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Alimentation des nourrissons

La mise en garde des pédiatres contre les laits végétaux

Par Mathias Germain

En cas  d'allergie alimentaire, les parents peuvent être tentés d'utiliser des jus à base de protéines végétales pour leur bébé. Cette alimentation peut conduire à de graves carences.

JAUBERT/SIPA

Stop aux jus à base de protéines végétales pour les nourrissons ! Un mois après l'Agence nationale de sécurité alimentaire (Anses), la Société française de pédiatrie (SFP) enfonce le clou contre ces produits parfois utilisés chez les enfants en cas d’allergie aux protéines de lait. « Cela fait depuis plusieurs années que nous prévenons des dangers de l’utilisation de ces substituts à base de protéines végétales chez le nourrisson, a rappelé le Pr Patrick Tounian, secrétaire général de la SFP et chef de service de nutrition pédiatrique de l’hôpital Armand Trousseau à Paris. Il s’agit de produits dont la composition n’est pas du tout conforme à la réglementation européenne, ce ne sont que des jus de riz, d’amandes, de soja  ».

Leur consommation chez les jeunes enfants peut conduire à des carences graves en fer, en vitamines et en protéines. « Nous avons fait un travail à l’hôpital Trousseau où nous avons colligé neuf cas sévères de carences, explique le nutritionniste. Avec des enfants qui nécessitent des transfusions, des hospitalisations dont une en réanimation ».
D’autres études confirment ces problèmes et certaines rapportent deux cas de décès. Plus l’insuffisance d’apport est précoce et prolongée, plus les répercussions seront sévères. Donc pour le Pr Patrick Tounian, il ne s’agit pas d’un problème à prendre à la légère.

Et le secrétaire général de la SFP insiste sur toutes les carences invisibles qui peuvent survenir. Entre 0 et 1 an, le poids du bébé est multiplié par 3, son cerveau passe de 300 grammes à 1 kg et sa taille augmente de 50 %. Cette période de croissance est donc fondamentale. « Une situation de déficit nutritionnel entraîne des effets biologiques non visibles qui se manifesteront à moyen et à long terme par des troubles du développement », rappelle-t-il.

Ecouter le Pr Patrick Tounian, chef de service nutrition pédiatrique (Hôpital Trousseau, APHP). « Il s’agit d’une véritable maltraitance nutritionnelle »


Pour la SFP, comme pour l’Anses, ces produits ne doivent pas être utilisés, que cela soit à titre exclusif ou même partiel, chez l’enfant de moins de un an. Les spécialistes rappellent également que le lait maternel est l’aliment de référence adapté aux besoins du nourrisson, et qu’hors allaitement, seules les préparations pour nourrissons et préparations de suite (à base de protéines animales ou végétales) peuvent couvrir les besoins de l’enfant de moins de 1 an.

Comment faire la différence avec ces « jus » à base de protéines végétales pour les jeunes enfants en vente dans le commerce ? Tout est sur l’étiquette où on peut lire « préparation destinée aux nourrissons ». Cela signifie que la composition est conforme à la réglementation européenne et surtout que l’enfant n’a pas de risque de carences. Mais attention, il ne faut pas se laisser abuser par d’autres mentions ou d’autres petits logos comme un nounours ou un enfant…


Ecouter le Pr Patrick Tounian. « On aimerait une loi qui oblige les fabricants de ces jus à mentionner sur l’étiquetage qu’il s’agit de produits interdits pour les jeunes nourrissons. »
 


Dernier point, concernant la prévention des risques d’allergies alimentaires, la communauté des pédiatres est en train d’évoluer : « La tendance actuelle est de penser qu’une introduction plus précoce des allergènes, comme l’œuf, le poisson, les fruits à coque, les fruits exotiques, serait plutôt protecteur alors qu’on pensait le contraire il y a quelques années, confie le Pr Tounian. Donc on diversifie plus tôt, entre quatre et six mois, même les enfants qui ont des antécédents d’allergies dans la famille ».