ACCUEIL > QUESTION D'ACTU > L'ADN de nos ancêtres nous en dit plus sur nos maladies actuelles

Gènes

L'ADN de nos ancêtres nous en dit plus sur nos maladies actuelles

Par Stanislas Deve

En comparant des gènes humains anciens avec de l’ADN moderne, des chercheurs ont dévoilé les secrets des origines de certaines maladies contemporaines, comme la sclérose en plaques.

digicomphoto / istock
MOTS-CLÉS :
En séquençant l’ADN humain ancien et le comparant à des échantillons modernes, une équipe internationale de chercheurs a pu cartographier l’évolution historique des gènes au fil des migrations de populations, et ainsi mettre en évidence l’origine de certaines maladies contemporaines.
Par exemple, les gènes qui augmentent considérablement le risque de développer une sclérose en plaques ont été introduits dans le nord-ouest de l'Europe il y a environ cinq millénaires par le peuple Yamnaya, des éleveurs de bétail qui avaient migré depuis la steppe pontique (aujourd’hui l’Europe de l’Est). A la base, ces gènes leur donnaient un avantage de survie en les protégeant contre les infections animales.
L’étude permettrait aussi de mieux comprendre comment les migrations ont pu affecter la prévalence de certaines autres maladies neurodégénératives, comme l’Alzheimer, qui touche davantage les Européens que le reste du monde.

D’où viennent nos maladies actuelles en Europe ? En séquençant l’ADN humain ancien et en le comparant à des échantillons modernes, une équipe internationale de chercheurs a pu cartographier l’évolution historique des gènes au fil des migrations de populations, et ainsi mettre en évidence l’origine de certaines pathologies contemporaines. Leurs travaux ont été révélés dans quatre articles publiés dans la revue Nature.

Les gènes anciens associés à la sclérose en plaques ont migré avec les populations

Pour ce faire, les 175 scientifiques issus de plusieurs universités européennes et américaines ont analysé les os et les dents de près de 5.000 humains ayant vécu en Europe occidentale et en Asie il y a 34.000 ans et jusqu’au Moyen-Age, et les ont comparés à l’ADN moderne de quelque 400.000 personnes issues de la UK Biobank. Cette banque de gènes humains anciens, la plus grande au monde, a permis d’expliquer notamment l’origine de certaines maladies neurodégénératives, à commencer par la sclérose en plaques (SEP).

En effet, l’équipe de recherche a découvert que les gènes qui augmentent considérablement le risque d'une personne de développer une SEP ont été introduits dans le nord-ouest de l'Europe il y a environ cinq millénaires par le peuple Yamnaya, des éleveurs de bétail qui avaient migré depuis la steppe pontique (aujourd’hui l’Europe de l’Est).

"Ces variantes génétiques associées à un risque de SEP ont ‘voyagé’ avec ce peuple vers l’Europe du Nord-Ouest. Celles-ci ont dû lui fournir un avantage de survie, probablement en le protégeant contre les infections de leurs moutons et de leurs bovins, mais elles ont augmenté par la même occasion le risque de développer la SEP", écrivent les auteurs de l’étude dans un communiqué.

Cela expliquerait, selon eux, le "gradient Nord-Sud observé dans la prévalence de la SEP", dont les cas sont deux fois plus nombreux dans le nord de l'Europe que dans le sud, ce qui est depuis longtemps un mystère pour la science.

Les gènes à risque de la maladie d’Alzheimer attribués aux chasseurs-cueilleurs

D’après l’équipe, ces travaux pourraient aussi permettre de mieux comprendre comment les migrations ont pu affecter la prévalence de certaines autres maladies neurodégénératives, comme l’Alzheimer, qui touche davantage les Européens que le reste du monde. "Les gènes connus pour augmenter le risque de maladies telles que l'Alzheimer et le diabète de type 2 ont été attribués aux chasseurs-cueilleurs", mais des recherches plus abouties sont nécessaires pour en dire davantage.

"Montrer comment les modes de vie de nos ancêtres ont eu un impact sur le risque de maladie moderne ne fait que souligner à quel point nous sommes les receveurs d'un système immunitaire ancien dans un monde moderne", concluent les chercheurs. Sur la même base de cette banque de gènes, ils prévoient maintenant d'étudier d'autres affections neurologiques, comme la maladie de Parkinson, et les troubles psychiatriques, telles que le TDAH, la schizophrénie ou encore la dépression.