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Chez les personnes à haut risque

VIH : le Truvada en prévention réduit le risque d’infection de 86 %

Par Audrey Vaugrente

L'efficacité des antirétroviraux en prévention d'une infection par le VIH est cette fois confirmée et publiée. La PrEP  à la demande réduit de 86 % les risques de transmission.

PAUL SAKUMA/AP/SIPA

Essai transformé pour la prophylaxie pré-exposition (PrEP) ! L’Agence nationale de recherche sur le Sida (ANRS) publie les résultats de l’essai clinique Ipergay dans le prestigieux New England Journal of Medicine. Ces travaux évaluent l’intérêt de la prise préventive de l’antirétroviral Truvada (Gilead) chez des hommes à haut risque d’infection par le VIH. La prise « à la demande », expérimentée en France et au Canada, fournit le plus haut niveau de protection jamais observé.

400 hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) ont pris part à ces recherches. La moitié a pris du Truvada, l’autre un placebo, selon un schéma dit « à la demande ». Avant un rapport sexuel à risque, les volontaires ont pris deux comprimés. Ils ont réitéré la prise 24 heures et 48 heures après le rapport. Au cours du suivi, d’une durée médiane de 9,3 mois, 16 cas d’infections ont été répertoriés. Cela correspond à une réduction du risque relatif de 86 %.

Pas plus de prise de risque

« Nous sommes parvenus à un niveau de protection qui n’a jamais été aussi élevée, avec une prise beaucoup moins contraignante et moins d’effets secondaires que la PrEP en continu », se félicite le Pr Jean-Michel Molina, signataire de ces travaux contacté par Pourquoidocteur. En effet, le Truvada en prévention est déjà autorisé aux Etats-Unis, mais l’AMM (autorisation de mise sur le marché) ne couvre qu’un comprimé quotidien.

La PrEP « à la demande » présente donc l’avantage d’être allégée, ce qui améliore l’observance des patients. La détection du médicament est supérieure à 80 % chez les participants. « C’est à la fois lié au schéma de prise, mais aussi à l’accompagnement qui est proposé par les médecins et le milieu associatif avec qui nous avons travaillé, souligne Jean-Michel Molina. Impliquer le patient en tant qu’acteur de la recherche a été un élément majeur. » La publication vient aussi contredire les détracteurs de la PrEP : le recours à cette méthode préventive n’a pas d’impact sur la part d’hommes qui ont des comportements sexuels à risque.

Recommandée officiellement

Les résultats convainquent et ils s’accompagnent d’assez peu d’effets secondaires. Les hommes sous traitement antirétroviral ont connu légèrement peu plus de troubles gastro-intestinaux (14 %) et rénaux (18 %) que ceux sous placebo. L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), qui disposait déjà de ces résultats, a saisi l’occasion au vol. Elle a annoncé ce 1er décembre l’établissement de la recommandation temporaire d’utilisation (RTU) du Truvada en PrEP. La mesure sera effective début 2016.

« Il faut maintenant voir si on peut vraiment parvenir à réduire le risque de contamination, estime le Pr Molina. Pour cela, il faut que les gens intéressés viennent chercher ce mode de prévention. C’est pour cela que l’on propose une consultation : ce traitement nécessite un suivi, mais aussi un dépistage régulier. »

La France n’est pas la seule à être convaincue de l’intérêt de cette approche. « Ces études montrent de manière définitive (…) que la PrEP peut être instaurée d’une manière à la fois acceptable pour les patients, et sûre et efficace pour empêcher la transmission du VIH », écrivent Anthony Fauci et Hilary Marston, de l’Institut Américain des Allergies et des Maladies infectieuses (NIAID) dans une mise en perspective.

La mesure préventive de référence reste toutefois le port du préservatif. La PrEP restera bien une mesure complémentaire, réservée aux populations les plus exposées.