercer une pression culpabilisante sur les mères qui ne souhaitent pas allaiter », s’inquiète également Patrick Tounian.


Ecoutez le Pr Patrick Tounian
, chef du service de nutrition pédiatrique de l’hôpital Armand Trousseau à Paris : « Inciter à l’allaitement oui, l’imposer en disant si votre fils a une sténose du pylore, ce sera de votre faute, c’est scandaleux ! »



Un facteur de risque de la sténose du pylore est en revanche clairement identifié et évitable : le tabagisme maternel pendant la grossesse, qui double le risque. « Attention, l’allaitement n’est pas un antidote au tabagisme pendant la grossesse, avertit Patrick Tounian. Autant il y a des doutes sur cet effet bénéfique de l’allaitement sur la sténose du pylore, autant il n’y a que des certitudes sur les effets délétères du tabagisme pendant la grossesse ! »