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Inquiétant

Cigarette électronique : une trentaine de consommateurs hospitalisés aux Etats-Unis

Par Raphaëlle de Tappie

Aux Etats-Unis, une trentaine de personnes ont été hospitalisés pour des problèmes respiratoires ces dernières semaines. Leur point commun: la consommation de cigarette électronique. Les autorités sanitaires mènent l'enquête. 

LucaLorenzelli/iStock

Aux Etats-Unis, près de 30 personnes ont été hospitalisées pour des problèmes respiratoires sévères, des fatigues et des étourdissements dans le Winsconsin, le Minnesota et l'Illinois, ces dernières semaines. Si la gravité des cas varient, ils ont tous un point commun : tous les patients ont déclaré avoir vapoté de la nicotine ou de la marijuana via une cigarette électronique pendant les semaines précédant leur hospitalisation. Les départements de santé publique de ces trois Etats situés dans le nord du pays ont donc ouvert une enquête sur ces cas ainsi que 20 autres du même genre. "Pour l’instant, le vapotage est le seul point commun entre toutes ces affaires, mais nous essayons d’étendre nos recherches pour déterminer avec certitude que nous n’oublions rien", témoigne Thomas Haupt, spécialiste des problèmes respiratoires du service de Santé du Wisconsin.

"Nous savons que les jeunes ont été blessés. Nous ne connaissons pas encore l'agent causal", explique au New York Times le Dr David D. Gummin, directeur médical du Wisconsin Poison Center et professeur et chef de la toxicologie médicale au Medical College of Wisconsin. "Nous n'avons pas d'autres pistes que celles qui sont associées au tabagisme ou au vapotage". Au départ, les médecins soupçonnaient les patients de souffrir d’une maladie infectieuse. Mais devant le manque de réponse des patients aux antibiotiques et alors que tous ont déclaré vapoter régulièrement, les docteurs ont commencé à se demander s’ils n’étaient pas victimes d’une substance toxique.

"Les personnes qui sont tombées malades se sont montrées très ouvertes au sujet de certains de leurs antécédents récents (…). Celles qui ont pu parler nous ont donné quelques pistes, mais malheureusement pas assez pour nous indiquer une direction précise", poursuit le Dr Gummin. Selon lui, il est possible que les jeunes aient acheté un produit de vapotage à base de nicotine ou de cannabis déjà été utilisé une fois puis rempli à nouveau de substances dangereuses difficiles à détecter.

"Nous avons peu d’expérience avec le vapotage"

Dans le Wisconsin, les autorités sanitaires ont signalé 12 cas confirmé et 14 cas présumés de maladies liées à l’inhalation de vapeurs. Des gens ayant rapporté avoir récemment capoté des huiles contenant de la marijuana présentaient même de graves lésions pulmonaires. Ces patients ont également déclaré utiliser des dispositifs à réservoirs ouverts avec des cartouches interchangeables. Ces systèmes permettent aux consommateurs de concocter leur propres liquides s’ils le veulent.

Dans le Minnesota, au cours du derniers mois, le Dr Emily Chapman, médecin-chef du système hospitalier pour enfants a traité quatre cas de lésions pulmonaires aiguës et graves, dont une insuffisance respiratoire, chez des adolescents ayant vapoté, rapporte le New York Times. Si l’état de ces jeunes s’est aujourd’hui amélioré, le Dr Chapman n’est pas certain qu’ils s’en remettent complètement un jour. "La vérité, c'est que nous avons si peu d'expérience avec le vapotage, par rapport à l'expérience que nous avons avec les cigarettes et les cigares. Rappelez-vous combien de temps il nous a fallu pour comprendre que la cigarette était liée au cancer du poumon. Il y a tant de choses qu'on ne sait pas", s'inquiète-t-elle.

Les services de santé publique de l'État travaillent donc désormais avec la Food and Drug Administration et lesCentres de contrôle des maladies pour déterminer l’origine du mal des victimes. "L'agence travaille avec les autorités sanitaires de l'État pour recueillir plus d'informations sur les produits ou les substances utilisés", déclare Michael Felberbaum, un porte-parole de la FDA. "Nous encourageons le public à soumettre des rapports détaillés sur tout problème de santé ou de produit inattendu à la FDA", poursuit-il.

Création d’addictions chez de nombreux jeunes américains

Les cigarettes électroniques sont disponibles depuis 2006 aux Etats-Unis et les scientifiques estimaient jusqu’ici qu’elles étaient moins toxiques que les cigarettes traditionnelles. Toutefois, récemment, une étude a identifié des produits chimiques dans certains liquides de e-cigarettes Juul, extrêmement populaires auprès des jeunes américains. D’après certains chercheurs, ces produits chimiques peuvent être particulièrement irritants pour les poumons et causer des dommages quand ils sont inhalés. Et si de nombreux experts assurent toujours que les cigarettes électroniques sont moins dangereuses que les cigarettes classiques, on a constaté aux Etats-Unis la création d’addiction chez des jeunes n’ayant jamais fumé de tabac.

En effet, en mars 2019, les Centres de contrôle des maladies a publié un nouveau rapport mettant en évidence l’augmentation de l’utilisation de cigarettes électroniques chez les jeunes étudiants. Ainsi, sur l’année 2018, plus d’un lycéen sur quatre (27,1%) a consommé de façon régulière (20 jours ou plus sur une période de 30 jours) un ou plusieurs produits du tabac (i.e. cigarette, cigarette électronique, pipe, cigare..), ce qui constitue une augmentation de 38% par rapport à l’année 2017. Dans le détail, l’utilisation de la cigarette électronique a quant elle augmenté de 78% entre 2017 et 2018.

Face à cette inquiétante tendance, la ville San Francisco (Californie) a décidé d’en interdire la vente à l’horizon 2020. Dans le même temps, la FDA mène des études pour déterminer s’il existe une relation directe entre l’utilisation de cigarettes électroniques et le risque de crise ou d’autres problèmes neurologiques. Car depuis 2010, l’agence a reçu 127 signalements de crises ou d'autres symptômes neurologiques chez des consommateurs.

En attendant, en France, la cigarette électronique continue d’avoir bonne presse. Selon un sondage Odoxa-Dentsu Consulting réalisé en 2018 pour Le Figaro et France Info auprès de 1030 personnes, pour plus de deux tiers des sondés, la cigarette électronique est bel et bien une aide au sevrage tabagique.