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Au bout du rouleau

Une Américaine décrit son burn-out maternel sur Facebook et obtient le soutien de nombreuses internautes

Par Raphaëlle de Tappie

Fin juin, une jeune mère de famille américaine a décrit son burn-out maternel dans un post Facebook émouvant accompagné d'une photo montrant la vaisselle s'accumuler dans sa cuisine. Sa publication a été largement relayée sur la toile, de nombreuses internautes se sont identifiées à son témoignage. 

Capture d'écran/Facebook@Brittany Ernsperger

"Voilà à quoi ressemble la dépression". Sur Facebook, Brittany Ernsperger, une jeune mère de famille américaine de 25 ans, a décrit avec beaucoup de transparence son burn-out maternel. Et il semblerait que son message ait trouvé un écho chez de nombreuses personnes puisque deux semaines après sa publication le 30 juin, il avait été partagé par 207 000 internautes et commenté plus de 800 fois.

Dans son message, la jeune femme décrit son mal-être avec détails. "Il y a trois jours, j’étais assise sur le sol de la cuisine et je regardais la pile de vaisselle en pleurant. Je savais que je devais la faire. Je voulais vraiment la faire. Mais la dépression m’a tirée vers le bas. Elle m’a aspirée. Comme un trou noir", commence-t-elle. "Sans valeur. Nulle. Incompétente. Stupide. Paresseuse. Voilà ce qui traverse l’esprit de quelqu’un souffrant de dépression. Toute la journée", poursuit-elle, décrivant le sentiment de culpabilité que la procrastination déclenchait en elle.

"Avoir peur que votre mari vous quitte parce qu’il pense que vous êtes paresseuse. Avoir peur de laisser entrer des gens chez vous parce qu’ils vont penser que vous êtes sale. Penser que vous avez laissé tomber vos enfants parce que c’est la troisième nuit de suite que vous n’avez pas d’assiette où mettre le repas donc on commande des pizzas. Encore", écrit Brittany, expliquant que tout le reste, "la lessive, le ménage, s’habiller, prendre une douche, habiller les enfants, leur laver les dents, toutes les petites taches du quotidien, deviennent un cauchemar".  Et de conclure : "la dépression est quelque chose dont les gens 'forts' ne parlent pas parce qu’ils ne veulent pas qu’on pense qu’ils sont 'faibles'. Vous n’êtes pas faible. Vous avez été fort pendant tellement longtemps et avez subi tellement de choses que votre corps a besoin d’une pause (…). Je m'en fiche que la seule chose que vous ayez faite aujourd'hui, c'est de mettre du déodorant. Je suis fière de vous pour ça. Bien joué. Je suis de votre côté".

La dépression toucherait aujourd’hui 300 000 millions de personnes dans le monde

Si en publiant ce post, la jeune femme assurait ne pas "rechercher de sympathie" de la part des internautes, elle a dû être la première surprise par l’ampleur des réponses. En effet, son témoignage a été commenté par des centaines de femmes la remerciant d’avoir brisé l’omerta autour de la dépression et plus spécifiquement du burn-out maternel.

"Je connais ce sentiment. J’ai de la vaisselle dans mon évier là, je la laisse généralement pendant plusieurs jours, je lave la moitié et je laisse le reste. J’ai combattu la dépression pendant une grande partie de ma vie… maintenant j’ai des problèmes de thyroïde en plus. J’ai pris 68 kgs depuis mes 20 ans et j’ai l’impression que je ne peux me motiver à faire plus. Mais je travaille sur ma spiritualité et j’ai déjà beaucoup progressé depuis mon divorce il y a cinq ans", commente une internaute. "Cette photo et cette histoire sont incroyables mais malheureusement rien ne peut vraiment faire comprendre la dépression à part l’avoir expérimentée soi-même et je ne le souhaite pas à qui que ce soit", écrit une autre.

En 2015, la dépression touchait plus de 300 millions de personnes dans le monde, soit 18% de plus que dix ans auparavant, selon l’Organisation Mondiale de la Santé. Mais si, de par son augmentation, la maladie est bien moins taboue qu’avant, le burn-out maternel, lui, est un sujet dont on parle encore trop peu. D’autant plus que les premiers symptômes (fatigue intense et sensation d’être toujours débordée) sont le plus souvent ignorés par la mère elle-même. Puis, au fil des jours, des mois, le stress l’envahit de plus en plus, elle se sent littéralement vidée et commence à éprouver moins d’émotions positives pour son enfant et à se détacher de lui.

"La working girl n’est plus le modèle ambiant. Les espérances féminines au niveau de l’emploi reculent (les femmes n’ont toujours ni les responsabilités, ni les salaires des hommes), et c’est pourquoi l’idée que la maternité est le seul domaine dans lequel les femmes peuvent s'accomplir pleinement, sans la moindre qualification, est revenue", expliquait la psychologue Maryse Vaillant l’année dernière au site Psychologies.com. Aussi, pour pouvoir aller de l’avant, la spécialiste recommande d’accepter de faire le deuil de la mère idéale. "Bien sûr, il y aura encore des moments exceptionnels à vivre, mais ils ne feront pas revenir l’émerveillement, le rêve d’une maternité idéale. Cette épreuve de réalité, toute femme en fait l’expérience lorsqu’elle devient mère, et doit faire avec pour toute la vie", concluait-elle, appelant l’entourage des jeunes mamans à les soutenir le plus possible.

Aujourd’hui, même si Brittany Ernsperger ne donne pas de détails sur son mari et ses proches dans sa publication, il semblerait que le soutien des internautes l’ait revigorée un minimum. "Je ne m’attendais pas à autant d’amour. Les filles, si vous vous sentez comme ça, demandez-moi en amie sur Facebook. Je ferai de mon mieux pour vous aider ou pour que vous vous fassiez aider", a écrit la jeune femme sur le réseau social après avoir vu l’engouement provoqué par son post. Et de conclure par un message d’espoir : "Nous nous en sortirons ensemble. Nous pouvons seulement nous aider les unes les autres en nous tirant vers le haut. Je suis là pour vous".