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Epidémie à Lyon

Grippe : pourquoi les EHPAD sont vulnérables

Par la rédaction

A Lyon, une épidémie s’est déclarée dans une maison de retraite et a tué 13 résidents. Pourquoidocteur revient sur cet « événement exceptionnel ».

Lighthunter/epictura

A Lyon, une épidémie de grippe s’est propagée dans une maison de retraite, faisant 13 morts parmi les 110 résidents. Les personnes sont décédées entre le 23 décembre et le 7 janvier, a annoncé ce samedi la ministre de la Santé qui a saisi l’Inspection générale des affaires sociales (Igas).

Sur 72 personnes ayant contracté la grippe sur cette période dans l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Korian Berthelot à Lyon, 13 personnes, d’une moyenne d’âge de 91,5 ans, sont décédées ; sept sont hospitalisées. Pourquoidocteur revient sur les questions suscitées à l’occasion de cet « événement exceptionnel ».

C’est le point noir de cette affaire. Environ 40 % des résidents étaient vaccinés contre la grippe, selon le ministère de la Santé, alors que la moyenne nationale s’établit à 80 %, tout comme la moyenne en EHPAD. Parmi les 13 personnes décédées, six étaient vaccinées.

Selon l’établissement Korian Berthelot, que nous avons contacté, la campagne de vaccination était en cours quand l’épidémie a démarré. Elle a été interrompue dès les premiers cas, puis reprise à nouveau. Etant donné la vulnérabilité de cette population, de nombreux spécialistes estiment que les injections vaccinales devraient se concentrer sur les premiers mois de la campagne.

« On vaccine de début octobre à fin janvier, c’est la fenêtre de tir pendant laquelle on peut utiliser le vaccin, explique Bruno Lina, responsable du Centre national de référence de la grippe à Lyon (Rhône). Mais cette vaccination n’est utile que si elle est faite avant l’épidémie de grippe ! Or, un tiers des cas de grippe surviennent avant le 15 décembre. La fenêtre de tir doit donc se concentrer pendant les mois d’octobre et de novembre ».

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Bruno Lina, responsable du centre national de la grippe à Lyon : « Il peut avoir du rattrapage, mais le moment où l’épidémie se déclare, c’est le moment de la prise en charge et des mesures d’hygiène…»

 

Le décès de six personnes vaccinées pose en effet la question de l’efficacité du vaccin contre la grippe. On sait que sur les personnes âgées, ce vaccin a tendance à être moins efficace qu’en population générale. Cela pourrait expliquer la situation de Lyon, mais aussi celle que l’on observe dans presque 170 autres EHPAD touchés par la grippe depuis novembre.

« La vaccination contre la grippe est une bonne vaccination mais elle n’est pas parfaite, au sens où elle ne parvient pas à protéger 100 % de la population, explique François Bricaire, infectiologue à la Pitié-Salpêtrière. Chez les personnes âgées, dont le système immunitaire est moins réactif, on a aussi une moins bonne réponse, ce qui explique le risque d’échec ».

Ainsi, ce qu’on appelle l'immunosénescence est à l’origine de cette moindre efficacité, qui devrait inciter à augmenter la couverture vaccinale afin de ne pas exposer les plus vulnérables.

                                                                                                

Or, justement, dans cette maison de retraite, le taux de vaccination parmi l’ensemble du personnel (soin, administration, encadrement…) était lui aussi peu élevé. « Parmi les salariés de l’établissement, 39 % étaient vaccinés contre la grippe », a souligné à Pourquoidocteur un responsable de la communication de Korian, qui souligne toutefois que « ce chiffre est supérieur à celui de la population générale des soignants ». De fait, ce taux se situe aux alentours de 27 % selon des estimations nationales datées de 2011.

Un taux insuffisant pour lutter efficacement contre la propagation de la grippe dans les établissements de santé. Cet incident doit provoquer un déclic chez les professionnels de santé, estime le Pr François Bricaire, « J'insiste sur la nécessité de vacciner les personnels soignants qui s'occupent des personnes âgées ».

Si ce mot d'ordre était suivi, on limiterait largement, selon lui, les risques de transmettre le virus. « Cela aurait notamment un intérêt pour les personnes qui réagissent moins bien à l'injection vaccinale », précise-t-il.

Mais encore faut-il motiver les soignants à se vacciner… « C’est une question de conscience professionnelle, on ne peut pas obliger le personnel soignant à se vacciner mais on peut l’inciter », explique Pascal Meyvaert, vice-président de la Fédération français des associations de médecins coordonnateurs en EHPAD.

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Pascal Meyvaert, vice-président de la FFAMCO : « C’est tout le travail des médecins et infirmiers coordonnateurs et de la direction. »