ACCUEIL > QUESTION D'ACTU > Le lait maternel vendu sur Internet contaminé 3 fois sur 4

Bactéries et virus

Le lait maternel vendu sur Internet contaminé 3 fois sur 4

Par Audrey Vaugrente

Selon une récente étude, le lait maternel vendu sur Internet est beaucoup plus contaminé par des bactéries que le lait donné par les lactariums.

DELAGE JEAN-MICHEL/SIPA
MOTS-CLÉS :

Toutes les mamans ne produisent pas la même quantité de lait. Certaines en ont trop pour leurs bébés, d’autres pas assez. Ces femmes ne savent pas toujours comment échanger le surplus de lait. Avec Internet, les échanges sont facilités. Via des sites ou les réseaux sociaux, mamans en demande et mamans en surplus se contactent. Mais selon une étude publiée ce 21 octobre dans la revue Pediatrics, ces échantillons contiennent de hauts niveaux de bactérie.

 

Staphylocoques, salmonelle ou E. coli

L’étude s’est concentrée sur des bactéries qui ne sont pas néfastes tant que leur croissance est contrôlée. Or, chez les nourrissons inclus dans l'étude, la présence de ces bactéries a été associée à des maladies dues à du lait maternel contaminé. Leurs noms sont connus et font froid dans le dos : staphylocoques, streptocoques, salmonelle, E. coli. Deux types d’échantillons ont été analysés puis comparés : 100 échantillons de lait maternel acheté en ligne et 100 échantillons de lait non pasteurisé obtenu auprès d’une banque de lait bénévole.

 

Dans l’ensemble des échantillons achetés sur Internet, le taux de bactérie est plus élevé. Ils risquent aussi davantage de contenir des bactéries associées à certaines maladies. Dans 72% des cas, les échantillons « Internet » contiennent des bactéries causant des infections du sang, des méningites. Certains sont même contaminés avec des matières fécales. C’est deux fois moins dans les échantillons « banque de lait. »

 

La proportion est la même pour les tests au staphylocoque : 63% des échantillons « Internet » sont positifs contre un quart des échantillons « banque de lait. » Côté streptocoque, l’écart se creuse : 4% des échantillons bénévoles en contiennent contre presque un sur trois pour les échantillons achetés en ligne. Le lait obtenu en banque de lait ne comporte en revanche aucune trace de salmonelle ou de virus VIH. Côté lait acheté en ligne, 3% des échantillons révèlent la présence de salmonelle mais aucun de VIH.

 

Un problème de contrôle sanitaire

Il est tout à fait normal de trouver des bactéries dans le lait maternel humain, selon l’étude. Certaines sont même « très importantes et bonnes pour la santé des bébés ainsi que le développement de leur système immunitaire et digestif. » Le problème avec ces échantillons, réside dans le conditionnement des envois.

 

Les chercheurs suggèrent que l’hygiène au moment de la collecte du lait et de l’envoi des commandes est mauvaise. Contenants sales, pompes à lait non stérilisées, modes d’envoi qui ne protègent pas de la contamination… les coupables potentiels sont nombreux, à commencer par le respect de la chaîne du froid.

 

Pour conserver un produit tel que le lait dans des conditions optimales, une température fraîche est idéale car elle empêche la propagation des bactéries. Or, dans un cas sur cinq, les vendeurs n’intègrent pas de glaçons ou un autre moyen de refroidissement dans le colis. Autre défaut de ce mode d’échange : il n’existe aucun contrôle sanitaire ou de qualité. L’acheteur ne sait pas à qui il s’adresse ni quel type de lait il récupère.

 

Une méthode illégale en France

Aux Etats-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) a alerté les Américains sur le risque de nourrir les bébés avec du lait maternel acheté sur Internet. En France, ces échanges sont illégaux à plusieurs titres.

 

D’une part, seuls les lactariums sont habilités à recueillir, traiter et distribuer le lait humain. Les conditions d’hygiène y sont strictement contrôlées et le lait est pasteurisé avant distribution. Les particuliers ne sont pas autorisés à distribuer du lait maternel. Mais, les réseaux sociaux favorisent ce genre d'échange. L’Agence de sécurité du médicament (ANSM) a donc fait une mise en garde en avril 2011 sur les risques liés à l’échange de lait maternel de particulier à particulier.

 

D’autre part, le Code Civil interdit toute rémunération autour des produits issus du corps humain. Seul le don est accepté et doit rester encadrer par les autorités sanitaires. Le lait maternel, au même titre que d’autres fluides du corps, est inclus dans cette législation.

 

L’illégalité de la pratique n’empêche pas de nombreuses femmes de s’y prêter. En moyenne, le lait maternel se vend un peu moins de 3€ pour 30g. Sur Facebook, 494 femmes sont adeptes de ce mode d’échanges sur la page « Human Milk 4 Human Babies. »