ACCUEIL > QUESTION D'ACTU > Arrêt du tabac : la cigarette électronique avec nicotine serait très efficace

Hypothèse

Arrêt du tabac : la cigarette électronique avec nicotine serait très efficace

Par Raphaëlle de Tappie

D’après une nouvelle étude, les fumeurs utilisant des e-cigarettes contenant de la nicotine pour arrêter de fumer auraient deux fois plus de chances d'y arriver que les autres.

pixinoo/iStock
L'étude porte sur des gros fumeurs (un paquet par jour) âgés de 53 ans en moyenne et fumant depuis 35 ans
Au bout de 12 semaines, 22% des participants munis de e-cigarettes à la nicotine avaient arrêté de fumer

Depuis son apparition sur le marché, la cigarette électronique ne cesse d’alimenter les polémiques. Certaines études disent qu’elle augmentait les maladies chroniques de poumon et avait des effets néfastes sur la santé cardiovasculaire tandis que d’autres la recommandent pour les fumeurs essayant d’arrêter le tabac. Aujourd’hui, une nouvelle étude présentée à la session scientifique annuelle de l'American College of Cardiology en même temps que le Congrès mondial de cardiologie (ACC.20/WCC) va dans le même sens. D’après les chercheurs, les fumeurs utilisant des e-cigarettes contenant de la nicotine pour arrêter de fumer auraient deux fois plus de chances d'y arriver que les autres. Les scientifiques rappellent toutefois que les effets de l'e-cigarette sur la santé restent inconnus et qu’elle ne doit donc pas être utilisée à d’autres fins que le sevrage tabagique.

Le nouvel essai a été conçu pour refléter les conditions réelles auxquelles les fumeurs chroniques sont confrontés quand ils essayent d’arrêter le tabac. Pour ce faire, des chercheurs de l’université McGill (Montréal, Canada) ont recruté 376 participants. En moyenne, ces derniers avaient 53 ans, fumaient depuis 35 ans et au moins 21 cigarettes par jour. Tous avaient envie d’arrêter, 91% avaient déjà essayé sans y parvenir, essayant le plus souvent médicaments ou thérapies comportementales.  

Au cours de l’étude, qui a duré 12 semaines, les chercheurs ont assigné un tiers des participants à recevoir des e-cigarettes contenant de la nicotine. Un tiers a reçu des cigarettes sans nicotine et un tiers n’a pas reçu de cigarette électronique. Les participants munis d'e-cigarettes avaient le droit de fumer autant qu’ils le voulaient et l'intégralité des volontaires a reçu environ 100 minutes de conseil sur l’arrêt du tabac. Chaque individu a fait part de ses progrès, trois fois au téléphone et deux fois à la clinique. Sur place, les participants ont subi un test respiratoire pour le monoxyde de carbone afin de vérifier s'ils avaient fumé ou non. Après 12 semaines, ceux qui ont déclaré ne pas avoir fumé une cigarette (même une bouffée) au cours de la semaine précédente et qui ont réussi le test d'haleine ont été comptés comme ayant arrêté. Pour ceux les autres, les chercheurs ont examiné s'ils avaient ou non réduit le nombre total de cigarettes fumées quotidiennement par rapport au nombre déclaré au début de l'étude.

Des résultats “impressionnants”

A la fin de l’essai, 21,9 % des participants ayant reçu des e-cigarettes contenant de la nicotine avaient arrêté de fumer contre respectivement 17,3 % et 9,1% de ceux qui avaient reçu une cigarette électronique sans nicotine ou uniquement des conseils. Ainsi, les personnes utilisant des e-cigarettes contenant de la nicotine auraient 2,4 fois plus de chances d'arrêter de fumer.

Qui plus est, par rapport aux 21 cigarettes par jour, les participants ayant reçu des e-cigarettes à la nicotine ont réduit leur consommation quotidienne de 13 cigarettes par jour, contre 11 chez ceux qui avaient e-cigarettes sans nicotine et sept chez les autres.

Ces résultats montrent que les e-cigarettes à la nicotine sont efficaces pour arrêter de fumer à court terme, commente Mark J. Eisenberg, auteur principal de l'étude. L'éviction avec des conseils est plus efficace que les conseils seuls, bien que ce ne soit pas une solution magique pour arrêter de fumer, poursuit-il. Bien qu'il ne s'agisse pas de résultats cliniques comme les taux de mortalité ou de cancer du poumon, les résultats sont tout de même assez impressionnants.” 

“Nous avons besoin de données sur la sécurité”

Par ailleurs, l’étude n’a révélé que peu d’effets indésirables. Si elle a eu lieu avant que l'on ne signale des lésions pulmonaires liées à l'inhalation de vapeurs, aucun problème de ce type n'est survenu parmi les participants, assurent les chercheurs qui continueront à collecter les données pendant un an. Le dernier suivi devrait être achevé en septembre 2020. Le suivi permettra donc de déterminer si les effets de la cigarette électronique sur le sevrage tabagique persistent dans le temps.

Nous avons désespérément besoin d'informations pour savoir si les e-cigarettes sont efficaces pour arrêter de fumer, mais nous avons également besoin de données sur la sécurité”, explique M. Eisenberg, suggérant qu’il faudrait limiter l'accès aux e-cigarettes aux personnes qui tentent activement d'arrêter de fumer. Et ce sous la supervision d'un médecin. La cigarette électronique devrait ainsi être évitée par les jeunes et les non-fumeurs, insiste-t-il. 

Fin janvier, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a rendu un rapport sur la cigarette électronique, assurant que celle-ci était définitivement dangereuse pour la santé. L’OMS précise que les e-cigarettes augmentent le risque de maladie cardiaque et de troubles pulmonaires. D’après ses conclusions, elles sont encore plus risquées pour les adolescents car le cerveau termine son développement autour de 25 ans. Le vapotage passif exposerait ceux qui le subissent à la nicotine et à d’autres produits chimiques dangereux. Quant à son utilité pour arrêter de fumer, l’Organisation estime qu’il n’y a pas de preuve suffisante de l’efficacité du vapotage dans le sevrage tabagique. Ses chercheurs recommandent donc aux fumeurs de se tourner vers des produits de substitution comme les patchs ou les gommes.