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QUESTION D'ACTU

Interview du week-end

Hausse des troubles cardiaques pendant les fêtes : “Il ne s’agit pas de se priver, mais il faut être prudent”

Entre les longs apéritifs, les repas de réveillons très gourmands, le plaisir des retrouvailles et les cadeaux de Noël, il est aisé d’oublier de prendre soin de son cœur pendant les fêtes de fin d'année. Le Pr Richard Isnard, cardiologue à l'Hôpital Pitié-Salpêtrière et président du conseil scientifique de la Fondation Cœur et Recherche de la Société Française de Cardiologie, partage ses conseils pour éviter de finir les festivités aux urgences.

Hausse des troubles cardiaques pendant les fêtes : “Il ne s’agit pas de se priver, mais il faut être prudent” bernardbodo/istock




- Pourquoi Docteur : on entend souvent dire qu’il y a davantage d’incidents cardiaques pendant les fêtes. Est-ce que vous observez ce phénomène dans votre pratique ?

Pr Richard Isnard : il est vrai que nous avons plus de décompensations d’insuffisance cardiaque à la période des fêtes de fin d’année. C’est classique. On connaît ce phénomène depuis longtemps. Une des principales raisons est l’alimentation. Que cela soit à Noël ou au Nouvel An, on mange une nourriture un peu plus riche et un peu plus salée qu’à l’accoutumé. Le plateau d'huîtres, le foie gras, les petits-fours... les mets des fêtes se succèdent et entraînent des apports de sel inhabituels pour des patients qui font habituellement attention.

Concernant les événements coronariens comme les infarctus, il y en a plus en hiver, c'est certain, car l’exposition au froid peut mettre le système cardiovasculaire en difficulté (contraction des vaisseaux, augmentation de la pression artérielle et du rythme cardiaque…). Mais, plusieurs études observationnelles ont aussi montré un risque d’accidents coronariens et de mortalité cardiovasculaire accru spécifiquement pendant la période de Noël et du Nouvel An, y compris dans l’hémisphère sud ce qui exclut le froid comme seul facteur. Stress, excès alimentaires avec repas plus riche en graisse, alcool, retard de prise en charge, tous ces facteurs peuvent y contribuer…

L’autre élément qui augmente les risques des personnes cardiaques sont les virus de l’hiver qui circulent à cette période. Le brassage des familles durant les fêtes de fin d’année - surtout s’il y a de jeunes enfants - favorise la transmission de la grippe. Or, sur toutes les pathologies chroniques cardiaques, on sait que les infections virales comme la grippe sont une source de décompensation. C’est un point majeur.

Troubles cardiaques à Noël : "l’alcool peut favoriser certains troubles cardiaques comme la fibrillation atriale"

- Les personnes cardiaques doivent faire attention aux menus des fêtes plus riches et un peu plus salés que d’habitude. Qu’en est-il de l’alcool ?

L’alcool peut favoriser certains troubles cardiaques comme la fibrillation atriale. En particulier, le champagne et le vin blanc. Toute la population n’est pas sensible à cet effet. Mais certaines personnes le sont et peuvent faire des épisodes de fibrillation atriale après la prise de champagne. Par ce biais, l’alcool peut entraîner de petites complications cardiaques aiguës. Si vous passez en fibrillation atriale très rapide, cela peut être mal toléré. Un passage aux urgences peut alors être justifié, et ça gâche un peu la fête. Donc, prudence avec l’alcool.

Traitement cardiaque pendant les fêtes : “certaines inobservances peuvent se payer très cher”

- Quels sont les autres risques avec les traitements pendant les fêtes de fin d’année ?

Un autre problème rencontré avec les traitements pendant les fêtes : c’est l’observance thérapeutique. Entre l’esprit festif, les déplacements, les retrouvailles avec la famille et les changements d’habitude, certains patients peuvent oublier leur traitement, ne pas le prendre ou ne pas respecter la posologie.

Or, certaines inobservances peuvent se payer très cher : surtout si vous avez un traitement pour insuffisance cardiaque ou des diurétiques. D’autant plus… si, en parallèle, vous mangez plus salé.

 "Augmenter la dose diurétique permet de compenser les apports en sel plus importants des repas de Noël"

- Quels sont vos conseils pour profiter des fêtes de fin d’année sans mettre son cœur en difficulté ?

Faire attention aux aliments riches en sel comme les huîtres, le saumon fumé… Il ne s’agit pas de se priver, mais il faut être prudent. Souvent, pour les patients chroniques que je vois à la période des fêtes, je préconise d’ajuster leur dose de diurétique. Augmenter un peu la dose diurétique permet de compenser les apports en sel plus importants des repas de Noël. C’est un conseil que je donne aux patients les plus graves.

Concernant l’alcool, il est préférable, bien sûr, d’avoir une consommation raisonnable pendant les fêtes : boire avec modération comme le disent les messages de prévention. Les personnes qui ont déjà connu des arythmies après avoir bu du champagne ou du vin blanc, doivent particulièrement faire attention.

La vaccination est aussi importante. Si vous êtes vaccinés contre la grippe et/ou la Covid-19, vous avez moins de risque d’être infecté par les virus, et si vous tombez malade, cela évite les formes graves. Les patients atteints de pathologies chroniques cardiaques, ont des risques accrus de complications et de décès face à ces infections.

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