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Anxiolytiques

Valium, Lexomil, Xanax : un "gène collant" permet aux benzodiazépines de calmer les nerfs

Par Johanna Hébert

Alors qu’on pensait jusqu’ici que les médicaments benzodiazépines agissaient seuls pour calmer l’anxiété ou éviter l’insomnie, des chercheurs ont découvert qu’un "gène collant" est en réalité nécessaire dans le processus. Cette conclusion peut changer la vision que l’on a de ces médicaments et des circuits neuronaux qu’ils affectent.

Darwin Brandis / istock

Les Français sont les deuxièmes plus gros consommateurs de benzodiazépines en Europe, derrière les Espagnols. Ces médicaments sont utilisés pour traiter l’anxiété ou l’insomnie. Toutefois, c’est également dans l’Hexagone que la diminution de la consommation est la plus forte. Entre 2012 et 2015, elle a été de 10%, contre 5,1% en Europe. Aux Etats-Unis en revanche, la tendance est à l’augmentation constante. Plus d’un Américain sur huit a consommé des benzodiazépines au cours de l’année 2018. Entre 1999 et 2017, le nombre de personnes décédées des suites d’une surdose de Valium® a été multiplié par dix.

Pendant des années, la communauté scientifique a estimé que ces sédatifs agissaient seuls pour calmer l’anxiété. Mais des chercheurs du National Institues of Health ont découvert, en menant une étude sur des souris, qu’ils avaient en réalité besoin d’un "gène collant" pour être efficaces. Les résultats de ces travaux sont publiés dans la revue Science.

Le gène Shisa7 réduit l’excitabilité du système nerveux

Ce gène a été appelé Shisa7, en référence à une figure mythologique. "Nous avons constaté que Shisa7 joue un rôle essentiel dans la régulation des circuits neuronaux inhibiteurs et dans les effets sédatifs que les benzodiazépines ont sur ces circuits", déclare Wei Lu, auteur principal de l’étude. Ces médicaments, en se fixant sur un récepteur spécifique, facilitent l’action d’un neurotransmetteur, le GABA (acide gamma amino butyrique). Ce neurotransmetteur diminue l’excitabilité du système nerveux central. Avant cette étude, les scientifiques pensaient que les benzodiazépines agissaient seuls pour stimuler les réponses des récepteurs GABA. Or, d’après les découvertes du docteur Lu, cette réponse est due au fait que le gène Shisa7 est collé à ces récepteurs.

Un "gène collant", qui augmente les effets du médicament

Pour mener cette étude, le docteur Lu et son équipe ont travaillé sur des souris, en utilisant des techniques microscopiques avancées afin de repérer la présence du gène Shisa7. En éliminant  par la suite ce gène, les chercheurs ont constaté une diminution du nombre de neurotransmetteurs GABA. De plus, il s’est avéré que la présence du gène Shisa7 augmentait l’activité des neurotransmetteurs GABA, et doublait même l’ampleur des réponses en présence de Valium®. Cette découverte montre que le "gène collant" Shisa7 rend le récepteur plus sensible aux benzodiazépines. "Ces résultats suggèrent que Shisa7 détermine directement les réponses des synapses dans diverses conditions, y compris la présence de benzodiazépines", précise le docteur McBain, l’un des auteurs de l’étude.

"Nos résultats mettent en lumière l’importance clinique potentielle de protéines auxiliaires telles que Shisa7. De nombreux médicaments neurologiques que nous utilisons aujourd’hui sont conçus pour contrôler l’activité des récepteurs synaptiques. Pour la première fois, nous montrons que les chercheurs peuvent également envisager des protéines comme Shisa7 dans le développement de nouveaux traitements, qui ciblent les neurotransmetteurs GABA", conclue le docteur Lu.