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Trouble du comportement alimentaire

Anorexie : les hommes en sont aussi victimes

Par Léa Drouelle

L'anorexie masculine représente 10 % des patients atteints de cette pathologie principalement féminine. Des chercheurs canadiens ont mené une étude pour savoir si les causes sont les mêmes. 

Images Distribution/NEWSCOM/SIPA
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Lorsque l’on parle d’anorexie, on pense immédiatement aux jeunes filles. Pourtant, cette pathologie n’épargne pas les jeunes garçons. Une récente étude montre que 1 homme sur 10 est touché par la maladie.

 

Peur de grossir chez les deux sexes
Une doctorante en psychologie de l’université de Montréal a réuni 24 études menées sur 15 ans et recensant 279 jeunes hommes âgés de 11 à 36 ans. Leur point commun ? Ils ont tous séjourné à l’hôpital pour soigner une anorexie mentale (AM) Selon l’auteur principale de l’étude, Laurence Corbeil-Serre, la cause principale de leur anorexie est la même que chez les jeunes filles : la peur de grossir. En revanche, l’étude souligne des distinctions d’un sexe à l’autre dans la manière d’appréhender la maladie.  

Abus de substances psychoactives
Les garçons semblent, par exemple, plus soucieux de perdre du poids pour prendre du muscle, plutôt que pour conserver une silhouette svelte. De nombreuses études, dont une américaine réalisée en novembre 2013 , ont déjà fait part de ce phénomène. Une tendance qui peut parfois pousser ces jeunes garçons à l’abus de substances psychoactives. En effet, la consommation de compléments alimentaires ou d' hormone de croissance peut conduire à un abus d’alcool et de drogues, selon l’étude américaine.

Par ailleurs, le Dr Thierry Vincent, psychiatre à Grenoble et spécialiste de l'anorexie, cite la pression générée par le sport de compétition comme l’un des facteurs déclencheurs de l’anorexie : « J’ai souvent eu des patients, ainsi que des patientes, qui pratiquaient des sports de compétition. Dans ce cas de figure, la perte de poids est un facteur de réussite très important. La satisfaction ressentie lorsqu’ils maigrissent finit par les faire tomber dans l’anorexie », explique t-il. 

Identité et orientation sexuelle
L’étude souligne également que les homosexuels comptent plus d’anorexiques que la population générale. «Nous supposons que l’importance de l’apparence physique dans la population gay exacerbe le trouble une fois qu’il est apparu, ce qui entraîne une sur-représentation des patients homosexuels dans les unités de traitement. L’anorexie peut aussi être un nouveau moyen de repousser les problèmes de sexualité chez les individus à l’orientation sexuelle conflictuelle », analyse Laurence Corbeil-Serre.
Des propos à prendre avec précaution, selon le psychiatre Thierry Vincent, contacté par pourquoidocteur : « Les traits féminins d’un garçon ne signifient nullement que leurs choix de relations sexuelles sont orientés vers des relations homosexuelles. Il faut donc être prudent dans cette identification et l’assimilation entre l’anorexie et l’homosexualité.»

Ecoutez le Dr Thierry Vincent, psychiatre à Grenoble, spécialiste de l'anorexie : « On dit que les jeunes hommes anorexiques sont des homosexuels cachés mais je n’y crois pas … »

 



Selon Dominique Meilleur, qui a supervisé l’étude canadienne de Laurence Corbeil- Serre, « des recherches plus approfondies sur les jeunes hommes sont nécessaires afin de distinguer de manière plus précise les différences entre les causes de l’anorexie mentale chez les deux sexes. Mais pour le Dr Vincent, ces différences restent minimes. « Je ne crois pas qu’il y ait une véritable différence. Les garçons, comme les filles, sont en grande difficulté avec les personnes de leur âge. L’anorexie est un moyen de sauvetage moral. Un peu comme aller chercher sa montre qu’on a perdue dans le noir sous un réverbère. C’est-à-dire qu’ils vont chercher à résoudre un réel problème en choisissant une solution inadaptée. Pour moi, la seule différence réside dans le fait que les filles ont plus de facilité à exprimer verbalement leurs problèmes que les garçons.»