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Portrait-robot

Qui sont les anti-masques ?

Par Charlotte Arce

Ils sont de plus en plus nombreux à défier les règles sanitaires, à commencer par le port du masque dans l’espace public. Qui sont ces anti-masques ? Profil de celles et ceux dont le contre-discours prend de l’ampleur sur les réseaux sociaux.

klebercordeiro/iStock
MOTS-CLÉS :
S'il n'est pas comparable aux Etats-Unis, le mouvement anti-masque prend de l'ampleur en France.
63% des anti-masques sont des femmes, 36% sont cadres.

“Aucune étude ne prouve que le port du masque protège les autres ou nous protège”, “Refusez les tests ! Refusez le port obligatoire du masque et les zones masquées”, “Chez moi je suis LIBRE de respirer correctement et tout comme le fait que je n'achèterai jamais de masque, je ferai TOUJOURS ce que je veux !”

Voici le genre de messages postés quotidiennement sur Facebook. Au sein des groupes “Anti-masque obligatoire” ou “Collectif anti-masques !”, des milliers d’internautes se mobilisent pour défier les recommandations sanitaires des agences de santé ou du gouvernement. À commencer par le port du masque, qu’ils considèrent comme liberticide et inutile.

Majoritairement des femmes quinquagénaires CSP+

Mais qui sont-ils ? Professeur agrégé de sciences sociales et chercheur à SciencesPo Grenoble, Antoine Bristielle a réalisé une enquête auprès de 1 000 anti-masques contactés via des groupes Facebook pour dresser leur portrait-robot.

Interrogé par Franceinfo, il détaille : 63% des anti-masques sont des femmes. Il s’agit pour la plupart de personnes issues des catégories socio-professionnelles élevées : parmi les personnes interrogées, 36% sont des cadres ou issus de professions intellectuelles supérieures alors que les anti-masques ne représentent que 18% de la population totale. “Des personnes qui sont également assez âgées, avec en moyenne une cinquantaine d'années, et aussi avec un niveau d'éducation assez élevé, avec en moyenne un Bac 2", précise le chercheur.

Ce qui les rassemble, outre leur position anti-masque, est leur défiance vis-à-vis des institutions politiques et médiatiques : seuls 6% d’entre eux disent ainsi avoir confiance dans l’institution présidentielle et 2% dans les partis politiques. A l’élection présidentielle de 2017, 42% n’ont pas voté au premier tour et, parmi les votants, 27% ont choisi Marine Le Pen et 19% Jean-Luc Mélenchon.

Un profil complotiste

Les anti-masques sont aussi adeptes des arguments pseudo-scientifiques et des thèses conspirationnistes, révèle l’étude menée par Antoine Bristielle. Ainsi, 52 % des interrogés croient aux Illuminati (contre 27 % dans la population française), 56 % au "grand remplacement" (25 % dans la population française) ou encore 52 % à un “complot sioniste” (contre 22 % en France). “Par exemple, aussi, lorsqu'on leur demande s'ils pensent que le ministère de la Santé est de mèche avec l'industrie pharmaceutique pour cacher la réalité sur la nocivité des vaccins, il y a 90% des anti-masques qui sont d'accord avec cette affirmation”, complète Antoine Bristielle sur Franceinfo.

Pour Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion de l’Ifop, il ne faut cependant pas comparer le mouvement anti-masque hexagonal avec ceux, bien plus étendus, qui existent aux États-Unis ou en Allemagne. Rappelant dans Le Monde que les deux tiers des Français sont favorables à l’obligation du port du masque dans l’espace public, il estime que “l’effet majeur ne risque pas tant de se voir dans des manifestations anti-masque ou la formation improbable d’un parti anti-masque, mais dans le nombre de gens qui vont se dire : ‘En fait, ils ne savent rien, je n’y crois plus, j’arrête tout’.”