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USA Congrès de rhumatologie

Fractures de hanche : le congé médicamenteux n’est pas bon

Par le Dr Jean-Paul Marre

Les femmes qui interrompent leur traitement bisphosphonate contre l’ostéoporose sont plus à risque de fracture de hanche et ce risque croît avec la durée de l’interruption.

GILE/SIPA

Les femmes qui ont prennent un « congé médicamenteux » (arrêt temporaire ou permanent) de leur traitement bisphosphonates pendant plus de deux ans ont un risque de fracture de la hanche majoré de près de 40% par rapport à celles qui ont poursuivi ce traitement antiostéoporotique.
Il s’agit des résultats d’une étude réalisée par l’institut de santé nord-américain, le NIH, et qui a été présentée aujourd’hui au congrès annuel américain de rhumatologie, l’ACR/ARHP 2017, à San Diego.

Des interruptions de plus en plus fréquentes

L'ostéoporose est une affection fréquente qui résulte de la perte de masse osseuse, mesurée par la densitométrie osseuse, en particulier chez les femmes après 50 ans. Sans traitement, 40% d’entre elles auront au moins une fracture osseuse majeure (poignet, bras, vertèbre, fémur et côtes).
Le traitement par bisphosphonates, une classe de médicaments antiostéoporotiques, de type antirésorptif, permet de ralentir la perte osseuse et de diminuer le risque de fracture chez les personnes atteintes d'ostéoporose.
Mais, après des années de traitement continu, prendre des « vacances médicamenteuses » avec les bisphosphonates devient de plus en plus fréquent. Ceci est même de venu commun avec la mauvaise réputation sur les risques à long terme des bisphosphonates dans divers média et réseaux sociaux.

Une étude en « vraie vie »

Dans une étude de cohorte basée sur la population générale, des chercheurs de l'Université de l'Alabama, à Birmingham, ont étudié l'impact potentiel de l'arrêt des bisphosphonates sur le risque de fracture de la hanche chez les utilisatrices à long terme de ces traitements.
Les chercheurs ont utilisé les données nationales 2006-2014 de Medicare (caisse d’assurance maladie US pour les personnes âgées) pour identifier 156 236 femmes utilisatrices sur le long terme de bisphosphonates (au moins adhérentes à 80% depuis trois ans ou plus). L'âge moyen des femmes était de 78,5 ans et les bisphosphonates les plus couramment utilisés dans l'étude étaient l'alendronate et l'acide zolédronique.

40% de vacances médicamenteuses

Au cours d'une période de suivi de 2,1 ans, plus de 40% des femmes ont arrêté le traitement par bisphosphonates pendant au moins six mois ou plus. Parmi ces femmes, 12,7% ont ultérieurement recommencé un bisphosphonate. De toutes les femmes de l'étude, 10,8% sont décédées au cours de la période de suivi pour diverses raisons.
Au total, 3 745 fractures de la hanche sont survenues au cours du suivi. Les taux de fractures de la hanche sont les plus faibles chez les femmes qui continuent de prendre des bisphosphonates et ils augmentent graduellement à mesure que la durée des vacances médicamenteuses augmente. Les femmes qui ont interrompu plus de deux ans leur traitement bisphosphonate ont le taux de fractures de la hanche le plus élevé et ont une augmentation de 39% du risque de fractures de hanche par rapport aux femmes qui ont continué le bisphosphonate.

Des vacances qu’il faut savoir moduler

« Notre objectif était d'évaluer le risque lié aux vacances médicamenteuses en prenant en compte la durée de l’arrêt du traitement et en contrôlant les éventuels facteurs confondants, tels que la race, le revenu médian, l’habitat rural ou urbain, les scores densitométrique ou les maladies associées, a déclaré Jeffrey Curtis de l'Université de l'Alabama, à Birmingham, et auteur principal de l'étude.
« Alors que la notion de vacances médicamenteuses est devenue monnaie courante dans la gestion de l'ostéoporose, il y a pénurie de preuves sur le moment où nous devrions envisager de recommencer le traitement par bisphosphonates », a déclaré le Dr Curtis. L'analyse en fonction de la durée de l'interruption du traitement anti-ostéoporotique fait apparaître un risque modeste jusqu'à un an d'interrution avant une augmentation nette du risque pour atteindre 39% à 3 ans.
« Les résultats de l'étude peuvent fournir des éléments utiles pour guider les médecins dans la planification d’un traitement anti-ostéoporotique sur le long terme ».