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Lettre ouverte

Vaccination anti-HPV : les gynécologues dénoncent le retard français

Par Anne-Laure Lebrun

Dans une lettre ouverte adressée, 2 sociétés savantes appellent les candidats à la présidentielle à se mobiliser pour améliorer la vaccination anti-HPV.

imagepointfr/epictura

La France se classe aux derniers rangs des pays européens en matière de vaccination contre les papillomavirus (HPV), responsable du cancer du col de l’utérus. Dans une lettre ouverte aux candidats à la présidentielles 2017 (1), le Pr Philippe Descamps, président de la commission relations internationales du dénonce l’échec de la politique vaccinale et n’hésite pas à parler de « drame français ».

Chaque année dans le pays, plus de 3 000 femmes sont atteintes de ce cancer, et plus de 1 000 d’entre elles en meurent. Or, ce cancer peut être prévenu grâce au vaccin anti-HPV conférant une protection de 80 % contre les virus HPV 18 et 16. « Excellente nouvelle pour l’humanité puisque la très grande majorité des adultes ayant des rapports sexuels rencontrera un jour l’un de ces virus qui ne sont pas des "marqueurs de mauvaise vie" comme certains l’affirment, mais simplement les témoins d’une activité sexuelle », rappelle le chef du pôle femme-mère-enfant au CHU d'Angers.

Autorisé en 2007 en France, ce vaccin a rapidement été dénigré par des « pseudo-spécialistes incompétents ». Cinq ans après sa mise sur le marché, une cinquantaine de femmes ont porté plainte et accusé le Gardasil de provoquer des maladies auto-immunes. Des plaintes classées sans suite au vu du « suivi extrêmement rigoureux réalisé pendant plus de 10 ans dans 130 pays et concernant plus de 200 millions de doses de vaccins administrés », relève le médecin. Celui-ci l’assure : « l’apparition d’une sclérose en plaque, d’une thyroïdite ou de tout autre maladie, un jour, un mois ou un an après une vaccination anti-HPV, constitue une "coïncidence temporelle" indépendante de la vaccination ». 

 

Un engagement politique indispensable

Mais trop tard, le mal est fait. Les parents inquiets se sont détournés de la vaccination. Alors que dans des pays comme l’Australie, le Royaume Uni, le Portugal ou l’Espagne - qui proposent la vaccination en milieu scolaire -  la couverture vaccinale dépasse 80 %, à peine 20 % des jeunes Françaises de 15 ans sont vaccinées.

Une situation « cruelle et injuste », s’emporte le gynécologue dans son courrier de 3 pages. Cruelle car des milliers de jeunes filles sont à risque de développer une maladie qui peut être éradiquée, et injuste parce que les premières victimes seront les femmes de milieux défavorisés accèdent le moins facilement au dépistage.

Sans compter tous les cas de cancer de la vulve, du vagin, de l’anus ou de la sphère ORL pour lesquels il n’existe pas de dépistage organisé. Et le risque de cancer ne concerne pas seulement les femmes. Porteurs du virus, les hommes sont aussi à risque de développer un cancer du pénis ou de l’anus. « C’est pourquoi certains pays comme l’Australie, les Etats-Unis, l’Autriche ou l’Italie proposent des programmes de vaccination […] aux jeunes garçons dans le but de limiter la circulation du virus », souligne le spécialiste, ajoutant que « désexualiser la vaccination anti-HPV limiterait probablement l’actuelle réticence des parents à vacciner leur enfant ».

Face à ce « bilan catastrophique », le Pr Philippe Descamps appelle les candidats à la Présidence de la République à se mobiliser. « Les pouvoirs publics et les élus doivent assumer leurs responsabilité et engager au plus vite une relance de la vaccination, afin que les parents en comprennent enfin les bénéfices pour la santé de leurs enfants », lance-t-il, glissant au passage que « ce qui a été réalisé dans de nombreux pays industrialisés devrait pouvoir l’être en France ».


(1) Cette lettre est soutenu par le Collège national des gynécologues et obstétriciens française (CNGOF), et la Société française de colposcopie et pathologie cervico-vaginale (SFCPCV)