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Epanchement uvéal

Attention, les immunothérapies du cancer peuvent provoquer des inflammations de l’œil

Par Charlotte Arce

Très efficaces dans la lutte contre certains cancers comme ceux de la vessie ou du poumon, les immunothérapies peuvent cependant déclencher une réponse immunitaire contre des organes sains, notamment l’œil.

SanneBerg/iStock

Chez beaucoup de patients atteints d’un cancer, l’immunothérapie offre une chance remarquable de survie, voire de guérison. Ces traitements, censés stimuler le système immunitaire, sont particulièrement efficaces chez les patients atteints de mélanome avancé, de cancer de la vessie, des reins ou encore des poumons, tous difficiles à traiter.

Parfois, ces traitements peuvent aussi amener le système immunitaire à se retourner contre l’organisme et attaquer des organes sains, dont l’œil. C’est ce que mettent en lumière les travaux de chercheurs de l’Université du Michigan Kellog Eye Center, publiés dans la revue JAMA Ophtalmology. Se basant sur les cas de trois patients recevant des inhibiteurs de point de contrôle immunitaire, l’étude montre que tous ont développé des épanchements uvéaux et une inflammation de l'oeil, ou "uvéite", qui a affecté leur vision.

"Chez nos trois patients qui avaient reçu ces inhibiteurs du point de contrôle immunitaire, nous avons remarqué de grands épanchements uvéaux. En outre, deux d’entre eux ont développé une inflammation de la chambre antérieure de l’œil", expliquent les Pr Hakan Demirci, Richard N. et Marilyn K. Witham.

Une vision affectée

Dans le cadre de leur traitement, les trois patients avaient reçu deux types d’inhibiteurs : les inhibiteurs de l'immunité anti-PD-1 et anti-PD-L1 (l'atezolizumab, le nivolumab ou le pembrolizumab), qui agissent sur l'interaction entre les récepteurs PD-1 des lymphocytes T et leurs protéines homologues, les PD-L1. Le blocage permet aux cellules T du système immunitaire de faire leur travail : reconnaître, attaquer et tuer les cellules tumorales cancéreuses.

Selon les chercheurs, l’épanchement uvéal s’est déclaré rapidement, entre un et trois mois après que les patients ont reçu au moins deux perfusions d’inhibiteurs du point de contrôle immunitaire. Le problème, c’est qu’il n’existe pour le moment aucun traitement pour limiter cet effet secondaire du traitement, qui ne peut être interrompu car les patients "ont un cancer répandu et potentiellement mortel", explique le Pr Demirci.

Chez deux des trois patients, les épanchements uvéaux se sont amélioré entre six semaines à trois mois après l'arrêt du médicament, et l'œil affecté a guéri. En revanche, le troisième patient avec un épanchement uvéal a continué l'immunothérapie pour son mélanome, mais est mort quatre mois plus tard.

Une réponse immunitaire dans les tissus oculaires

Comment expliquer que le traitement d’immunothérapie ait "attaqué" les yeux sains des patients ?

Plus que d'autres organes dans le corps, l'œil est connu comme étant un site immunoprivilégié. Cela signifie qu’ils sont capables de tolérer l'introduction d'antigènes sans provoquer une réponse immunitaire inflammatoire. Ainsi, les greffes de cornée sont très efficaces car les antigènes des tissus greffés produisent rarement une inflammation de l’œil. Toutefois, notent les chercheurs, des niveaux élevés de PD-L1 dans les tissus oculaires peuvent impacter le privilège immunitaire de l'œil.

"Le système immunitaire est difficile, il peut aider à combattre les cellules cancéreuses, mais il peut aussi commencer à combattre le corps lui-même et provoquer des effets secondaires tels que les épanchements uvéaux chez ces patients", explique le Pr Merina Thomas, chirurgienne vitréo-rétinienne à Kellog.

Pour les chercheurs, il est primordial que les oncologues renvoient leurs patients à un ophtalmologiste s’ils présentent des problèmes oculaires. Il est aussi important que les ophtalmologistes recevant des patients atteints d’uvéite ou d’épanchement uvéal n’oublient pas de leur demander s’ils suivent un éventuel traitement.

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