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Covid-19

Généralisation du couvre-feu à 18 heures : les pour et les contre

Par Mathilde Debry

Ce mercredi 13 janvier, le gouvernement se réunit une nouvelle fois autour du conseil de défense sanitaire pour préparer les annonces de demain. Parmi les pistes évoquées, celle de la généralisation du couvre-feu à 18 heures sur l'ensemble du territoire. Une mesure qui fait débat chez les experts en santé publique. 

Karneg / istock.
L'efficacité du couvre-feu à 18 heures dans la lutte contre la Covid-19 fait débat au sein de la communauté scientifique française.
En faveur du couvre feu, son efficacité en Guyane. En sa défaveur, l'absence d'étude sérieuse sur son impact.

Depuis mardi 12 janvier, 25 départements au total sont placés sous couvre-feu de 18 heures à 6 heures. Pour faire baisser le nombre de contaminations et faire face aux variants britanniques et sud-africains de la Covid-19, une des pistes du gouvernement serait de généraliser cette mesure à l’ensemble du territoire.

Les pour 

L’argument qui penche le plus en faveur du couvre-feu, c’est sans conteste l’exemple de la Guyanne. Selon une étude publiée lundi 12 octobre 2020 par un collectif de chercheurs sous l'égide de l'institut Pasteur, son instauration en mars dernier dans ce département d'outre-mer aurait permis de faire baisser d'un tiers le taux de reproduction de la Covid-19, passant de 1,7 à 1,1. "C'est une réduction importante qui a permis de casser la vague épidémique. Le taux de transmission a changé au moment où les mesures de contrôle ont été mises en place. 10 à 15 jours après, les hospitalisations ont atteint leur pic", analyse Simon Cauchemez, directeur de recherche à l'institut Pasteur. Pour lui, "tout cela suggère que ces mesures ont eu un impact important".

De fait, le couvre-feu réduit le nombre d’interactions sociales en soirée, donc potentiellement le risque de contaminer ou de se faire infecter par la Covid-19. "Tout ce qui peut réduire les interactions sociales est efficace contre le coronavirus, y compris contre les variants britanniques et sud-africains. En ce sens, le couvre-feu, comme le confinement, est une mesure intéressante. Les nouveaux cas ne tombent pas du ciel", analyse l’infectiologue Jean-Paul Stahl.

Par ailleurs, le couvre-feu est moins nocif qu’un confinement généralisé pour la santé mentale des Français, déjà fortement dégradée en 2020. "Psychologiquement, je vis moins mal le couvre-feu que le confinement, car je me sens beaucoup moins étouffée", témoigne martine, 53 ans. "Il y a aussi plus d’interactions sociales, grâce au maintien de l’ouverture des commerces. Pour moi, qui vit seule et qui télétravaille trois jours par semaine, cela change tout", raconte-t-elle.

Les contre

Néanmoins, les pourfendeurs du couvre-feu soulignent que cette mesure regroupe à la même heure les Français dans les transports et les magasins, ce qui augmente fortement les risques de transmission de la Covid-19, et annule potentiellement les bénéfices de la réduction des interactions sociales en soirée. "Concernant les magasins, c’est un argument qui ne tient pas la route. Car les mesures barrières continueront de s’appliquer, couvre-feu ou pas couvre-feu, tout comme la limitation du nombre de clients dans les surfaces de vente", estime le professeur Jean-Paul Stahl.

L’autre argument en défaveur du couvre-feu est que, hormis en Guyanne, aucune étude ne démontre scientifiquement son efficacité. "On n'a pas de données chiffrées qui puissent nous permettre de savoir clairement quels sont les effets du couvre-feu avancé", regrette sur France Info Emmanuel Rusch, épidémiologiste, sachant que l’impact du variant britannique rend encore plus difficile l’évaluation de l’efficacité d’une telle mesure, tout comme le comportement des Français pendant les fêtes de fin d’année. D’ailleurs, les premiers chiffres concernant les départements mis sous couvre-feu à 18 heures disent tout et son contraire : stabilisation de l'évolution du taux d'incidence dans les Ardennes, mais augmentation continue de ce même taux en Haute-Marne…

De ce fait, les experts en santé publique ne sont pas d’accord à propos des effets du couvre-feu sur la Covid-19. Alors que l'épidémiologiste Yves Buisson a salué sur RMC "une solution qui a fait ses preuves", sa consoeur Catherine Hill estime dans les colonnes du Parisien "qu’un couvre-feu avancé à 18 heures ne changera pas grand-chose. Cela va embêter les gens et ne va pas beaucoup réduire le nombre de personnes qui se croisent et qui se contaminent".

Enfin, comme en témoignent de nombreuses plaintes, l’instauration d’un couvre-feu à 18 heures empêcherait nombre de Français de faire du sport après leur journée de travail. L’activité physique étant une des clefs essentielles à la bonne santé organique et mentale, cet argument est aussi à considérer.