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Conseil de l'Europe

Europe : la crise aggrave les inégalités de santé

Par Bruno Martrette

Le Conseil de l’Europe dénonce l’aggravation des inégalités d’accès aux soins en Europe et les conséquences catastrophiques des coupes budgétaires sur la santé. 

RAKITA MAGDA/SIPA

Face à la crise, l'accès aux soins de santé se complique pour les Européens ! L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté à Strasbourg il y a quelques jours un rapport dénonçant l’aggravation des inégalités d’accès aux soins en Europe et les conséquences catastrophiques des coupes budgétaires tant pour la santé individuelle que publique. Le rapport décrit des situations préocuppantes, notamment pour les personnes les plus vulnérables.

 

En effet, le document adopté à l’unanimité expose la situation sanitaire dramatique qui se déroule actuellement dans cette Europe en crise. Surtout, dans les Etats où la protection sociale est subordonnée à un emploi, les groupes vulnérables souvent écartés du marché du travail sont gravement touchés. 
Ainsi, les chômeurs, les Roms ou encore les migrants sont fortement pénalisés concernant l'accès aux services médicaux, souligne le rapport. En Bulgarie, 46 % de Roms n'ont aucune assurance maladie. Par ailleurs, en Espagne, une nouvelle loi votée en avril 2012 rend maintenant l'accès aux services médicaux plus difficile pour les chômeurs. Inquiétant dans un pays où le chômage est monté à 26,9 % de la population active au mois de mai 2013. 

En Grèce, où le chômage a atteint 26,8 % au mois de mars la situation n'est pas meilleure. Car la couverture santé continue seulement pendant une année après la perte d'un emploi. En conséquence, aujourd'hui, des centaines de milliers de chômeurs grecs et des migrants n'ont pratiquement aucun accès aux services médicaux.

Autre exemple alarmant cité dans le rapport, l'abandon des soins dentaires par certains Européens. Ces derniers sont il est vrai exclus des remboursements forfaitaires dans de nombreux pays d'Europe (Belgique, Danemark, Grèce, Portugal, Suisse). Les patients qui sont donc obligés de couvrir eux-mêmes ces coûts préférent tout simplement y renoncer. 
Dans le même temps, le rapport indique que la France n'est pas en reste. Les auteurs rappellent que dans une enquête publiée en juillet 2010 par le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie, un Français sur sept (14 % de la population) déclarait renoncer à des soins de santé, faute de moyens. Et, en Géorgie, pays où le reste à charge en santé représente 75% des dépenses de santé d'un foyer, les familles précaires se ruinent les unes après les autres, s'inquiètent les auteurs. Les frais de santé peuvent ainsi atteindre jusqu'à 40 % des revenus des ménages géorgiens.
 
Enfin, la crise fait apparaître un nouveau phénomène, méconnu jusqu'à présent, celui de la fraude et de la corruption qui touche  à présent les professionnels de santé. Les auteurs constatent ainsi le versement de dessous-de-table aux médecins par les patients, cela afin d'éviter d'être placé sur une longue liste d'attente pour une consultation ou une opération. 
« Tous ces exemples montrent que les politiques d’austérité, dictées uniquement par des impératifs budgétaires, ne marchent pas et coûtent des vies », conclut le rapport. Face à ce bilan calamiteux, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe exhorte les États membres à prendre des mesures pour que le coût des soins ne devienne pas un obstacle à leur accès, par exemple en promouvant l’utilisation des médicaments génériques. Son but avoué, faire enfin respecter le « droit fondamental » à la santé, quels que soient les moyens financiers, le statut de séjour ou le lieu de résidence de la personne.