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Progrès médical

Mélanome au stade avancé : l'immunothérapie en premier améliore la chirurgie

Par le Dr Jean-Paul Marre

Dans les mélanomes à haut risque de métastases, une association d’immunothérapies administrée avant la chirurgie est nettement plus efficace. Les protocoles thérapeutiques seront sans doute amenés à changer.

damiangretka/istock

Aux stades avancés du mélanome, la chirurgie d’exérèse de la tumeur reste une option intéressante. Par contre, elle est souvent compliquée du fait de l’extension de la tumeur. Une chimiothérapie permet de réduire le volume tumoral pour faciliter la chirurgie : on appelle cela la chimiothérapie néoadjuvante. Dans le mélanome à un stade avancé, du fait du risque élevé de métastases et de la grande efficacité des immunothérapies, il était intéressant d’essayer une immunothérapie néoadjuvante.

L’administration d’une association de 2 immunothérapies (anti-PD1 et anti-CTLA-4) avant la chirurgie donne un taux de réponse élevé chez les malades souffrant d’un mélanome de stade 3 à haut risque (3b, 3c) : près de la moitié des malades n’ont plus aucun signe de cancer au moment de la chirurgie, mais une incidence élevée d’effets secondaires a entraîné l’arrêt précoce de l’essai. Ces résultats sont publiés dans la revue Nature Medicine.

Une étude pilote innovante

L'étude de phase II a été menée par des chercheurs du MD Anderson Cancer Center, au Texas. Les malades ont reçu soit le nivolumab, un inhibiteur du PD-1 qui démasque les cellules cancéreuses vis-à-vis du système immunitaire, soit une association de nivolumab avec de l'ipilimumab, un inhibiteur du CTLA-4 qui stimule les cellules immunitaires T.

Chaque médicament ciblant un système de modulation immunitaire distinct sur les lymphocytes T, ils ont un effet additif, voire synergique, sur le système immunitaire pour stimuler la réponse lymphocytaire T vis-à-vis des cellules cancéreuses. Tous les patients ont reçu ensuite du nivolumab après la chirurgie.

Des résultats surprenants malgré le petit effectif de l’étude

Dans le groupe qui a reçu l’association, 8 patients sur 11 (73%) ont vu leur tumeur se réduire fortement et 5 (45%) n’avaient plus aucun signe de mélanome au moment de l'opération (réponse complète pathologique). Par contre, 73% des malades ont souffert d’effets indésirables de grade 3, entraînant un retard d'administration de la dose chez 64% d’entre eux et un retard de la chirurgie pour certains (pas d’effet secondaire de grade 4).

Dans le groupe qui n’a reçu que le nivolumab seul, 3 tumeurs sur 12 (25%) ont eu une diminution de volume de la tumeur ou une réponse pathologique complète. Par contre, seuls 8% des malades ont eu des effets indésirables de grade 3. Le problème est que 2 malades ont progressé vers un stade métastatique (stade 4) de la maladie avant de pouvoir se faire opérer.
Tous ceux qui ont obtenu une réponse complète pathologique dans l'un ou l'autre groupe demeurent indemnes de récidive de la maladie au terme de l’étude. La survie globale est de 100% à 24 mois dans le groupe association et de 75% dans le groupe nivolumab seul.

Identifier des biomarqueurs de réponse et de résistance

Dans cette étude, les chercheurs ont analysé des biopsies et des échantillons de sang prélevés à plusieurs moments au cours de l'essai. Ils ont ainsi confirmé les biomarqueurs connus de la réponse au traitement et observé de nouveaux biomarqueurs de la réponse thérapeutique. Les biopsies précoces au cours du traitement permettraient également d’identifier quels malades répondront à l’immunothérapie. L'infiltration initiale du tissu tumoral par les cellules lymphoïdes et l’importance des mutations dans les cellules du cancer (la charge mutationnelle totale) sont associées à la réponse à l’immunothérapie néoadjuvante.

En raison des résultats de cette étude, les chercheurs du MD Anderson Cancer Center ont repensé leur étude afin d’évaluer une autre association (nivolumab associé à relatlimab, un inhibiteur du point de contrôle immunitaire LAG3), une combinaison qui, selon eux, pourrait être plus efficace avec un meilleur profil d'effets secondaires. D’autre part, ils inscrivent désormais leur démarche dans un consortium international afin d’accélérer la recherche sur le mélanome de haut grade.

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