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Développement personnel

La crèche influence le développement comportemental et émotionnel des enfants

Par Barbara Azaïs

Selon une récente étude menée par l'Inserm, les enfants ayant fréquenté un mode de garde collectif (crèche, assistance maternelle...) rencontrent moins de problèmes émotionnels ou de difficultés relationnelles.

santypan/iStock

De nombreux parents pensent qu'il est plus épanouissant pour leurs enfants de rester auprès d'eux durant leurs premières années de vie, avant leur entrée en maternelle. Les théories vont et viennent concernant la place de l'enfant de 0 à 3 ans : est-elle auprès de ses parents, ou est-il bénéfique qu'il interagisse avec les autres dès son plus jeune âge ? Les enfants de moins de 3 ans sont-ils vraiment prêts à évoluer en collectivité ? Qu'en est-il des nourrissons ?

Moins de difficultés relationnelles entre 3 et 8 ans

Des chercheurs de l’Inserm ainsi que des universités de la Sorbonne et de Bordeaux ont étudié l’influence du mode de garde pendant les trois premières années de vie sur le développement comportemental et émotionnel des enfants. Pour ce faire, ils se sont basés sur 1428 enfants de la cohorte EDEN (Etude sur les Déterminants pré- et post-natals précoces du développement psychomoteur et de la santé de l’Enfant), qui a suivi des mères pendant leur grossesse et leurs enfants jusqu’à 8 ans. "Les mères ont rapporté le mode de garde principal utilisé pour leur enfant à 4 mois, 8 mois, 1 an, 2 ans et 3 ans : mode de garde informel (principalement les parents et parfois les grands-parents, voisins...), assistante maternelle ou mode de garde collectif (garderie, crèche)".

Puis à 3 ans, 5 ans et demi, et 8 ans, elles ont rempli un questionnaire destiné à mesurer les symptômes comportementaux et émotionnels à travers 5 échelles (symptômes émotionnels, problèmes relationnels, hyperactivité-inattention, problèmes de comportement, et comportement prosocial). 

Les résultats sont clairs : les enfants qui ont fréquenté "un mode de garde collectif sont moins susceptibles d'éprouver des problèmes émotionnels ou de rencontrer des difficultés relationnelles entre 3 et 8 ans. Ils ont aussi un comportement plus prosocial, c’est-à-dire plus empathique", dû au fait qu'ils ont appris très tôt à être gentil avec les enfants plus jeunes et à partager. "L’accès à un mode de garde collectif entre 0 et 3 ans représente une opportunité pour les enfants qui en bénéficient puisqu'il est associé à un meilleur développement psychologique et émotionnel par la suite," explique Maria Melchior, chercheuse à Inserm. 

A quel âge entre 0 et 3 ans l'enfant peut-il être inscrit en crèche ?

En France, les bébés sont acceptés en crèche à partir de 2 mois. Mais selon Miriam Rasse, psychologue en crèches et directrice de l’Association Pikler-Loczy, leur "principale tâche est de construire son individualité et non pas de faire attention à l’autre. Il est important de rappeler, qu’à la naissance, l’enfant n’a pas conscience qu’il est une autre personne. Il se confond avec sa mère, son entourage ou son environnement. Vers 8 mois, il commence à comprendre que sa mère et lui ne forment pas un tout, d’où la peur de la séparation".

A quel âge entre 0 et 3 ans est-il donc bénéfique d'inscrire son enfant en crèche ? Interrogée sur le sujet, Maria Melchior nous explique que si son étude a démontré qu'un mode de garde collectif stimule le développement émotionnel et relationnel des enfants, leur âge d'entrée en crèche n'a pas été étudié précisément. "Nous avons cependant remarqué que les enfants inscrits avant 12 mois en tiraient des bénéfiques favorables à long terme. De même que ceux y étant restés plus d'un an, comparativement à d'autres y étant restés moins longtemps". La chercheuse ajoute que l'enfant peut construire son individualité au contact d'autres enfants ou d'autres adultes que sa mère. Selon elle, le suivi pédagogique, les activités structurées et l'encadrement des professionnels sont des facteurs déterminants dans le résultat de son étude.

La pénurie des solutions de garde d'enfants en France

Même si ces résultats sont encourageants, il subsiste une réalité : la pénurie de solutions d'accueil en France rend la garde des enfants de moins de 3 ans difficile. Selon le rapport 2016 de l'Observatoire national de la petite enfance de la Caf, au 1er janvier 2016, la France comptait 2,3 millions de moins de 3 ans et 56% d'entre eux disposaient d’une place dans l’un des différents modes de garde officiels (crèche, école maternelle, assistante maternelle ou emploi à domicile). "La capacité théorique d’accueil des modes d’accueil 'formels' pour 100 enfants de moins de 3 ans a donc progressé", puisqu'elle est passée de 50,5 places en 2010 à 56,1 places en 2014, mais reste insuffisante. 

"L'offre actuelle de modes d’accueil est encore loin de couvrir la demande, tant sur le plan quantitatif que dans sa diversité et sa localisation", note le rapport 2018 du Haut conseil de la famille, de l'enfance et de l'adolescence (HCFEA) sur "l'accueil des enfants de moins de 3 ans". D'ici à 2022 et considérant les évolutions démographiques, politiques et économiques, le HCFEA estime qu'un effort doit être fait pour créer 230 000 solutions d'accueil supplémentaires.

Source : rapport 2018 du Haut conseil de la famille, de l'enfance et de l'adolescence (HCFEA).