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Proposition de loi

Gaz hilarant : les sénateurs veulent interdire la vente du protoxyde d'azote aux mineurs

Par Raphaëlle de Tappie

Plusieurs sénateurs ont présenté ce mercredi 11 décembre une proposition de loi afin d'interdire la vente de protoxyde d'azote, potentiellement dangereux pour la santé, aux mineurs dans les grandes surfaces et sur Internet.

Corinne Poleij/iStock

Le gaz hilarant ne fait pas rire le gouvernement. Utilisé en cuisine pour fabriquer de la crème chantilly ou à l’hôpital pour ses propriétés anesthésiques et anti-douleur, le protoxyde d’azote est de plus en plus consommé par de jeunes fêtards pour ses effets euphorisants, s’inquiètent les politiques. C’est pourquoi, ce mercredi 11 décembre, la sénatrice centriste Valérie Létard et sept autres sénateurs du Nord, département très touché par cette dangereuse tendance, ont présenté une proposition de loi pour interdire la vente de ce gaz aux mineurs, dans les grandes surfaces et sur Internet.

“Nous sommes au début d’un phénomène qui risque de se répandre”, alerte Valérie Létard. En effet, depuis le début de l'année, “25 signalements d'effets sanitaires sévères” ont été enregistrés, dont 10 cas «“raves avec des séquelles pour certains”, tels des paralysies des membres à des degrés divers. Et huit de ces cas graves ont eu lieu dans les Hauts-de-France. “Il faut en finir avec la notion de gaz hilarant, car ses effets sur la santé n'ont pas de quoi faire rire”, interpelle la rapporteure du texte, la centriste Jocelyne Guidez. Et au Royaume-Uni, où la consommation de gaz hilarant est popularisée depuis plus longtemps, “30 décès ont été enregistrés depuis 2001”, s’inquiète Valérie Létard.

En effet, si elle provoque des fous rires, l’inhalation incontrôlée du protoxyde d’azote, très facilement disponible dans le commerce, peut entraîner de nombreuses complications. Cela peut notamment provoquer une asphyxie par manque d’oxygène, des pertes de connaissance, des brûlures par le froid du gaz expulsé de la cartouche, des vertiges, ou encore des chutes.

Risque d’hallucinations, de troubles de l’humeur... 

Les personnes qui en inhalent à forte dose risquent même une atteinte de la moelle épinière, une carence en vitamine B12, de l’anémie et des troubles psychiques. Quant à celles qui en consomment régulièrement, elles sont exposées à un risque de perte de mémoire, de troubles de l’érection, de l’humeur (paranoïa), du rythme cardiaque, d’hallucinations, ou encore à une baisse de la tension artérielle. Les risques sont bien évidemment majorés quand cette pratique est associée à la consommation d’alcool ou de drogues. Qui plus est, les troubles peuvent par ailleurs apparaître plusieurs mois après l’utilisation du gaz hilarant. Ils sont toutefois le plus souvent réversibles à l’arrêt totale de la consommation et grâce à un traitement à base de vitamine B12.

En février, lors d’une séance de questions au gouvernement, Valérie Létard avait déjà interpellé la ministre de la Santé Agnès Buzyn sur la question. “L’usage détourné de protoxyde d’azote n’est pas nouveau mais le nombre et la gravité des effets indésirables en lien avec cette pratique tendent à augmenter depuis 2018”, a ensuite alerté le gouvernement dans un communiqué paru le 19 novembre. Ce dernier souhaite donc aujourd’hui que l’information sur le gaz hilarant soit intégrée “dans des interventions portant plus globalement sur la prévention des consommations de produits psychoatifs et des addictions.”

Renforcer l’information sur les risques encourus

Alors qu’à l’heure actuelle, les bouteilles de gaz hilarant sont vendues sans aucune restriction dans les magasins et sur Internet, la proposition de loi voudrait donc imposer aux industriels d’indiquer la dangerosité du produit sur l’emballage. Le texte adopté en commission prévoit par ailleurs de pénaliser l’incitation d’un mineur à faire un usage détourné d’un produit de consommation courante comme celui-ci pour en obtenir des effets psychoactifs et d’accompagner la politique de prévention menée à l’école. 

Car le gaz hilarant n’est pas consommé qu’en soirées étudiantes. Les élus s’inquiètent également d’une tendance de plus en plus répandue chez les jeunes ados, lycéens et même collégiens. Aussi, pour le président de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildeca), Nicolas Prisse, il faut débanaliser cet usage au plus vite auprès des jeunes qui n’ont pas conscience de ce qu’ils risquent.

C’est pourquoi, aujourd’hui, pour Jocelyne Guidez, “il s'agit d'empêcher quiconque de détourner des produits de consommation courante” car cela existera toujours, mais “il s'agit plutôt de limiter, autant que possible, le premier contact des plus jeunes avec ce produit, qui peut avoir des effets graves sur leur santé.”