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Nutrition

Sport à jeun : quel intérêt et quelles précautions à prendre ?

Par Raphaëlle de Tappie

Depuis quelques années, la pratique du jeûne est de plus en plus populaire parmi les sportifs. Avantages et précautions à prendre, Pourquoi Docteur fait le point. 

BrianAJackson/iStock

Le jeûne existe depuis des millénaires. Historiquement pratiqué pour des motifs religieux ou thérapeutiques, il se popularise auprès du grand public depuis quelques années. En effet, de nombreux nutritionnistes le recommandent pour “purger l’organisme” et certains médecins encouragent même des patients atteints du cancer à essayer cette méthode. De plus en plus de sportifs préfèrent également pratiquer une activité physique le matin avant le petit déjeuner, soit après une privation de nourriture de 8 à 12 heures. Quels sont les intérêts du sport à jeun et quelles précautions prendre ? Pourquoi Docteur fait le point. 

Faire du sport à jeun vous évitera de désagréables problèmes de digestion  

Qui n’a jamais expérimenté cette sensation de ballonnement désagréable en faisant de la gym peu de temps après un repas ? S’il est toujours conseillé d’attendre au moins une heure après avoir mangé pour se lancer dans une activité sportive, il peut être plus confortable de suivre un cours de yoga le matin avant le petit déjeuner. En effet, quand on se contorsionne, il est préférable d’avoir le ventre vide.

Courir à jeun est idéal pour se préparer à un marathon

Dans notre corps, nous avons deux sources de glucides : le glycogène hépatique et le glycogène musculaire. A jeun, nous n’avons plus de réserves de glycogène hépatique, ce qui pousse notre corps à puiser dans le musculaire. Cette réserve étant plus faible, notre organisme déclenchera la filière lipidique, soit la dégradation des graisses. S’entraîner à courir à jeun habitue ainsi le corps à se tourner plus vite vers cette filière métabolique pour faire durer le glycogène plus longtemps. Ainsi, en prenant l’habitude de courir à jeun une vingtaine de minutes régulièrement pendant quelques mois, vous entraînerez votre corps à des compétitions de type marathon (42,195 kilomètres).   

“Ça apprend à gérer le rythme, à partir doucement, progressivement, et à contrôler ses ressources d’énergie. Plus le rythme cardiaque est bas, plus le coureur aura tendance à brûler des graisses. Nous disposons d’environ une heure trente de réserve de glycogène. Sachant qu’un marathon dure entre quatre heures et quatre heures trente en moyenne, le coureur a vidé ses réserves depuis trois heures, d’où l’intérêt pour l’organisme d’apprendre à puiser dans les autres réserves avant de tout brûler. Cela évite de ‘toucher le mur’”, explique Stefan Dzelzainis, psychologue du sport, à Pourquoi Docteur. En effet, au bout de 30 km, la plupart des gens ont tendance à s’écrouler car leur organisme a trop peu l’habitude de se servir de sa réserve lipidique.

Après avoir fait du sport à jeun, récupérez    

Après une séance de sport à jeun, si l’hydratation est bien sûr indispensable, il vous faudra également bien penser à refaire vos stocks de sucres et de protéines.

“Après avoir fait du sport à jeun, nous sommes beaucoup plus réceptifs aux glucides. Pour les sportifs qui font de l’endurance, la capacité à refaire des stocks de glycogène est améliorée et l'assimilation sera de meilleure après une séance de ce genre. C’est la fenêtre anabolique après l’effort, il faut donc des sucres rapides comme des bananes ou des jus de fruits”, explique Stefan Dzelzainis. Riches en antioxydants, les fruits permettront par ailleurs de réparer d’éventuelles microlésions musculaires.

Quant aux protéines, vous pourrez les trouver dans le lait, les yaourts, les œufs, le jambon ou encore les noix.   

Préparez votre séance de sport à jeun en amont   

Faire du sport à jeun, ça se prépare. La veille, mangez des glucides complexes pour que votre stock de glycogène musculaire ne soit pas vide le lendemain. Privilégiez toutefois des aliments dont vous avez l’habitude afin de pas perturber votre organisme. “Avant d’aller courir à jeun le matin, j’ai l’habitude de manger du riz, des pâtes ou des pommes de terre la veille au soir”, commente Stefan Dzelzainis. “Mais le plus important est d’être bien hydraté, qu’il s’agisse d’eau, de café ou de thé, avant d’y aller”, rappelle-t-il.  

Sur place, pour éviter les risques d’hypoglycémie (une trop faible concentration en glucose dans le sang susceptible d’entraîner des vertiges, des pertes d’équilibre et, dans le pire des cas, un évanouissement), emportez avec vous une source d’énergie rapide comme une pâte de fruits, une compote ou une barre de céréales. Par ailleurs, évitez d’aller faire du sport trop loin de chez vous afin de pouvoir rentrer rapidement en cas de problème.

Le sport à jeun n’est pas pour tout le monde   

En raison des risques d’hypoglycémie, faire du sport à jeun est déconseillé aux personnes diabétiques. Mais, même si vous ne souffrez pas de cette maladie, cette pratique est plutôt recommandée aux sportifs avertis. Généralement, la filière lipidique se met en place dès 20-25 minutes pour quelqu’un qui a l’habitude de faire du sport à jeun contre 30 à 40 minutes chez un débutant.

Aussi, faire du sport à jeun s’apprend et se prépare. “Le temps d’adaptation est très lent. Il faut beaucoup de patience. Chez certaines personnes, ça peut mettre un mois ou deux et chez d’autres six mois à un an. Il faut déjà habituer son organisme à courir avec le ventre vide. Faire vingt minutes doucement, c’est très bien pour commencer”, insiste Stefan Dzelzainis. 

Evitez les séances trop intenses ou trop longues  

Si vous vous lancez dans le sport à jeun, ne tentez pas des séances d’intermittence et de puissance à haute intensité. Ce type d’exercice épuisera vos réserves glucidiques avant même que le corps ait pu mettre en route la filière lipidique. Concentrez-vous donc sur une séance d’endurance à un rythme modéré et stable.

“On a peu de glucides dans le sang donc il ne faut pas espérer faire des séances à haute intensité en raison du manque de ressources disponibles. En revanche, le coureur peut parcourir de courtes distance à faible intensité. Il vaut mieux commencer par vingt à trente minutes en séance de récupération puis faire trente à quarante minutes, grand maximum, très doucement. C’est ce qu’on appelle un travail d’endurance fondamentale”, commente Stefan Dzelzainis. Et d’ajouter : “Cela est valable pour tout ce qui est effort long comme la natation ou même la musculation. Le principal c’est de faire des petites séances.”