- La France va lancer en 2025 son premier essai clinique de transplantation de microbiote fécal pour traiter le syndrome de l’intestin irritable (SII), qui touche 5 à 10 % de la population.
- L’étude prévoit de comparer l’effet de capsules de microbiote à un placebo chez 120 patients sévèrement atteints.
- Cette approche pourrait offrir une nouvelle option thérapeutique aux patients en échec de traitement.
C'est une avancée très attendue par les patients et les chercheurs : la France s'apprête à lancer son tout premier essai clinique de transplantation de microbiote fécal (TMF) chez les personnes souffrant du syndrome de l'intestin irritable (SII). Celui-ci est une affection chronique, fréquente mais méconnue, qui touche 5 à 10 % de la population.
Une piste prometteuse pour une maladie complexe
Autrefois appelée colopathie fonctionnelle, le SII peut se manifester par des douleurs abdominales récurrentes, des ballonnements, ainsi que des troubles du transit (diarrhée, constipation ou alternance des deux). Sans gravité mais handicapant au quotidien, ce trouble digestif chronique nuit sérieusement à la qualité de vie. Les femmes sont deux fois plus touchées que les hommes, selon les spécialistes, et le diagnostic survient le plus souvent entre 30 et 40 ans.
Les causes du SII restent floues, et plusieurs mécanismes sont suspectés : hypersensibilité intestinale, anomalie du transit, perturbation de la communication entre le cerveau et l'intestin... Parmi ces pistes, celle du microbiote intestinal suscite un intérêt croissant.
Prévue pour débuter avant la fin de l'année 2025, l'étude coordonnée par le Pr Jean-Marc Sabaté - de l’hôpital Avicenne à Bobigny, pionnier en la matière - inclura 120 patients répartis dans dix centres en France. "Trente-cinq d'entre eux sont déjà inscrits sur la liste d'attente, rien que pour le centre d'Avicenne", précise le gastroentérologue à Science et Avenir.
Vers une cartographie du microbiote des Français ?
Les volontaires, âgés de 18 à 75 ans et tous en échec d'au moins deux traitements, devront présenter une forme sévère du SII. Ils seront répartis en deux groupes : l'un recevra des capsules orales composées de selles congelées de donneurs (environ 50 gélules en deux prises), l'autre une TMF placebo. L'efficacité sera mesurée trois mois plus tard à l'aide de questionnaires portant sur la fréquence des douleurs et des ballonnements, la régularité du transit et l'impact sur la vie quotidienne. "Une baisse de 50 points sur l'échelle des scores de sévérité sera considérée comme positive", explique le Pr Sabaté.
Si les résultats sont concluants, cette stratégie pourrait ouvrir la voie à de nouveaux traitements, plus ciblés, pour les patients actuellement en impasse thérapeutique. En parallèle, un autre projet de recherche français, baptisé "French Gut", poursuit son travail de cartographie du microbiote des Français, avec un appel à donneurs toujours en cours. Une manière, peut-être, de faire progresser la médecine en... allant aux toilettes !