- Le dérèglement des rythmes circadiens favorise l’apparition précoce de cancers du sein plus agressifs.
- Il affaiblit le système immunitaire et modifie les tissus mammaires.
- Une cible thérapeutique, LILRB4, pourrait permettre de limiter ces effets.
Travailler de nuit, enchaîner les vols long-courriers ou dormir à des heures irrégulières ne fatigue pas seulement l’organisme : ces mauvaises habitudes pourraient aussi favoriser des formes agressives de cancer du sein. Une nouvelle étude américaine, publiée dans la revue Oncogene, apporte aujourd’hui des réponses inédites sur ce lien longtemps suspecté.
Quand l’horloge biologique se dérègle
Nos rythmes circadiens, cette horloge interne de 24 heures, régulent le sommeil, la sécrétion hormonale, la réparation des tissus et la vigilance du système immunitaire. Lorsqu’ils sont perturbés, ces mécanismes essentiels sont totalement chamboulés. "Le rythme circadien orchestre le fonctionnement de nos tissus et la façon dont le système immunitaire détecte le danger. Quand ce rythme est perturbé, les conséquences peuvent être graves", explique la Dre Tapasree Roy Sarkar, co-directrice du Center for Statistical Bioinformatics à la Texas A&M University, dans un communiqué.
Pour comprendre ce phénomène, les chercheurs ont étudié deux groupes de modèles génétiquement programmés pour développer un cancer du sein agressif. L’un suivait un cycle jour-nuit normal, l’autre était soumis à un éclairage perturbant son horloge interne. Résultat : les cancers apparaissaient près de quatre semaines plus tôt dans le groupe au rythme circadien altéré, avec des tumeurs plus invasives et davantage de métastases dans les poumons.
Les travaux montrent également que le système immunitaire est affaibli par ce dérèglement de l’horloge interne. "Ce n’était pas seulement une croissance plus rapide des tumeurs : le système immunitaire était activement freiné", souligne la chercheuse.

Vers des traitements plus personnalisés
Les scientifiques ont identifié un acteur clé : le récepteur LILRB4, connu pour inhiber la réponse immunitaire. Normalement protecteur, il devient problématique lorsqu’il est suractivé. "LILRB4 agit comme un bouton d’arrêt du système immunitaire", résume la Dre Sarkar. En bloquant ce mécanisme, les chercheurs ont observé une diminution de la croissance tumorale et des métastases, même en cas de dérèglement circadien.
Cette découverte ouvre la voie à de nouvelles stratégies thérapeutiques, notamment pour les personnes exposées à des rythmes de vie atypiques. Elle confirme surtout que la perturbation de l’horloge biologique ne se contente pas d’être associée au cancer : elle peut en accélérer la progression. Alors que 12 à 35 % des Américains travaillent selon des horaires irréguliers, l’enjeu de santé publique est majeur.


