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Retarder le déclin cognitif

Seniors : soulever des poids pour protéger son cerveau

Par Anne-Laure Lebrun

L'activité physique, en particulier la musculation, protégerait le cerveau et ralentirait l'apparition de lésions dans la substance blanche.

SUPERSTOCK/SUPERSTOCK/SIPA

Un esprit sain, dans un corps sain. Ce précepte rendu célèbre par Rabelais dans Gargantua se renforce au fil des publications scientifiques. D’innombrables travaux ont en effet montré les bienfaits de l’activité physique sur les performances cognitives des seniors. Pour une grande part, ces études se sont intéressées aux bénéfices de la course à pied ou la marche sur la santé cérébrale.

Une équipe de chercheurs canadiens s’est alors demandée quel sport était le plus bénéfique pour conserver ses fonctions cognitives intactes. Et elle s’est rendue compte que peu de recherches avaient exploré les bénéfices de la musculation. L’équipe de l’université de Colombie-Britannique (Vancouver) a alors décidé de prendre à bras le corps ce sujet délaissé par la science, et publie ses résultats dans le Journal of the American Geriatrics Society.

Plus particulièrement, les scientifiques ont étudié l’impact d'une pratique régulière de la musculation sur la substance blanche. Celle-ci est le siège de la commande de mouvements volontaires et des fonctions supérieures (mémoire, conscience…). Sous l’effet du vieillissement, des lésions apparaissent, provoquant parfois un déclin cognitif.

Ralentit l’apparition de lésions

Pour les besoins de leurs travaux, les chercheurs ont suivi pendant un an près de 155 femmes âgées de 65 à 75 ans. Réparties en 3 groupes aléatoires, les participante ont soit réalisé une séance par semaine, soit deux par semaine. Le dernier groupe ne pratiquait pas cette activité mais se soumis à des exercices d’étirements et d’équilibre.

Au terme de l’étude, les scanners cérébraux révèlent que les femme du groupe témoin et celles ayant soulevé des poids une fois par semaine présentent une importante progression des lésions dans la substance blanche, en comparaison des volontaires du 3e groupe. Ainsi, pratiquer la musculation deux fois par semaine ralentirait l’apparition des lésions, et des troubles cognitifs qu’elles induisent.

Néanmoins, ces travaux canadiens n’expliquent pas comment l’activité physique agit sur le vieillissement cérébral et protège la substance blanche. Pour cela, il faut étudier le cerveau par neuro-imagerie. Ce domaine de recherche permet de visualiser l’activité de différentes parties du cerveau. Pour autant, jusqu’à maintenant, aucune étude n’a mis en évidence un lien direct entre l’activation cérébrale et les performances mentales et physique.

Tout est dans la tête

C’est dorénavant chose faite. Une équipe japonaise de l’université de Tsukuba montre pour la première fois, dans le journal Neuroimage, le lien direct entre l’activité cérébral, les fonctions cognitives et une bonne condition physique chez un groupe d’hommes âgés de 64 à 75 ans.

En vieillissant, nous n’utilisons pas les mêmes zones de notre cerveau. Par exemple, durant nos jeunes années, nous utilisons principalement la partie gauche de notre cortex préfrontal, engagé dans les processus d’apprentissage, de mémoire ou le langage. Nous exploitons cette zone pour comprendre la signification des mots, reconnaître des situations ou des personnes déjà rencontrées. Puis en vieillissant, nous avons tendance à privilégier la partie droite du cortex préfrontal pour réaliser ces tâches. Toutefois, pour accomplir des tâches complexes, les personnes âgées utilisent les deux parties.

Comme l’expliquent les chercheurs, ce phénomène de réorganisation est fait pour compenser les capacités cérébrales altérée en raison du déclin cognitif. Or, ils ont découvert que les hommes qui pratiquent régulièrement une activité physique réussissent mieux aux tests cognitifs que les hommes inactifs car ils utilisent principalement la partie gauche de leur cortex préfrontal.

Pour le Pr Hideaki Soya, responsable des travaux, « une des explications possibles suggérée par cette étude est que le volume et l’intégrité de la substance blanche dans la partie du cerveau qui relie le cortex préfrontal droit et gauche sont altérés. Il semblerait que les hommes en bonne condition physique sont capables d’entretenir leur substance blanche par rapport aux hommes âgés en moins bonne forme. Mais des travaux supplémentaires sont nécessaires pour confirmer cette théorie. »