- En modifiant de 5° ou 10° l'angle du pied pendant la marche, les personnes atteintes d’arthrose du genou souffrent moins de douleurs un an après l’intervention.
- "La diminution de la douleur rapportée se situait entre ce que l'on pourrait attendre d'un médicament en vente libre", selon les auteurs.
- La variation de la microstructure du cartilage dans le compartiment médial était également moins importante grâce à la nouvelle démarche.
Blocage, craquement, douleur diffuse au niveau du genou pendant la marche, la montée ou la descente des escaliers… Ces signes indiquent une arthrose du genou, aussi appelée gonarthrose. Cette détérioration du cartilage articulaire touche 3 % de la population française de moins de 45 ans, 65 % après 65 ans et 80 % au-delà de 80 ans. Actuellement, aucun traitement ne permet d’en guérir, alors que cette maladie retentit sur la qualité de vie et a un impact psychologique important. Mais des chercheurs de l’université de Stanford (États-Unis) ont trouvé un moyen de soulager les douleurs et retarder de plusieurs années une opération du genou : la rééducation de la marche.
Dans une étude, publiée dans la revue The Lancet Rheumatology, l’équipe a spécifiquement recruté 107 personnes souffrant d'arthrose légère à modérée du compartiment médial du genou (à l'intérieur de la jambe), qui a tendance à supporter plus de poids que le compartiment latéral externe. "Cette forme d'arthrose est la plus fréquente, mais l'angle idéal du pied pour réduire la charge sur le côté médial du genou varie d'une personne à l'autre, en fonction de sa démarche naturelle et de son évolution lors de l'adoption du nouveau modèle de marche."
Changer de 5° ou 10° l'angle du pied et la rotation de l'orteil pendant la marche
Lors de leurs deux premières visites, les participants ont passé une IRM de référence et se sont entraînés à marcher sur un tapis roulant sensible à la pression, tandis que des caméras de capture de mouvement enregistraient la mécanique de leur démarche. Ensuite, certains volontaires, dits témoins, se sont vu prescrire des angles de pied identiques à leur démarche naturelle. À l'inverse, les adultes du groupe d'intervention se sont vu prescrire le changement d'angle du pied réduisant au maximum la charge sur leurs genoux. "L'objectif du groupe d'intervention était un changement de 5° ou 10° de l'angle de progression du pied et une rotation de l'orteil vers l'intérieur ou vers l'extérieur afin de réduire au maximum la charge sur le genou", ont détaillé les auteurs.
Durant six séances d'entraînement hebdomadaires en laboratoire, les patients ont reçu du biofeedback, à savoir des vibrations émises par un appareil porté sur le tibia, qui les a aidés à maintenir l'angle de pied prescrit tout en marchant sur le tapis roulant. Après la période d'entraînement, les participants ont été encouragés à pratiquer leur nouvelle démarche au moins 20 minutes par jour, jusqu'à ce qu'elle devienne naturelle. "Des visites de contrôle périodiques ont montré qu’ils respectaient l'angle de pied prescrit à un degré près en moyenne."
Moins de douleurs et une dégradation réduite du cartilage grâce à la nouvelle démarche
Un an plus tard, les volontaires du groupe d'intervention ont présenté une réduction plus importante de la douleur médiale du genou et du moment d'adduction du genou que les participants du groupe témoin. "La diminution de la douleur rapportée par rapport au groupe placebo se situait entre ce que l'on pourrait attendre d'un médicament en vente libre, comme l'ibuprofène, et d'un narcotique, comme l'OxyContin", a déclaré Scott Uhlrich, qui a dirigé les recherches. Les IRM ont également montré une amélioration des biomarqueurs de la santé du cartilage dans le groupe d'intervention. "Aucun événement indésirable grave n'a été signalé. Toutefois, deux participants sur 34 dans le groupe d'intervention et un participant sur 34 dans le groupe témoin ont abandonné en raison d'une augmentation de la douleur au genou", peut-on lire dans les résultats.
"Pour les personnes de 30, 40 ou 50 ans, l'arthrose pourrait nécessiter des décennies de prise en charge de la douleur avant qu'une prothèse articulaire ne leur soit recommandée. Cette intervention pourrait contribuer à combler cette importante lacune thérapeutique. (…) Nous avons développé une technologie qui pourrait être utilisée pour personnaliser et mettre en œuvre cette intervention en milieu clinique grâce à des capteurs mobiles, comme la vidéo d'un smartphone et une chaussure connectée", ont indiqué les chercheurs avant d’ajouter que des travaux supplémentaires sur cette approche sont nécessaires avant que l'intervention ne puisse être largement proposée au grand public.


