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Etude de l’Observatoire national de la fin de vie

3 résidents sur 4 décèdent dans leur maison de retraite

Par Afsané Sabouhi

90 000 personnes âgées décèdent chaque année en EHPAD. La prise en charge de la douleur y a progressé mais l’absence d’infirmiers de nuit complique l’accompagnement.

JS EVRARD/SIPA

« Les maisons de retraite médicalisées, les Ehpad, sont le lieu où meurent 90 000 Français âgés chaque année. Pourtant les conditions de la fin de vie n’y avaient jamais été étudiées, ce qui reflète bien l’inquiétante dénégation de notre société sur la fin de vie », souligne le Pr Régis Aubry, chef du service de soins palliatifs du CHRU de Besançon. L’Observatoire national de la fin de vie, dont il est le président, vient combler ce manque en publiant pour la première fois une étude nationale sur les décès de plus de 70 000 résidents d’établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) survenus en 2012.

La maison de retraite est le lieu effectif de fin de vie et de décès pour 75% des résidents. Et dans l’immense majorité des cas, il s’agit de décès non soudains où la fin de vie peut être accompagnée. « Cette étude montre que les Ehpad ne sont pas les mouroirs que l’on peut décrire. La douleur est beaucoup mieux prise en charge, les médecins traitants sont très impliqués et les proches sont présents », souligne Régis Aubry. 54% des résidents qui décèdent en Ehpad reçoivent en effet des antalgiques puissants au cours de 2 dernières semaines de leur vie, leur médecin traitant est impliqué dans 84% des cas et 75% sont entourés de leurs proches qui ont la possibilité de dormir sur place.


Une infirmière de nuit pour éviter les hospitalisations en urgence

L’accompagnement de la fin de vie en maison de retraite souffre toutefois de lacunes importantes. Seules 14% des Ehpad, principalement les établissements publics, disposent de personnel infirmier présent la nuit. Or leur présence permet de réduire considérablement les hospitalisations d’urgence dans les dernières semaines de vie, qui sont souvent contraires au souhait de la personne âgée de ne pas mourir à l’hôpital. 18 000 transferts en urgence à l’hôpital pourraient être évités par la présence d’une infirmière la nuit.

Ecoutez le Pr Régis Aubry, président de l’Observatoire national de la fin de vie : « Les équipes mobiles de soins palliatifs et l’hospitalisation à domicile restent sous-employées ».



Un quart des maisons de retraite n’ont en effet aucun lien avec les structures existantes de soins palliatifs, ni équipe mobile, ni réseau, ni unité hospitalière de soins palliatifs qui pourrait accueillir les résidents hospitalisés en urgence. De même, les structures d’hospitalisation à domicile ne sont sollicitées que dans 8% des cas alors qu’elles apporteraient un renfort en personnel formé à l’accompagnement de la fin de vie.


Un médecin coordonnateur sur 5 n’est pas formé aux soins palliatifs

La formation du personnel soignant des maisons de retraite à la fin de vie a beaucoup progressé, notamment pour les infirmières et les aides-soignantes. Mais alors que les Ehpad sont confrontées en moyenne à 20 décès par an, un médecin généraliste coordonnateur sur 5 n’a jamais eu aucune formation à l’accompagnement de la fin de vie.

Ecoutez le Pr Régis Aubry : « Les généralistes accompagnent de fait ces situations de fin de vie mais constater qu’1 sur 5 n’a jamais eu de formation est choquant »


Cet état des lieux de la fin de vie en maison de retraite devrait alimenter le débat public souhaité par François Hollande et annoncé pour cet automne. « 25% des résidents âgés meurent seuls en maison de retraite. Certes, il y a besoin d’un engagement politique et d’une mobilisation des professionnels de santé, reconnait Régis Aubry, mais ce chiffre doit interpeller aussi chaque citoyen. »