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Liens sociaux

L'ennemi de votre ennemi est bien votre ami, c'est la physique qui le dit !

Par Joséphine Argence

Une équipe de recherche américaine a confirmé la théorie de l’équilibre social, qui indique que l’ami d’un ami est un ami, et que l'ennemi d'un ennemi est un ami.

Deagreez/IStock
La théorie de l’équilibre social explique que les être humains essayent de manière innée de trouver de l’harmonie dans leurs cercles sociaux.
Les liens sociaux seraient donc dominés par quatre grandes règles : l'ennemi d'un ennemi est un ami, l'ami d'un ami est un ami, l'ami d'un ennemi est un ennemi et l'ennemi d'un ami est un ennemi.
Des chercheurs américains sont parvenus à confirmer cette théorie grâce à la physique statistique.

L’ennemi de mon ennemi est mon ami. On a tous déjà entendu ce célèbre proverbe, mais est-ce réellement le cas ? Mise au point par le psychologue autrichien Fritz Heider, la théorie de l’équilibre social, qui sous-entend cette célèbre phrase, indique que les êtres humains s’efforcent de trouver de l’harmonie dans leurs cercles sociaux. D’après le spécialiste, nos liens sociaux sont régis par quatre règles : l'ennemi d'un ennemi est un ami, l'ami d'un ami est un ami, l'ami d'un ennemi est un ennemi et l'ennemi d'un ami est un ennemi. Ces principes conduiraient à des relations équilibrées.

Une théorie confirmée par la physique statistique

Jusqu’à récemment, aucune étude n’avait permis de confirmer cette théorie. Des chercheurs de l’université Northwestern (États-Unis) se sont donc intéressés à cette hypothèse. "Nous avons toujours pensé que cette intuition sociale fonctionnait, mais nous ne savions pas pourquoi (…) Si l'on consulte la littérature, on s'aperçoit qu'il existe de nombreuses études sur ce principe, mais qu'il n'y a pas d'accord entre elles. Pendant des décennies, nous avons continué à nous tromper. La raison est que la vie réelle est compliquée. Nous nous sommes rendu compte qu'il fallait tenir compte simultanément de deux contraintes : qui connaît qui et que certaines personnes sont tout simplement plus amicales que d’autres", a précisé István Kovács, auteur principal de l’étude et professeur adjoint de physique et d'astronomie au Weinberg College of Arts and Sciences de l'université Northwestern.

Pour tester les règles de Heider, les personnes sont caractérisées par des nœuds. Les arêtes reliant les nœuds représentent les relations entre les individus. Une valeur négative, ou hostile, est attribuée à l’arête quand deux nœuds ne sont pas amis, tandis que l’arête est notée avec une valeur positive, ou amicale, lorsque les deux nœuds sont amis. Dans les précédentes recherches, les valeurs positives ou négatives étaient attribuées au hasard sans tenir compte des deux contraintes précédemment citées par István Kovács.

Les personnes amicales seraient plus susceptibles d’avoir des interactions positives

Dans leurs travaux publiés dans la revue Science Advances, les scientifiques ont étudié quatre ensembles de données de réseaux, accessibles au public, et préalablement traités par des spécialistes des sciences sociales. Les données provenaient :

Au sein de ce modèle de réseau, les chercheurs n’ont pas attribué de valeurs négatives ou positives véritablement aléatoires aux arêtes. Afin que chaque interaction soit réellement aléatoire, il faudrait que chaque nœud ait une chance proportionnelle de se rencontrer. Dans la vie réelle, on ne connaît pas forcément toutes les personnes, qui composent un réseau social. Par exemple, on ne connaît pas tous les amis de nos amis. 

Les auteurs de l’étude les ont donc distribuées sur la base d'un modèle statistique, qui décrit la probabilité de répartir des signes positifs ou négatifs aux interactions existantes. Les valeurs sont ainsi aléatoires, mais elles le sont dans les limites données par les contraintes de la topologie du réseau. Ils ont également pris en compte le fait que certaines personnes sont plus amicales que d’autres, et sont donc plus susceptibles d’avoir plus d’interactions positives.

Avec l’ajout de ces deux contraintes, ce modèle a indiqué que les liens sociaux à grande échelle sont en accord avec la théorie de l'équilibre social de Fritz Heider. "Nous savons maintenant qu'il faut tenir compte de ces deux contraintes (…) Sans elles, il est impossible de trouver les bons mécanismes. Cela semble compliqué, mais il s'agit en fait de mathématiques assez simples", a indiqué István Kovács.