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Journée nationale pour la prévention du suicide

Plus de 7% des Français de 18 à 75 ans ont déjà tenté de se suicider

Par Charlotte Arce

La France présente un des taux de suicide les plus élevés d’Europe : 7,2% des Français de 18 à 75 ans ont déjà tenté de mettre fin à leurs jours. Un chiffre en hausse, dans lequel les femmes et les jeunes occupent une place prédominante.

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C’est un chiffre vertigineux qui fait froid dans le dos : en 2017, près de 7% des Français âgés de 18 à 75 ans ont déclaré avoir déjà tenté de se suicider. Soit près de 3 millions de personnes adultes dans l’Hexagone.

Ce chiffre provient du dernier bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) à l’occasion de la 23e Journée nationale pour la prévention du suicide, qui se déroule ce mardi 5 février. Si les indicateurs du Baromètre de Santé Publique France notent une relative baisse des tentatives de suicide pour l’année 2017 et une stagnation de l’occurrence des pensées suicidaires, les chiffres restent pourtant inquiétants.

Avec 4,7% de personnes interrogées affirmant avoir pensé à mettre fin à leurs jours au cours des 12 derniers mois, et 0,39% à avoir tenté de le faire, la France reste l’un des pays présentant tristement les taux de suicides les plus élevés d’Europe. On y dénombre en effet près de 9 000 suicides par an.

Plus de tentatives de suicide chez les femmes, plus de décès chez les hommes

Parmi les données saillantes relevées par Santé Publique France, se trouve notamment les différences entre femmes et hommes.

Ces derniers représentent les trois quarts des 8 948 décès par suicide recensés en 2015 par le Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès pour l’Inserm. Les femmes, elles, ont davantage l’apanage des pensées suicidaires et des tentatives de suicide : 9,9% d'entre elles affirment être passées à l'acte, contre 4,4% d’hommes. Une proportion en hausse de 2,3% par rapport à 2015 et un "gender paradox" explique dans Libération le professeur de psychiatrie et coauteur du BEH Pierre Thomas. "L’un des facteurs explicatifs serait l’utilisation de moyens plus létaux chez les hommes (armes à feu, pendaison) entraînant, malgré un plus faible nombre de tentatives, davantage de décès que chez les femmes."

Cette forte augmentation des pensées suicidaires peut s’expliquer par "le fait que c’est peut-être aujourd’hui plus acceptable de parler d’une tentative de suicide faite il y a dix ans, la majorité des tentatives ayant lieu à l’adolescence entre 15 et 19 ans", avance dans Le Monde Enguerrand du Roscoät, responsable de l’unité santé mentale à Santé publique France et coauteur de l’étude.

Les violences sexuelles et la dépression au cœur des pensées suicidaires

L’étude de Santé Publique France se penche aussi sur les facteurs les plus couramment associés aux pensées suicidaires. Parmi eux, "les situations financières difficiles, le fait d’être célibataire, divorcé ou veuf, l’inactivité professionnelle ainsi que les événements traumatisants". Parmi ceux-ci, "le fait d’avoir subi des violences sexuelles" est particulièrement marqué : 31% des femmes et 25,7% des hommes ayant subi des attouchements ou des rapports sexuels forcés ont déjà fait une tentative de suicide au cours de leur vie. Avoir connu "un épisode dépressif caractérisé au cours de l’année" engendre également des pensées suicidaires chez 25,1% des hommes et 22,6% des femmes.

Les adolescents particulièrement touchés

Selon les auteurs du BEH, l’autre catégorie de la population à être particulièrement touchée est les adolescents, qui ne figurent toutefois pas dans l’enquête. Un biais que reconnaissent les auteurs, qui notent que ce problème de santé publique concerne aussi les moins de 18 ans, "notamment les jeunes filles de 15-19 ans pour lesquelles le taux d'hospitalisation pour tentative de suicide est le plus élevé". Selon une autre étude, l’enquête sur la santé et les consommations lors de l’Appel de préparation à la défense (Escapad), "plus de 4% des filles et près de 3% des garçons de 17 ans ont déclaré en 2017 une tentative de suicide suivie d’une hospitalisation au cours de leur vie". Par ailleurs, "plus d’un jeune sur dix – deux fois plus souvent les filles – a déclaré des pensées suicidaires au cours de l’année".

Parmi les constats fait aussi par les auteurs du BEH, figure celui de l’échec des politiques publiques pour accompagner les personnes à risque et celles ayant fait une tentative de suicide. "Seulement la moitié des personnes déclarant des pensées suicidaires au cours de l’année en ont parlé à quelqu’un et que la moitié des personnes ayant effectué une tentative de suicide au cours de la vie déclarent avoir été suivies par un professionnel de santé après leur TS", notent les auteurs.