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Environnement obésogène

Obésité : il existe bien un déterminisme génétique

Par Charlotte Arce

Une nouvelle étude menée en Norvège sur près de 120 000 personnes suggère que si l’augmentation de l’obésité est bien liée à des modes de vie peu sains, les gènes jouent aussi un rôle important.

Zinkevych/iStock

En France, on estime que l’obésité touche 15,8% des hommes et 15,6% des femmes, soit 7 millions de personnes. À l'échelle mondiale, plus de 1,9 milliard d'adultes étaient en surpoids en 2016. Parmi eux, 650 millions souffrent d’obésité.

Les chercheurs sont unanimes pour constater que le nombre de cas d'obésité a presque triplé depuis 1975. Pourtant, les origines de cette explosion ne sont pas toujours claires.

Parmi les facteurs favorisant l’obésité, se trouve en premier lieu les changements de régime alimentaire, plus gras, plus sucré, plus salé, et composé d’aliments ultra-transformés. Un mode de vie plus sédentaire et des modifications de l'environnement biologique, telles que les toxines et le microbiote intestinal, pourraient également contribuer à l’obésité.

Un facteur est pourtant souvent minimisé dans l’explosion des cas d’obésité au niveau mondial : la génétique.

Un excès de poids de 13,9 kg lié à la génétique

Dans un article publié dans le British Medical Journal, des chercheurs de l’Université norvégienne des sciences et des technologies (NTNU) à Trondheim, en Norvège, viennent de mettre en lumière le rôle joué par le patrimoine génétique dans le développement de l’obésité : ces différences génétiques pourraient rendre certaines personnes plus sensibles que d' autres à un environnement obésogène.

"Bien que des recherches antérieures aient suggéré que la vulnérabilité génétique avait des conséquences plus importantes après le début de l'épidémie d'obésité qu'auparavant, notre ensemble de données fournit des résultats convaincants, avec une grande taille d'échantillon et une gamme d'années d'évaluation et d'âge", explique dans un communiqué Maria Brandkvist, doctorante au Département de santé publique et de soins infirmiers au NTNU et co-auteure de l’étude.

Pour comprendre dans quelle mesure l’environnement et les gènes avaient un impact sur l’obésité, les chercheurs ont analysé les données de près de 120 000 personnes entre 1963 et 2008. Leur taille et leur poids ont été régulièrement relevés pour élaborer et analyser leur indice de masse corporelle (IMC).

La moitié des personnes suivies ont ensuite été divisées en 5 groupes en fonction de leur susceptibilité génétique à l’obésité. Les résultats ont été surprenants.

Les chercheurs ont en effet pu constater qu’en moyenne, dans les années 60, une prédisposition génétique rendait un homme de 35 ans de taille moyenne 3,9 kg plus lourd que ses pairs génétiquement protégés. Mais si ce même homme âgé de 35 ans vivait aujourd'hui en Norvège, ses gènes vulnérables le rendraient plus lourd que 6,8 kg.

"De plus, lui et ses pairs auraient gagné 7,1 kg supplémentaires simplement parce qu'ils vivaient dans notre environnement obésogène", affirme Maria Brandkvist. "L'excès de poids de 13,9 kg de cet homme est causé principalement par le mode de vie malsain d'aujourd'hui, mais aussi par la façon dont ses gènes interagissent avec l'environnement."

Lutter contre les préjugés sur l’obésité

Si la corrélation entre les profils génétiques et le degré d'obésité est forte, l'étude, de par sa nature, ne peut en revanche pas déterminer une relation de cause à effet directe, reconnaissent les auteurs. Toutefois, souligne Maria Brandkvist, ces résultats doivent nous faire réfléchir à la manière dont sont perçues les personnes obèses dans notre société.

"Les personnes obèses sont souvent stigmatisées parce qu'elles ont des choix de vie malsains. Reconnaître l'importance de l'environnement obésogène et son amplification due à nos différences génétiques peut aider à déstigmatiser l'obésité. Il est peut-être temps de nous éloigner de l'individu et de nous concentrer sur une société plus saine."