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Une réussite

Greffe d'utérus : la première française à en avoir bénéficié témoigne

Par Raphaëlle de Tappie

Près d'un an après l'opération, la première française a avoir subi une greffe d'utérus a raconté son expérience à France Inter. Pour l'heure, elle n'a eu aucun rejet et envisage une grossesse à partir d'avril 2020, soit douze mois après avoir été transplantée. 

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“J’ai de la chance. J’ai eu zéro début de rejet”. Sur France Inter mardi 7 janvier, Déborah, 34 ans, raconte la greffe d’utérus qu’elle a subie en mars 2019. Pour l’heure tout se passe bien pour la jeune femme, première Française à bénéficier d’une telle opération. Elle envisage une grossesse à partir d’avril 2020, soit douze mois après avoir été transplantée, le délai à respecter. Après son accouchement, l’utérus lui sera retiré pour éviter les conséquences d’un traitement anti-rejet.

Déborah a 17 ans quand on lui diagnostique son manque d’utérus. Aidée de sa famille et de son compagnon, elle envisage toutes les solutions pour avoir un bébé, l’adoption et les mères porteuses, interdites en France. En 2014, année où le premier bébé né grâce à une greffe d’utérus vient au monde en Suède, elle décide finalement de s’inscrire sur le registre des receveuses. “La possibilité de pouvoir porter mon enfant biologique est forcément quelque chose de très fort”, raconte-t-elle.

En France, depuis peu, deux équipes ont l’autorisation de pratiquer la greffe d’utérus: le CHU de Limoges, avec donneuses décédées, et l’hôpital Foch de Suresnes avec donneuses vivantes. “Je ne me suis jamais dit que ça pourrait être moi la première. Mais ‘pourquoi pas ? Qui ne tente rien, n'a rien’. Il y a eu des critères de sélection. Il y a eu plusieurs entretiens et il s'est avéré qu'on a eu finalement la chance de pouvoir rentrer dans le protocole de l'hôpital Foch de Suresnes”, explique Déborah.

“On vit au jour le jour” 

Sa donneuse sera donc sa mère, âgée de 58 ans. Pour ce genre de greffe, c’est mieux si les femmes de la famille font le don : cela évite des tractations financières et les chances de comptabilité sont plus importantes. “Quand on m'a annoncé mon syndrome, ma maman m’avait dit que si jamais un jour les avancées médicales le permettaient, elle me donnerait son utérus. Donc, elle faisait attention si elle avait le moindre petit truc à l'utérus, des fois que ça puisse un jour me servir”, se souvient la jeune femme.   

En 2018, Déborah rencontre le comité de l’hôpital où on lui explique le procédé en détail. Puis, elle a trois mois pour réfléchir avant de rencontrer le comité une deuxième fois. “Eux doivent décider, en fonction des entretiens qu'on a passés avec eux, s'ils pensent qu'on est aptes à rentrer dans ce protocole. Après, on a attendu les résultats de compatibilité entre maman et moi. On a croisé les doigts. C'est peut-être les deux mois les plus longs parce que tout peut s'arrêter à ce moment-là”. Entre le premier contact avec le comité et l’opération, un an s’écoule en tout.

Et la fameuse opération arrive enfin. La mère est opérée puis la fille. Le prélèvement est plus long que la greffe. “Quatre jours plus tard, quand on a fait l'échographie et qu'on a vu que les artères fonctionnaient très bien, que l'endomètre s'épaississait et que l'utérus s'était calé sur mon cycle, sur mes hormones, je me suis ‘ça y est, il fait partie de mon corps qui l'a accepté’. Il n'était plus à maman. C'était le mien”, raconte Déborah qui, deux semaines après, a ses premières mensurations. “C'est magique, mais à partir de ce jour-là on vit au jour le jour parce qu'il peut y avoir un risque de début de rejet ou de complications. Mais j'ai de la chance. J'ai eu zéro début de rejet.”

Une femme sur 4 000 naît sans utérus

Désormais, la jeune femme doit donc attendre jusqu’au 1er avril pour le transfert embryonnaire tant attendu. Elle espère que son histoire permettra de faire avancer les choses pour les femmes nées comme elle sans utérus, soit une femme sur 4 000.

Les femmes sans utérus ne sont pas toujours nées comme ça. Il arrive par exemple que certaines femmes enceintes souffrent de ruptures utérines car l’utérus présentait une cicatrice venant d’une précédente césarienne ou d’une autre intervention. Le muscle utérin se déchire alors au niveau de la cicatrice au moment des contractions, ce qui entraîne une hémorragie interne. Quand cela arrive, une césarienne en urgence permet de sauver le bébé. Si les dommages et les saignements de la mère sont trop graves, les chirurgiens lui retirent l’utérus. On parle d’hystérectomie.

Parfois, c’est à cause l’endométriose. Cette maladie se caractérise par le développement de tissu semblable à celui de la muqueuse de l’utérus hors cavité utérine. Ce dernier se greffe alors sur le péritoine, les ovaires mais aussi parfois l’intestin ou la vessie, ce qui peut entraîner de très forte de douleurs et même de l’infertilité. Et quand les traitements ne suffisent pas à soulager les symptômes, il arrive que certaines femmes décident de procéder à une hystérectomie en dernier recours.