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Physiologie

Froid : que se passe-t-il dans notre corps durant une hypothermie ?

Par Rafaël Andraud

Comment le corps réagit au froid extrême ? Un biologiste post-doctorant nous apporte ses explications et indique quels sont les signes d'une hypothermie.

Simotion/iStock
En fonction des symptômes et de la température corporelle mesurée, on distingue quatre stades d’hypothermie (selon le système suisse).
Avec une température corporelle comprise entre 28 et 35 °C, on parle d’hypothermie légère à modérée.
Sous les 28 °C, d’hypothermie profonde ; sous les 20 °C, d’hypothermie extrême.

Quels sont les réactions de notre corps quand nous sommes exposés à des températures glaciales ? Pieter Vancamp, biologiste post-doctorant à l'université catholique de Louvain, répond à cette interrogation dans un nouvel article de The Conversation. "Nous ne sommes, heureusement, pas entièrement démunis face au froid. Notre corps fonctionne de façon optimale à une température donnée, mais dispose de techniques pour se chauffer et limiter les pertes", explique le biologiste. En effet, notre température corporelle idéale se situe aux alentours de 36,6 °C : c’est le niveau auquel les cellules se développent au mieux.

"Le centre de contrôle de notre température corporelle se trouve dans l’hypothalamus, une petite région située à la base du cerveau. Fonctionnant comme un thermostat extrêmement précis, il réagit aux informations reçues via des capteurs ultrasensibles situés dans la peau, la moelle épinière, l’abdomen et les grandes veines", poursuit Pieter Vacamp.

Comment fonctionne le maintien de la chaleur interne du corps ?

Comme le développe le biologiste, au moindre écart par rapport aux 36,6 °C, le corps pousse notre chaudière interne. En l’occurrence, il augmente notre production de chaleur et réduit les déperditions d'énergie grâce à des mécanismes involontaires connus de tous : la "piloérection" (nos poils, ou ce qu’il en reste, se redressent pour agrandir notre couche d’air isolante), le frisson (nos muscles se contractent pour augmenter jusqu’à cinq fois le métabolisme et générer davantage de chaleur) et la redirection du sang chaud loin des surfaces externes froides ; d’où notre peau qui pâlit. Ainsi, même si vos orteils et vos doigts sont froids lorsque vous marchez dans la neige, vos organes centraux continuent de bénéficier des fameux 36,6 °C. Les physiologistes appellent "homéostasie" cette capacité à maintenir notre température interne constante, quelles que soient les conditions extérieures.

Mais ce n’est pas tout : le froid entraîne aussi des réponses comportementales. Outre notre corps, l’hypothalamus informe également de la situation les régions supérieures du cerveau, gérant la logique et la recherche de solutions. C’est ce qui nous pousse à chercher des endroits plus chauds, à nous abriter du vent, à boire quelque chose de chaud…

2°C de moins suffisent à affecter profondément le corps

"Mais notre capacité de résistance au froid a ses limites (vêtements trop légers ou mouillés par temps glacé, rester trop longtemps dehors dans le froid, un intérieur trop frais…). Lorsqu’elles sont dépassées, l’intérieur du corps commence à se refroidir. On parle d’hypothermie lorsque notre température centrale tombe en dessous de 35 °C", ajoute Pieter Vacamp.

Deux degrés de moins que notre température interne normale suffisent à réduire l’activité de nos protéines et à faire tomber le métabolisme de nos cellules à des niveaux si bas qu’ils menacent le fonctionnement des organes vitaux. "C’est comme si le moteur du corps se mettait à bafouiller", remarque Pieter. 

Hypothermie : les signes ne sont pas que physiques

Le biologiste détaille les effets physiques multiples de l’hypothermie : notre pompe cardiaque bat plus lentement et moins fort, ce qui entraîne un pouls faible. Les mouvements et déplacements rapides peuvent même provoquer des battements cardiaques irréguliers. Et en même temps, la coagulation sanguine diminue. Notre métabolisme, réduit, affaiblit les muscles des poumons. Notre respiration (inspiration et expiration) se fait plus lente, plus superficielle. Des frissons apparaissent au début, mais comme nos mitochondries se font moins efficaces, les apports en énergie faiblissent. Passé un certain stade, une personne gravement sous-refroidie ne frissonne plus, ce qui est un grave signe d’alerte.

De plus, notre esprit n’est pas épargné non plus. Les meilleurs indicateurs de l’hypothermie pourraient d’ailleurs être les changements de comportement : les personnes en état d’hypothermie deviennent confuses, ne se rendent pas compte qu’elles ont froid (parce que cela arrive progressivement), parlent de plus en plus difficilement et agissent bizarrement. "Si ces signaux ne sont pris en compte à temps, la situation peut rapidement mettre notre vie en danger", alerte le biologiste.