ACCUEIL > QUESTION D'ACTU > Pollution : les fabricants européens de diesel causent 2 700 décès prématurés par an

Décès

Pollution : les fabricants européens de diesel causent 2 700 décès prématurés par an

Par Jean-Guillaume Bayard

Les émissions d'oxyde d’azote des voitures diesel européennes dépassent largement les normes, causant chaque année près de 2 700 décès prématurés. C'est ce que démontre une étude menée par des chercheurs du MIT. Un vrai problème quand on sait que l'impact de cette pollution traverse les frontières !

Toa55/iStock

Les scientifiques du Massachusetts Institute of Technology (MIT) ont publié des résultats surprenants dans Atmospheric Environment sur les émissions polluantes des voitures diesel en Europe. Le tout avec une certaine complicité au niveau des instances européennes. Les émissions d'oxyde d’azote sur la route des voitures diesel européennes sont seize fois plus importantes que celles émises lors des tests de contrôle en laboratoire !

Les dix plus gros producteurs européens de voitures diesel sont responsables chaque année d’environ 2 700 décès prématurés à travers l’Europe. En 2015, les voitures diesel représentaient 41,3% des voitures circulant en Europe.

Dix constructeurs en cause

L’étude s’est intéressée aux émissions d’oxyde d’azote produites par les gaz d’échappement des voitures diesel. Les dix constructeurs épinglés par l’étude sont : Volkswagen, Renault, Peugeot-Citroën, Fiat, Ford, General Motors, BMW, Daimler, Toyota et Huyndai. Ils représentent 90% des voitures diesel vendues en Europe entre 2000 et 2015.

Quand il s’échappe de la voiture, l’azote réagit avec l’ammoniaque présent dans l’atmosphère créant des particules fines qui, lorsqu’elles sont inhalées, se logent profondément dans les poumons et entraînement des maladies respiratoires, des infections pulmonaires et cardiaques. De plus, ces émissions provoquent la formation d’ozone, dont les conséquences néfastes sur la santé sont prouvées.

Une complicité coupable des instances européennes

Les chercheurs ont mené des tests indépendants sur les routes, montrant que les émissions produites par ces voitures diesel sur la route sont seize fois plus importantes que celles émises lors des tests de contrôle en laboratoire au niveau européen. Un écart qui avait conduit, en 2015, le constructeur automobile allemand Volkswagen à rappeler 8,5 millions de véhicules en Europe.

Mais ce coup-ci l'auteur de l’étude, Steven Barrett, professeur d’aéronautique et d'astronautique au MIT, explique qu’il n’y a pas de violation des règles européennes. De quoi soupçonner, selon lui, des "procédures de tests permissives au niveau de l’Union européenne" et "des stratégies de contrôle de ces émissions" qui pourraient être à l’origine de cette situation.

Des conséquences transfrontalières

Les conséquences de ces émissions sont très inégales en fonction des pays européens. En effet, leur impact sur la santé ne se produit pas à l’endroit où elles ont été émises car les particules fines se déplacent longtemps dans l’atmosphère avant de se déposer.

"On s’est rendu compte que 70% des impacts sur la santé sont transfontaliers", détaille l’étude. Ainsi, par exemple, certains pays tels que la Pologne et la Suisse qui produisent très peu d'émissions d’oxyde d’azote ont enregistré un nombre disproportionné de décès prématurés dû à des émissions excessives provenant d'autres pays.

Pour ces tests, les chercheurs ont utilisé GEOS-Chem, un modèle de transport de produits chimiques qui simule la circulation de produits chimiques et de particules dans l’atmosphère afin de déterminer où les émissions d’oxyde d’azote excédentaires de chaque fabricant ont évolué au fil du temps.

Réduire les émissions pour réduire les décès

Parmi les constructeurs, tous n’ont pas la même responsabilité sur la santé. Ainsi, trois constructeurs (Volkswagen, Renault et General Motors) sont responsables du plus grand nombre de décès chaque année parmi les dix fabricants de voitures diesel pointés du doigt par l’étude.
À l’inverse, Toyota, Huyndai et BMW sont les trois dont les voitures émettent le moins d’émission, causant le moins de décès parmi ces dix fabricants.

Enfin, l’étude explique que si les dix producteurs de voitures diesel qu’elle épingle se mettaient au niveau du fabricant qui émet le moins d’émission d’oxyde d’azote, cela permettrait d’éviter au moins 1 900 décès prématurés chaque année. Mais "la solution consiste à éliminer complètement les émissions d’oxyde d’azote", précise M. Barrett. "Nous savons qu'il y a des impacts sur la santé humaine jusqu'aux niveaux préindustriels, donc il n'y a pas de niveau sûr. À l'heure actuelle, ce n'est pas que nous devons retourner à l'essence. En fin de compte, nous devons avoir zéro émission dans les villes".