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Une partie des morts du Covid en 2020 serait “de toute façon” décédée d'une autre cause

Par Jean-Guillaume Bayard

En 2020, la surmortalité en France a été de 55 000 décès alors qu'environ 68 000 personnes ont succombé à la Covid-19.

Georgiy Datsenko/iStock
Les décès par Covid-19 ont frappé en partie des personnes fragiles souffrant d'autres maladies et une fraction d'entre elles seraient de toute façon décédées en 2020, même en l'absence d'épidémie de Covid-19.
Quoi qu’il en soit, “le bilan de l'année 2020 reste accablant”, concluent les chercheurs.

En 2020, il y a eu 55 000 décès supplémentaires par rapport à 2019, soit une augmentation de 9,2%. Ces décès sont, en grande partie, dus à l’épidémie de coronavirus qui a entraîné à elle seule 68 000 morts. En soustrayant les deux chiffres, on se rend compte qu’il y a 13 000 morts du Covid qui ne constituent pas des décès supplémentaires par rapport à l’année précédente. Dans une étude publiée mercredi 17 mars, deux chercheurs de l’Institut national des études démographiques (Ined) ont tenté d’y voir plus clair et de trouver les raisons de cet écart.

Une partie des décès liés au vieillissement de la population

Une partie de cette hausse – de l’ordre de 13 000 décès – est due au vieillissement de la population qui s’observe chaque année en l’absence de gain d’espérance de vie”, ont d’emblée posé les chercheurs. Cela signifie donc qu’en enlevant ces décès indépendants de tout contexte épidémique, la surmortalité en 2020 se chiffre à 42 000 décès.

Le recul d’autres causes de décès

Pour le reste, les chercheurs mettent plusieurs facteurs en avant. En premier lieu, ils enregistrent “un recul d’autres causes de décès, l’épidémie de grippe saisonnière n’ayant pas occasionné de surmortalité notable au début de l’année 2020, alors que celle de l’hiver précédent s’était soldée par un surcroît de 12 000 décès. Autre recul notable : la mortalité routière a été moindre en raison des restrictions de circulation.”

L’autre facteur explicatif, selon eux, est la comorbidité et le fait qu'une partie des victimes du Covid serait “de toute façon” décédée d'une autre cause. “Les décès par Covid-19 ont frappé en partie des personnes fragiles souffrant d’autres maladies, poursuivent les chercheurs. Une fraction d’entre elles seraient de toute façon décédées en 2020, même en l’absence d’épidémie de Covid-19. On aurait alors attribué leur décès à une autre cause (diabète, maladie cardiovasculaire, insuffisance respiratoire chronique, etc.).” Il est pour l’instant impossible de chiffrer l’importance de ce phénomène par manque de données, précisent les chercheurs.

La première vague de Covid, comme la grippe

La surmortalité en 2020 s’est produite en deux vagues, au printemps et à l’automne, correspondant aux deux vagues épidémiques liées au SARS-CoV-2. Les chercheurs se sont rendus compte que leur ampleur peut être comparée à celles des vagues de surmortalité des cinq années précédentes, “toutes liées à des épidémies de grippe saisonnière”. Si pendant la première vague de coronavirus, le pic de surmortalité est “plus élevé et plus concentré dans le temps” que pendant une épidémie de grippe, le bilan n’est pas beaucoup plus élevé. En revanche, “la surmortalité de la vague d’automne est sensiblement supérieure, même en se limitant aux décès survenus en 2020, concèdent les démographes. Le pic est moins haut, mais plus étalé. Le bilan total incluant les décès de 2021 s’annonce déjà plus important que ceux des épidémies de grippe des dernières années.”

Les chercheurs ont également cherché à savoir si l’épidémie de Covid-19 frappait davantage les personnes âgées que les autres maladies. “La répartition par âge des décès dus à la Covid-19 est assez proche de celle de la mortalité générale, ont-ils observé. On a beaucoup dit que les personnes âgées étaient, de loin, les premières victimes de l’épidémie de Covid-19. C’est vrai, mais à peine plus que pour les autres causes de mortalité”.

Baisse de l’espérance de vie

Cette augmentation de la mortalité d’une année sur l’autre n’est pas sans conséquence. Les démographes estiment qu’elle “se traduit par une baisse de l’espérance de vie à la naissance”. Pour les femmes, elle passe de 85,6 ans à 85,2 ans (0,4 an de moins) et de 79,8 à 79,2 ans chez les hommes (0,6 an de moins).