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"Découverte majeure"

Sida : un "ouvre-boîte" moléculaire pour ouvrir le VIH et éliminer les cellules infectées

Par Raphaëlle de Tappie

Une équipe de chercheurs internationale à réussi à mettre au point un "ouvre-boîte" moléculaire capable d'ouvrir le virus du sida. Cette découverte a permis de mettre à jour des vulnérabilités insoupçonnées du HIV. 

Artem_Egorov/iStock

En 2018, 770 000 personnes sont mortes du sida dans le monde. Bien que cela représente un tiers de moins qu’en 2010, la lutte contre le sida ne progresse pas assez rapidement, déplore l’Onusida, le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida. Aujourd’hui, une nouvelle étude ouvre toutefois de nouvelles perspectives dans la lutte contre ce fléau. Dans l’article récemment paru dans la revue Cell, une équipe de chercheurs internationale a réussi à mettre au point un "ouvre-boîte moléculaire" pour ouvrir le virus du sida. Elle a ainsi pu mettre à jour des vulnérabilités jusque-là inconnues. 

Très tôt lors de l’infection, le VIH arrive à se cacher et s’endormir dans ses cellules cibles (lymphocytes, monocytes, macrophages) par le biais d’un récepteur constitué de molécules du nom de CD4 et CCR5. En déclenchant des changements de forme de l’enveloppe virale, cette mise en contact permet au virus d’infecter les cellules hôtes. C’est pourquoi, des chercheurs ont donc eu l’idée d’utiliser de petites molécules ressemblant aux CD4 pour tromper le virus et le pousser à s’ouvrir.

L’enveloppe du VIH comporte des pièces mobiles lui permettant d’adopter différente formes en réponse à divers stimulus, tels que des anticorps ou des petites molécules. Et cet ouvre-boîte moléculaire mis au point par des chercheurs de l’Université de Tufts (Massachussets, Etats-Unis) et nommé transfert d’énergie par résonance de type Förster à molécules uniques a permis aux scientifiques de voir comment différents éléments de l’enveloppe virale se déplaçaient les uns par rapport aux autres.

Ouvrir l’enveloppe pour repérer les cellules infectées

"L’enveloppe du VIH est une structure très dynamique, tous ses constituants sont en mouvement. Nous sommes parvenus à lui faire prendre une conformation particulière que nous ignorions car le virus ne la montre pas spontanément", se félicite le Professeur Andrés Finzi, professeur à l'Université de Montréal (Canada), dont l’équipe a participé à l’étude. La forme nouvellement identifiée étant une forme "vulnérable aux anticorps de la personne infectée", il s’agit d’une "découverte majeure".

"L’idée est que si on peut sensibiliser les cellules infectées (à la réponse immunitaire), on pourrait les éliminer. La thérapie actuelle, qui fonctionne très bien, diminue la charge virale et bloque le cycle de réplication (du virus), mais elle ne s’attaque pas aux cellules infectées. On pense que ce serait positif de pouvoir éliminer une cellule infectée qui produit des milliers de particules virales", détaille-t-il. Et pour que les anticorps puissent reconnaître les cellules infectées, il faut pouvoir ouvrir l’enveloppe.

Aussi, à terme, cette technique d’"ouvre-boîte" pourrait potentiellement permettre d’éliminer les cellules infectées chez les porteurs du VIH et d’identifier les réservoirs viraux où se cache le virus en état de latence. Puis, le système immunitaire et la médication seraient utilisés simultanément pour venir à bout du sida.

On est encore loin du traitement applicable aux humains

Quoiqu’il en soit, "ce virus a une capacité de mutation extraordinaire. C’est une machine d’évolution et de mutation. Il n’y a pas une thérapie qui va fonctionner sous forme de monothérapie ou de monostratégie", prévient Finzi.

Aussi, ces découvertes sont encore loin d’aboutir à un traitement efficace sur les humains. Pour aller approfondir leurs recherches, les scientifiques veulent désormais tester le concept sur des animaux.

Récemment, des experts espagnols ont également fait une découverte qui pourrait peut-être à terme mener à de nouveaux médicaments anti-VIH. D’après leur étude parue fin août dans la revue PLOS Pathogens, une mutation génétique particulièrement rare à l’origine d’une maladie musculaire affectant une centaine de personnes, pourrait représenter une immunité naturelle contre le sida.