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Sécurité routière

Ivre au volant : la moitié des conducteurs sous-estiment leur alcoolémie

Par Charlotte Arce

Une étude menée auprès de jeunes adultes révèle que près de la moitié d’entre eux sous-estiment leur état d’ébriété après avoir bu et se considèrent en sécurité au volant alors qu’ils ont dépassé le taux d’alcool dans le sang légal.

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Même quand ils ont dépassé la limite autorisée du taux d'alcool dans le sang, les conducteurs estiment qu'ils sont capables de prendre le volant.
Les conducteurs sont aussi de moins en moins capables d'estimer correctement leur niveau d’alcool dans l’haleine à mesure qu'ils sont ivres, ce qui peut avoir de graves conséquences.

Chaque année, en France, 30 % des accidents de la route les plus graves sont liés à l'alcool au volant. En 2017, les routes françaises ont comptabilisé 1 035 victimes d'accidents mortels provoqués par des conducteurs en état d'ébriété.

La consommation d'alcool entraîne une altération importante des fonctions motrices, des réflexes et du temps de réaction. Ainsi, les conducteurs en état d’ébriété peuvent avoir du mal à maintenir leur véhicule sur la voie, à freiner rapidement et sont plus enclins à prendre des risques, ce qui augmente considérablement le risque d’avoir un accident.

Malgré les effets documentés de l’alcool sur la conduite, nombreux sont les conducteurs à estimer qu’ils sont capables de prendre le volant après bu. Et ce, même lorsqu’ils ont dépassé la limite autorisée du taux d'alcool dans le sang. C’est ce que démontre une nouvelle étude menée par des chercheurs de l'université de Witten/Herdecke et de l'université de Cambridge et publiée dans le Harm Reduction Journal.

Une mauvaise appréciation de son état d’ébriété

Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont souhaité savoir si les conducteurs étaient capables d’estimer leur aptitude à conduire après avoir bu de l’alcool. Ils ont recruté 90 étudiants allemands âgés en moyenne de 24 ans, qui ont été répartis en un groupe d’étude, et un groupe de contrôle. Les deux groupes ont consommé soit de la bière, soit du vin, soit les deux, jusqu'à ce qu'ils atteignent une concentration maximale d'alcool dans l'haleine (BrAC) de 0,11 %. Les participants à l'étude ont été informés dès le départ que lorsqu'ils atteindraient un taux d'alcoolémie de 0,05 %, ils passeraient de la bière au vin ou vice versa.

Leur taux d'alcoolémie a été mesuré à l'aide d'éthylotests. À chaque mesure, les chercheurs ont demandé aux étudiants d'estimer leur propre taux d'alcoolémie. Tous les participants ont été invités à se manifester lorsqu'ils pensaient avoir atteint la limite légale de conduite.

Les résultats ont montré que le premier jour de l’étude, 39 % des participants qui s’étaient manifesté car ils pensaient avoir atteint la limite légale de conduite avaient en fait déjà dépassé ce seuil depuis plusieurs verres. Le deuxième jour, cette proportion est passée à plus de la moitié (53 %).

"Dans les pays où le taux d'alcoolémie est légal, c'est généralement le conducteur qui décide de la quantité d'alcool qu'il a consommée et de son aptitude à conduire. Mais comme nous l'avons montré, nous ne sommes pas toujours capables de porter ce jugement. Dans notre étude, une personne sur deux a sous-estimé son état d'ébriété, ce qui peut avoir des conséquences désastreuses", souligne le Dr Kai Hensel, qui a dirigé l'étude.

Pas d’alcool quand on conduit reste la meilleure option

De plus, les chercheurs ont constaté que les participants estimaient de moins en moins bien leur niveau d’alcool dans l’haleine à mesure qu'ils étaient ivres, ce qui peut avoir de graves conséquences.

Pour voir si les participants étaient capables d'améliorer leur capacité à estimer leur état d'ébriété, les chercheurs ont comparé l'auto-estimation par les volontaires du fait qu'ils avaient atteint la limite légale de conduite entre les deux jours d'étude. Les participants du groupe d'étude étaient mieux à même d'estimer leur degré d'ivresse le deuxième jour, mais ce n'était pas le cas du groupe de contrôle.

"Le meilleur conseil à donner est le suivant : si vous conduisez, ne buvez pas. Mais si vous avez vraiment envie d'un verre, renseignez-vous sur votre propre tolérance à l'alcool, rappelle le Dr Hensel. Celle-ci diffère d'une personne à l'autre, en fonction du sexe, du poids et de l'âge, et il existe des applications fiables qui peuvent vous guider."

En France, la limite autorisée du taux d'alcool dans le sang par la loi est de 0,5 g/L, soit 0,25 mg par litre d'air expiré. Depuis 2015, le taux d'alcoolémie légal est de 0,2 g/L pour les jeunes conducteurs. Chaque verre bu augmente le taux de 0,20 g à 0,25 g en moyenne.