- Le gouvernement envisage de réformer le dispositif ALD en limitant les remboursements aux soins strictement liés à la pathologie.
- La Cnam propose de suspendre l’ALD pour les patients en rémission et de revoir la liste des soins pris en charge.
- Ces mesures suscitent l’inquiétude des patients et des associations face à un risque de recul des droits.
Le dispositif des affections de longue durée (ALD), qui permet aujourd’hui une prise en charge à 100 % des soins liés à certaines pathologies graves, est-il en passe d’être réformé ? C’est ce qu’a laissé entendre Yannick Neuder, ministre chargé de la Santé et de l’Accès aux soins, lors de son passage sur LCP fin juin. Selon lui, "réévaluer" la définition et les remboursements liés à l’ALD "ne serait pas un gros mot". Une déclaration qui n’a pas manqué de faire réagir les patients.
L’ALD suspendue pour ceux "en situation de guérison ou de rémission"
Maladies cardiovasculaires, cancers, diabète, démence, sclérose en plaques... En 2022, 13,8 millions de Français bénéficiaient du statut ALD, un dispositif qui représente deux tiers des dépenses annuelles de la Caisse nationale de l’Assurance-maladie (Cnam). Ce ratio pourrait grimper à 75 % en 2035, selon l’organisme, dans un contexte de déficit toujours plus important. Le gouvernement souhaite donc cibler les soins remboursés : seuls ceux "en lien avec la pathologie initiale" devraient être pris en charge. L’objectif affiché : éviter les dérives, sans pour autant faire "des économies sur le dos de la santé des Français".
Dans un rapport remis au Parlement mardi 1er juin, qui détaille 60 propositions d’économies, la Cnam propose de suspendre l’ALD pour les patients "en situation de guérison ou de rémission" de certaines pathologies, mais également de créer un statut de "risque chronique" pour retarder l’entrée dans le dispositif. Elle envisage aussi de réduire le remboursement de "prestations ou produits de santé dont l’efficacité ne justifie pas ce remboursement intégral". Une "liste de soins spécifiques et opposables" par pathologie pourrait même être établie.
Les cures thermales, utilisées par exemple contre les effets secondaires des traitements anticancéreux, sont l’un des premiers soins dans le viseur : le gouvernement souhaite mettre fin à la prise en charge à 100 % des cures sans lien "direct" avec les ALD.
Les patients s’inquiètent d’un recul des droits
Ces annonces suscitent de vives réactions de la part des patients et associations de patients. Yannick, 55 ans, en rémission d’un lymphome, témoigne à France Info : "Ce débat-là, je le vis avec un peu de colère, car on met sur le même plan la santé des gens et l'économie." Il rappelle que même avec une ALD, les patients assument déjà de nombreux frais : dépassements d’honoraires, soins non remboursés, franchises… Pour refaire une partie de sa dentition abîmée par la chimiothérapie, Yannick a ainsi dû débourser "plusieurs centaines d'euros".
Sans compter que, pour de nombreux patients, les séquelles persistent : douleurs, fatigue, troubles moteurs ou psychologiques, parfois pendant des années. Le centre de lutte contre le cancer Gustave-Roussy rapporte ainsi sur son site que 63,5% des personnes guéries souffrent de "lourdes séquelles" qui "dégradent durablement leur qualité de vie".
Avec cette réforme envisagée, les patients concernés redoutent aussi une perte de souplesse. "On parle de soins opposables, mais certaines pathologies comme le Covid long ne répondent pas à une approche uniforme", alerte Céline, dont la fille de 20 ans souffre encore de cette maladie, citée par France Info.