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Un récepteur-clé du VIH

Sida : la porte d’entrée de l’infection décryptée

Par Afsané Sabouhi

Une équipe chinoise a identifié la structure d’un récepteur indispensable à l’entrée du virus du Sida dans les cellules immunitaires.

PETILLOT/SIPA

Une étape décisive vient d’être franchie dans la compréhension de l’infection par le VIH. Une équipe chinoise, qui a publié jeudi ses résultats dans la revue Science, a réussi à déterminer par cristallographie la structure en trois dimensions du récepteur CCR5. Cette molécule complexe, présente en plusieurs exemplaires à la surface de nos cellules immunitaires est reconnue par le VIH, qui vient s’y arrimer et pénètre ainsi dans l’organisme.

On sait depuis 1996 que ce récepteur CCR5 est la porte d’entrée de l’infection. Les 0,3% de la population mondiale dotés d’une immunité naturelle contre le VIH la tiennent d’une mutation particulière de ce récepteur. Mais jusqu’ici, sa structure 3D échappait aux spécialistes. Au terme de 6 ans de recherche, l’équipe du Pr Beili Wu, de l’Institut médical de Shanghai apporte donc à la communauté scientifique une pièce essentielle qui manquait au puzzle : la forme exacte de la serrure. « C’est un résultat exceptionnellement important. C’est comme si jusqu’ici nous avions essayé de reconstituer mentalement un Rubik’s cube. Aujourd’hui, on nous le met dans la main », s’enthousiasme Fernando Arenzana, directeur de l’unité Pathogénie Virale à l’Institut Pasteur à Paris.


Ecoutez Fernando Arenzana
, virologue à l’Institut Pasteur à Paris : « C’est un livre qui s’ouvre, un traducteur qu’on vous donne. C’est Champollion devant les hiéroglyphes … mais déchiffrés en grec ! »



La route est effectivement encore longue mais la connaissance de la structure 3D du récepteur CCR5 devrait être un outil précieux pour le développement des futurs médicaments pour les personnes séropositives. « Mieux on comprend le mécanisme par lequel le VIH arrive à entrer dans les cellules, plus il y a de chances qu’on arrive à le contrer », explique Fernando Arenza.


Il existe déjà une molécule, le maraviroc, commercialisée depuis 2007, capable de bloquer les récepteurs CCR5 dans une configuration moins sensible au virus du Sida. L’étape suivante serait maintenant de mettre au point un médicament capable de s’accrocher aux récepteurs CCR5 à la place du virus et d’empêcher ainsi physiquement le virus d’infecter les cellules immunitaires. A quelle échéance ? Face à ce virus qui a déjà fait plus de 30 millions de morts depuis le début des années 80, les spécialistes du Sida ont arrêté de faire des pronostics.