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Prise de position

Cannabis : l’Académie de médecine tire la sonnette d'alarme

Par la rédaction

Alors que plus d’1,3 million de Français sont des consommateurs réguliers de cannabis, l’Académie de Médecine martèle ses dangers pour la santé, notamment des plus jeunes.

Russel A. Daniels/AP/SIPA

« Beaucoup d’entre nous sont trop légers face au cannabis. Ce n’est pas une agréable substance récréative, c’est une véritable drogue avec des effets neurobiologiques et des risques sur le plan sanitaire ! » Le Pr Jean-Pierre Olié, psychiatre à l’hôpital Sainte-Anne à Paris, dirige la commission Psychiatrie de l’Académie de Médecine. Cette dernière a consacré cette semaine une séance aux dangers du cannabis et dénonce la banalisation de cette substance. « La lutte contre le cannabis doit être érigée au rang de grande cause nationale », réclament les Académiciens.

 

« Les parents et la société ne peuvent pas ainsi démissionner »

« Le cannabis expose notamment à un très grand risque d’émergence de pathologie schizophrénique chez le sujet entre 16 et 25 ans », alerte le psychiatre. Or, selon les derniers chiffres de l’Inserm et de la Mission d’information et de lutte contre les drogues et toxicomanies, le cannabis est le 1er produit psychoactif illicite consommé par les adolescents français. 7 % des élèves de terminale en sont des usagers réguliers.
« Une consommation régulière pour un cerveau encore en plein développement, cela veut dire des altérations cognitives définitives. Les parents et la société ne peuvent pas ainsi démissionner face à de tels dangers », insiste Jean-Pierre Olié. Les Académiciens réclament donc que des campagnes de prévention dédiées au cannabis soient élaborées, en direction des jeunes mais aussi de leurs parents et de leurs enseignants.

 

Ecoutez le Pr Jean-Pierre Olié, psychiatre à l’hôpital Sainte-Anne à Paris, membre de l’Académie de Médecine : « Certes, les adolescents ont des conduites de transgression mais il est de notre impératif devoir de médecins de dire les risques du cannabis »

 

Sanctionner le cannabis au volant

L’Académie enjoint aussi les médecins à interroger davantage leurs patients sur leur consommation de cannabis, comme ils le font pour l’alcool et le tabac et de tenter de les en dissuader, quel que soit leur âge. Elle appelle également à plus de fermeté contre les méfaits du cannabis au volant. « Alcool et cannabis sont les toxiques les plus responsables d’accidents de la circulation, bien plus que les médicaments. On sanctionne l’alcool au volant, pourquoi pas le cannabis ? », réclame Jean-Pierre Olié.

 

L’Académie de Médecine demande également aux établissements de santé d’être plus stricts. « L’hôpital et notamment l’hôpital psychiatrique n’échappent pas à la circulation quasiment libre du cannabis en France. Or il est particulièrement dangereux pour les personnes déjà atteintes de pathologies mentales », souligne le psychiatre.

 

Ecoutez le Pr Jean-Pierre Olié : « C’est extrêmement grave. Il serait opportun que l’accréditation des hôpitaux psychiatriques tienne compte des mesures mises en place par les établissements pour empêcher la circulation du cannabis. »  

 

Les addictologues prônent la dépénalisation de l’usage privé

Concernant le cannabis, le corps médical est unanime pour réfuter l’idée d’une drogue douce, compte-tenu de ces dangers avérés sur le plan respiratoire, cardio-vasculaires et psychiatriques. Mais si l’Académie de Médecine est farouchement opposée à tout assouplissement de la législation, tous les médecins ne sont pas de cet avis.
La Fédération française d’addictologie appelle par exemple depuis des années à sortir de l’impasse actuelle en dépénalisant l’usage privé du cannabis tout en maintenant son interdiction chez les jeunes. Mais pour ces spécialistes des addictions, revoir l’interdiction actuelle devrait absolument s’accompagner d’une véritable politique de santé publique contre le cannabis, inexistante pour le moment. Le Grenelle des addictions qu’ils réclament à Marisol Touraine depuis son arrivée au ministère de la Santé ne semble pas encore à l’ordre du jour.