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Covid-19

Coronavirus : un traitement prometteur développé à Marseille

Par Jean-Guillaume Bayard

Des chercheurs basés à Marseille développent un traitement contre la Covid-19 et présentent des résultats translationnels encourageants pour soigner les patients atteints de formes graves de la maladie. En France, la circulation du virus continue de s’intensifier et le nombre de malades en réanimation est en très légère hausse pour la première fois depuis le 9 avril.

Maksim Tkachenko/iStock
Les chercheurs ont mis en évidence le rôle de molécules de complément dans notre réction immunitaire, notamment la C5a.
L’anticorps avdoralimab permet de limiter l'infiltration des cellules par le virus et et prévenir l'inflammation pulmonaire associée à un syndrome de détresse respiratoire aiguë.

En parallèle de la course frénétique au vaccin contre la Covid-19, la recherche d’un traitement permettant de soigner les patients infectés est elle aussi en pleine émulation. Après les espoirs produits par la combinaison des molécules remdesivir/diltiazem et par l'anticoagulant héparine, des scientifiques basés à Marseille ont présenté ce mercredi 29 juillet, dans la revue Nature, les résultats très encourageants de leur recherche de traitement pour les patients qui ont développé des formes graves de la maladie de guérir de leur infection. L’équipe, nommée Explore Covid-19, réunit des chercheurs d'Innate Pharma, de Marseille Immunopole, du Centre d'immunologie de Marseille-Luminy et de plusieurs hôpitaux et centres universitaires de la région.

Des molécules de complément, alors inconnues, identifiées

Les chercheurs ont disséqué l’organisation de la réponse immunitaire des patients infectés pour comprendre son fonctionnement et viser les molécules qui permettent de lutter efficacement contre l’invasion de la Covid-19. “Depuis le départ, on sait que l'aggravation de la maladie est liée à une surréaction du système immunitaire, et notamment à l'action de cytokines, qui sont des molécules qui circulent dans l'organisme et qui ont des vertus inflammatoires”, détaille Éric Vivier, immunologiste et directeur scientifique d'Innate Pharma, à Franceinfo. Parmi les molécules cytokiniques impliquées, l’équipe de Marseille s’est attardée sur celle “qu'on appelle les molécules du complément”, affirme Éric Vivier. Il s'agit d’“un ensemble de 35 molécules qui sont sécrétées par l'organisme et qui s'activent les unes les autres, en cascade.”

L’une de ces molécules de complément, dont le rôle dans la réponse immunitaire était jusqu’alors inconnu, a particulièrement attiré les chercheurs. Il s’agit de la molécule C5 qui est scindée en deux protéines : C5a et C5b. “Autant C5b est très importante pour l'immunité, autant C5a ne semble pas vraiment requise, mais semble jouer un rôle très important dans le déclenchement de la réaction immunitaire”, relève Éric Vivier. Les premiers résultats de leurs analyses ont révélé que cette protéine est présente de manière disproportionnée dans les organismes des personnes présentant des atteintes pulmonaires liées à une infection à la Covid-19. “Dès qu'on rentre dans des formes de pneumonies à Covid-19, on observe une augmentation très importante de la quantité de C5a” qui se calque sur “l'évolution clinique de la maladie”, confirme l’immunologiste. Cette accumulation de C5a a la particularité d'attirer des cellules immunitaires, dites cellules myéloïdes, qui contribue à l'emballement du système immunitaire, ce qui va conduire à une détérioration des tissus.

Les résultats sur l’Homme attendus

Après avoir identifié les mécanismes immunitaires lors de l’infection à la Covid-19, les chercheurs ont concentré leur attention sur la recherche d’un traitement efficace. Pour cela, ils ont cherché des mécanismes immunitaires connus permettant de “repositionner des médicaments” existants pour “pouvoir prendre en charge le plus rapidement possible les patients”. L’anticorps avdoralimab, développé par le laboratoire Innate Pharma pour la prise en charge de plusieurs pathologies comme les cancers, est ressorti de leurs observations. Il permet de bloquer la voie mise en évidence par l'équipe et “limiter l'infiltration des cellules myéloïdes aux sites inflammatoires et prévenir l'inflammation pulmonaire associée à un syndrome de détresse respiratoire aiguë”, note la société de biotechnologie dans un communiqué.

Les premiers tests cliniques, réalisés sur des souris, ont présenté des résultats encourageants. Depuis le mois de mai, l’équipe a commencé le processus des essais cliniques chez l’humain et continue de recruter des patients afin de tester leur médicament. Désormais, il faut attendre les résultats sur l’efficacité de l'anticorps avdoralimab sur l’humain afin de voir s’il permet effectivement de bloquer l'emballement du système immunitaire et d'éviter le développement des formes les plus graves de la maladie.

Une augmentation du nombre de malades en réanimation

Pour la première fois depuis le 9 avril, le nombre de malades en réanimation n'est plus en baisse, avec une personne supplémentaire, a indiqué la Direction général de la santé (DGS). Cet indicateur est très étroitement surveillé puisqu'il permet de comprendre l'état de la circulation du virus. Au total, 5 375 personnes sont hospitalisées pour une infection au coronavirus, dont 381 cas sévères en réanimation. La circulation du virus reste “soutenue avec un nombre de cas quotidiens en augmentation et supérieur à 1 000”, insiste la DGS. Le nombre de nouveaux cas augmente lui aussi et est supérieur de 54% par rapport à la semaine précédente, “particulièrement chez les 20-30 ans”, révèle l'agence sanitaire Santé publique France dans son point épidémiologique hebdomadaire.