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Port du masque

Les salles de sport, nouveaux foyers épidémiques potentiels et casse-tête juridique

Par Mathilde Debry

Pour lutter contre l'épidémie de coronavirus, le port du masque est obligatoire dans les lieux publics clos depuis le lundi 20 juillet. Une mesure inapplicable dans les salles de sport.

Ridofranz/iStock
Dans les salles de sport, les masques ne sont pas portés pendant l’effort.
Lieux publics clos, les salles de sport sont de potentiels foyers de transmission du coronavirus.
Me Fabrice Di Vizio estime qu’il faudrait préciser les conditions d’application du décret.

Le 14 juillet dernier, le Président Emmanuel Macron rendait le port du masque obligatoire dans les lieux publics clos pour prévenir une deuxième vague de coronavirus. En théorie, les salles de sport — qui sont donc bien des lieux publics clos — ne font pas exception à la règle. En théorie seulement. En pratique, les masques ne sont pas portés pendant l’effort. "On met des masques lorsqu’on se déplace de machine en machine", témoigne Laura, cliente d’une salle de sport forte de 4 000 adhérents. "Mais lorsque je suis sur les machines, je ne porte pas de masque. C’est impossible de faire du sport avec un masque. Tout à l’heure j’ai oublié de l’enlever, je n’étais pas bien. On respire mal, on a trop chaud, on récupère moins. C’est très désagréable, et ça peut même être dangereux".

Une amende de 135€ en cas de contrôle

Conscientes du problème, les salles de sport n’imposent donc pas le port du masque pendant l’effort physique, mais uniquement pendant les déplacements. Il est aussi demandé de nettoyer les machines après leur utilisation. “Le port du masque pendant les déplacements n’est pas complètement inutile je pense, dans la mesure où la salle est très grande. Cela te protège des personnes que tu croises”, poursuit Laura. Si l’on s’en tient au texte de loi, notre sportive risque une amende de 135€ en cas de contrôle, et sa salle de sport une fermeture administrative assortie de potentielles poursuites judiciaires. Pour Benjamin, qui fréquente lui aussi une de ces salles, “le port du masque ne sert tout simplement à rien. Quand on se déplace, on mouille le masque avec la transpiration de l’effort que l’on vient de faire. Donc on laisse de toute façon des gouttelettes partout dans l’air". Sceptique, ce grand sportif à la musculature impressionnante a tout de même pris le pli. “Je porte le masque à la salle, même si je pense que c’est inutile.”

Se protéger et protéger les autres

Une nouvelle étude du JAMA vient de démontrer que le port du masque diminue significativement le taux d’infection au SARS-CoV-2, même si l’effet protecteur n’est pas garanti à 100%. “Bien qu'il ne s'agisse pas d'un essai clinique randomisé, cette étude fournit des données d'une importance capitale pour souligner que le masque aide à prévenir la transmission du SARS-CoV-2, soulignent les scientifiques dans un éditorial connexe. Couvrir la bouche et le nez avec des matériaux filtrants sert deux objectifs : la protection personnelle contre l'inhalation d'agents pathogènes ou de particules nocives, et le contrôle des sources pour éviter d'exposer d'autres personnes à des microbes infectieux qui peuvent être expulsés pendant la respiration", rappellent les experts.

Le port partiel des masques en salle de sport est donc problématique d’un point de vue sanitaire, et ce d’autant plus que le coronavirus semble bien pouvoir dans certaines circonstances se transmettre par l’air. “La transmission du virus par aérosols pourrait être responsable de l'apparition de Covid-19 signalée dans certains lieux fermés, tels que les restaurants, les boîtes de nuit, les lieux de culte ou les lieux de travail où les gens peuvent crier, parler ou chanter. Nous devrions éviter les endroits bondés, les lieux de contact étroit et les espaces clos ou mal aérés", a clarifié l’OMS après de nombreuses tergiversations. Le 21 juillet, la France comptait pas moins de 208 foyers de coronavirus actifs, la circulation du virus étant en augmentation.

Préciser les conditions d’application du décret

Le cas des salles de sport soulève aussi un problème juridique. “Contrairement à ce qui a été mis en place chez notre voisin transalpin, le port du masque en salle de sport a été rendu obligatoire même pendant l'activité physique. Cette mesure peut avoir des conséquences graves, et peut amener à chercher la responsabilité du gouvernement en cas d'accident lié au port du masque", analyse maître Fabrice Di Vizio, qui croule sous les appels de médecins du sport dénonçant l’absurdité du décret.

Fermer les salles ?

Nouveaux foyers épidémiques potentiels, casse-tête juridique… Ne faudrait-il pas tout simplement refermer les salles de sport en France ? “Pour moi, ce serait vraiment dur. C’est ce qui m’a le plus manqué pendant le confinement, désapprouve Laura. Ce n’est pas pareil de faire du sport chez soi, dehors ou en salle. La salle de sport permet de faire plein d’exercices différents grâce au matériel. En une heure, tu peux courir, marcher, monter des escaliers, faire du rameur, du vélo…", explique la belle trentenaire.

Sans aller jusque-là, Me Fabrice Di Vizio estime qu’il faudrait déjà préciser les conditions d’application du décret régissant le port du masque obligatoire dans les lieux publics clos. “En Italie, il y a une liste des lieux concernés par le port du masque obligatoire, et les conditions d’application du décret sont détaillées pour chaque endroit. Par exemple, au théâtre, on doit porter le masque à l’entrée de la salle et pour accéder à sa place, mais pas une fois que l’on est assis", conclut l’expert juridique.