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Santé publique France

Incendie Lubrizol : c’est surtout le moral des riverains qui a été pollué

Par Jean-Guillaume Bayard

Le spectaculaire incendie de l’usine Seveson à Lubrizol du 26 septembre 2019 à Rouen n’a pas fait de victime immédiate mais a fragilisé la santé mentale des habitants.

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Près des deux tiers des habitants (60%) ont vu leur santé mentale fragilisée par l’incident.
Le rapport indique néanmoins que les habitants ne seraient pas exposés à une “surexposition à long terme” aux substances dangereuses.

Le 26 septembre 2019, les entrepôts de l’usine Seveso Lubrizol à Rouen ont pris feu et provoqué une immense fumée noire qui s’est déployée sur 22 kilomètres de long à cause de la combustion de près de 10000 tonnes de produits chimiques. Au moment de l’accident, aucune victime, que ce soit des morts ou des blessés, n’ont été rapportée. Mais une étude menée par Santé publique France (SPF) et publiée ce lundi 5 juillet révèle que “une altération de la santé mentale [des habitants] un an après”, a souligné Franck Golliot, directeur adjoint de SPF lors d'une réunion sur l'incendie en préfecture. 

60% des habitants impactés

La santé mentale des riverains est donc la principale victime de l’incendie. Une forte proportion de personnes reporte que les troubles psychologiques ressentis dans les suites de l’incendie étaient encore présents un an après les faits”, conclut l’étude. Au total, ce sont près des deux tiers des habitants (60%) qui ont vu leur santé mentale fragilisée par l’incident et qui rapportent “avoir subi au moins un symptôme ou problème de santé”, assure l’agence nationale de santé publique.

Parmi les symptômes rapportés, les personnes interrogées ont indiqué ressentir du stress, de l’anxiété ou encore des angoisses “pendant et après l’incendie”. Ces symptômes concernent 40% des adultes sondés, tandis que chez les enfants, ces troubles ont été signalés dans 33% des cas. Pour son enquête, SPF a interrogé environ 5 300 personnes, représentatives des 340 000 habitants des 133 communes impactées par le drame.

Pas de surexposition à long terme

La cause des symptômes et troubles psychologiques ressentis par les riverains est l’exposition à plusieurs pollutions liées à l’incendie, comme les flammes, la fumée, les bruits, les odeurs et les suies. L’incendie a également provoqué des irritations chez les personnes exposées. Près de 38% des adultes ont perçu des picotements des narines, de la gorge, de la langue, un écoulement ou une obstruction nasale, tandis que 37% d’entre eux ont subi des maux de tête des malaises ou des vertiges. En outre, 15% des sondés ont aussi signalé des difficultés respiratoires. Cependant, les deux tiers des sondés environ n’ont pas eu recours à des soins ou des médicaments.

Le rapport indique néanmoins que les habitants ne seraient pas exposés à une “surexposition à long terme” aux substances dangereuses susceptibles de provenir de l'incendie comme les hydrocarbures et les dioxines. La question de la pollution produite par l’incendie fait débat. Pour SPF, celle-ci n’a pas entraîné “une contamination en lien avec l'incendie différenciable d'une pollution industrielle historique”, assure SPF. Un avis que ne partage pas Mme Le Meur, pharmacienne biologiste de l'association Rouen Respire. “Comment expliquez-vous que l'on retrouve du xénène, de l'éthylbenzène et du toluène dans le lait maternel, qu'on observe un pic après l'incendie et qu'ensuite ça diminue ?”, a-t-elle réagi.