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Syndrome de soins post-intensifs

La moitié des patients passés par les soins intensifs souffrent de dépression ou d’anxiété

Par Charlotte Arce

Être soigné en unité de soins intensifs pour une pathologie ou une défaillance grave n’est pas sans conséquence sur la santé psychologique. Un ancien patient sur deux présente des symptômes d’anxiété, de syndrome de stress post-traumatique ou de dépression.

kckate16/iStock

Plusieurs mois après leur sortie de l’hôpital, des patients hospitalisés dans l’unité de soins intensifs gardent de leur séjour des séquelles psychologiques. C’est ce que met en lumière une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’Université d’Oxford, en Angleterre, et publiée dans la revue Critical Care.

"Les survivants de maladies graves risquent de connaître des problèmes physiques, cognitifs et psychologiques importants après leur sortie de l'hôpital", explique le Dr Peter Watkinson, professeur agrégé de médecine de soins intensifs et principal auteur de l’étude. "L’affaiblissement ou l’aggravation de l’état de santé physique, cognitive ou mentale après un traitement dans une unité de soins intensifs (USI) est appelé syndrome de soins post-intensifs (PICS). On estime que les composants psychopathologiques de la PICS touchent jusqu'à un tiers des survivants d'un traitement en unité de soins intensifs."

1 ancien patient des soins intensifs sur 2 concerné

Les unités de soins intensifs (USI) sont des services hospitaliers spécialisés dans la prise en charge de patients inanimés et/ou en état critique, c’est-à-dire présentant une défaillance d’une fonction vitale ou qui risquent de développer une complication sévère. Les malades qui y sont admis sont surveillés 24 heures sur 24 par des équipes spécialisées afin de leur prodiguer les meilleurs soins et les maintenir en vie.

Cependant, cela n’empêche pas les patients d’y développer des troubles psychologiques parfois graves et handicapants. Sur la cohorte de 4 943 anciens patients des soins intensifs participant à l’étude ICON (Intensive Care Outcomes Network) dans l’un des 26 centres du Royaume-Uni entre 2006 et 2013, les chercheurs ont constaté que 46% d’entre eux signalaient des symptômes d’anxiété, 40% des symptômes de dépression et 22% des symptômes de stress post-traumatique. 18% des patients de l’étude signalaient quant à eux être touchés par ces trois troubles psychologiques.

"Les problèmes psychologiques après un traitement pour une maladie grave en USI sont très courants et souvent complexes lorsqu’ils se produisent", estime le Dr Peter Watkinson. "Lorsque les symptômes d'un trouble psychologique sont présents, il y a 65% de chances qu'ils reviennent avec les symptômes d'un autre désordre psychologique."

Un taux de mortalité plus élevé pour les patients développant une dépression

En outre, les auteurs de l’étude ont découvert que les patients présentant des symptômes de dépression avaient 47% plus de risques de décéder de n’importe quelle cause au cours des deux premières années suivant leur sortie de l’unité de soins intensifs que ceux qui n’avaient pas signalé ces symptômes.

La dépression est par ailleurs associée à des taux de mortalité plus élevés pour les maladies cardiaques, respiratoires, cérébrovasculaires, les accidents, le diabète et l’hypertension, notent les chercheurs. "Dans la population post-USI, l'association observée entre dépression et mortalité pourrait s'expliquer en partie par la gravité des maladies chroniques avant et après la sortie, facteurs pour lesquels nous n'avons pas ajusté cette étude", reconnaît le Dr Watkinson. "Cependant, à notre connaissance, aucune association entre la dépression et une augmentation du taux de mortalité après la sortie de l’USI n’a été démontrée auparavant. La dépression pourrait être un facteur non pris en compte auparavant dans la survie après la réanimation", ajoute-t-il.

"Nos résultats suggèrent que la dépression consécutive aux soins d’une maladie grave en réanimation peut être un marqueur du déclin de la santé et que les cliniciens devraient en tenir compte lors du suivi des anciens patients admis aux soins intensifs", conclut le spécialiste.