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Génétique, environnement dégradé

Espérance de vie : pourquoi elle ne devrait plus progresser

Par Bruno Martrette

Selon une étude, la hausse de l’espérance de vie, qui stagne depuis quelques années, aurait atteint une « barrière physiologique ».  Les explications sont génétiques et environnementales.

Jeanne Calment en train de fêter ses 120 ans, BOULAT ALEXANDRA/SIPA
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L'espérance de vie plafonne ! C'est la conclusion étonnante d'une étude menée par des chercheurs de l'Institut de recherche biomédicale et d'épidémiologie du sport (Irmes) située à Paris (XIIe). Selon eux, même si la durée de vie a constamment progressé au cours des siècles grâce à la médecine, l'immortalité resterait une chimère dans un futur proche. Des résultats inédits publiés il y a quelques jours dans la revue scientifique américaine The Journal of Gerontology.

Une barrière physiologique à 115 ans pour les super-centenaires
Pour parvenir à cette conclusion, l'équipe de la chercheuse Juliana Antero-Jacquemin a analysé deux types de population. D'une part, un groupe composé des détenteurs des records de durée de vie internationalement validés, aujourd'hui décédés (1 205 femmes et hommes ayant vécu plus de 110 ans). D'autre part, un groupe avec des personnes ayant participé aux Jeux Olympiques de l’ère moderne (19 012 Olympiens) connues pour avoir une longétivité supérieure à la population générale.
Première conclusion de cette étude : les scientifiques observent une tendance croissante de la durée de vie des athlètes (80 à 85 ans). Toutefois, elle note que cette progression ralentit dans les dernières décennies, comme si un plafond naturel empêchait désormais leur progression.
Même constat chez les doyens de l’humanité. Avec des résultats encore plus marqués pour ce groupe. « Chez eux, la progression de la longévité stagne depuis 1997. Avec un plafond qui s'établit aux environs de 115 ans », précisent les auteurs de l'étude. Ces constats illustrent une barrière physiologique et renforcent les arguments d’une durée de vie limitée, rajoutent-ils.
Preuve de cela, la barre des 150 ans est pour le moment inaccessible. Et nous en sommes même bien loin puisque le record actuel de longévité est toujours détenu par la Française Jeanne Calment qui a vécu jusqu'à 122 ans.

Ecoutez Juliana Antero-Jacquemin, chercheuse et co-auteur l'étude: « On voit une stabilisation de la longévité aux âges maximaux de l'humanité. »


L'explication génétique
Pour expliquer ce phénomène, les chercheurs pensent qu'il faut aller chercher du côté du patrimoine génétique de l'homme. Comme l'explique Juliana Antero-Jacquemin : « L'homme n'a pas eu encore le temps de moduler ses gènes pour vivre plus longtemps. Car l'être humain n'a pas de justificatif biologique pour vivre plus longtemps. »

Ecoutez Juliana Antero-Jacquemin: « L'homme vit jusqu'à 40 ans pour avoir des enfants. Après l'homme et la femme veulent être des grand-parents. Mais au-delà de ces âges avancés (80-105 ans), il n'y a pas de justificatif biologique pour continuer à vivre. »


L'environnement qui se dégrade rend l'immortalité inaccessible
L'autre explication avancée par cette équipe est l'environnement qui se dégrade. Par exemple, la sédentarité qui frappe de nombreux hommes entraîne l'obésité. Celle-ci est l'un des facteurs responsables du recul de l'espérance de vie aux Etats-Unis.
Autres exemples énoncés par ces chercheurs : l'augmentation des cas des maladies infectieuses (sida en Afrique), et la diminuations des ressources naturelles. Tout ces facteurs réunis rendent plus difficiles l'augmentation de l'espérance de vie.
Alors, pour que nos gènes puissent s'adapter à ces changements, « il faudra du temps reconnaît », Juliana Antero-Jacquemin. « Dans l'attente, la longévité humaine plafonne », conclut-elle.

Ecoutez Juliana Antero-Jacquemin : « Le réchauffement climatique et la pollution ont aussi pour conséquence de réduire l'espérance de vie. »