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Drogues douces

États-Unis : la légalisation du cannabis fait baisser les prescriptions d’opioïdes

Par Charlotte Arce

Une nouvelle étude montre que dans les États américains où le cannabis est autorisé à des fins médicales ou récréatives, les prescriptions d’opioïdes sont moins importantes que dans le reste du pays.

OlegMalyshev/iStock

Alors que la France s’apprête à lancer au premier semestre 2020 sa première grande expérimentation du cannabis à usage médical auprès de patients souffrant de maladies chroniques, la légalisation de la marijuana a montré des résultats encourageants outre-Atlantique.

C’est ce que met en lumière une étude publiée dans le Journal of Health Economics. Selon ses auteurs, dans les États ayant légalisé le cannabis à des fins récréatives, le taux de prescriptions d’opioïdes par an était inférieur de 11,8% par rapport à la moyenne nationale. L’usage de la marijuana à des fins médicales fait quant à lui baisser les prescriptions d’opioïdes de 4,2%.

Les opioïdes, responsables de 200 morts par jour

Aux États-Unis, l’addiction aux médicaments antidouleurs et les overdoses qu’elle entraîne sont un problème majeur de santé publique que les autorités peinent à réguler malgré les récentes mesures pour restreindre leur accès et contraindre les laboratoires pharmaceutiques à prendre leurs responsabilités.

Chaque jour, près de 200 Américains trouvent la mort suite à une overdose à ces médicaments antidouleurs. 72 000 personnes en sont mortes en 2017 outre-Atlantique, soit plus qu'à cause des armes à feu et des accidents de la route combinés. Une “épidémie” silencieuse dont le Fentanyl, un opioïde de synthèse jusqu’à 100 fois plus puissant que l’héroïne, est le principal responsable. Depuis 1999, le nombre de décès causés par les opioïdes synthétiques comme le fentanyl a augmenté de 3 000%. Et, depuis 2016, le fentanyl est la drogue la plus tueuse par overdoses aux États-Unis.

Une nette diminution des prescriptions d'antidouleurs

Pourtant, dans les États ayant légalisé le cannabis à des fins récréatives ou médicales, ces prescriptions d’opioïdes affichent une tendance inverse au reste du pays. Pour parvenir à cette conclusion, les auteurs de l’étude ont étudié les données sur plus de 1,5 milliard d’ordonnances individuelles d’antidouleurs émises entre 2011 et 2018, ce qui représente environ 90% de ce type de médicaments délivrés au cours de cette période.

Ils ont alors constaté que les deux types de lois sur l'accès au cannabis (à usage thérapeutique et à usage récréatif) réduisaient significativement le nombre total de jours de prescriptions d'opioïdes, mais aussi le nombre de patients auxquels les fournisseurs les prescrivent, ainsi que la probabilité qu'un fournisseur prescrive des antidouleurs.

Pour les chercheurs, ces résultats montrent que “les lois sur l'accès au cannabis pourraient être un outil utile pour lutter contre l'épidémie d'opioïdes sur ordonnance”. “Bien que les gouvernements des États aient adopté diverses politiques visant à réduire les prescriptions d'opioïdes, par exemple des programmes de surveillance des médicaments d'ordonnance, nombre de ces politiques limitent simplement l'accès aux opioïdes et peuvent pousser les personnes déjà dépendantes des opioïdes d'ordonnance vers des drogues plus dangereuses, telles que l'héroïne”, poursuivent-ils.

Selon eux, “les politiques qui réduisent les ordonnances d'opioïdes sans amener les individus à substituer des médicaments plus dangereux peuvent être préférables aux politiques qui limitent simplement les ordonnances d'opioïdes”. Et la légalisation du cannabis pourrait en être une option, soutiennent les chercheurs.

Ils répondent aussi à la crainte soulevée par certains que le cannabis devienne une drogue d’entrée conduisant les utilisateurs à se tourner par la suite vers des drogues plus dures : “Dans l'ensemble de la population en général, les lois d'accès au cannabis à des fins médicales et récréatives diminuent l'utilisation d'opioïdes”, affirment les auteurs.