ACCUEIL > QUESTION D'ACTU > Le cerveau des enfants perd-il vraiment de la matière grise en se développant?

Nouveau

Le cerveau des enfants perd-il vraiment de la matière grise en se développant?

Par Raphaëlle de Tappie

Contrairement à ce que de nombreuses scientifiques ont montré dans le passé, le cerveau des enfants ne s'amincirait pas tant que ça lors de leur développement, assure une nouvelle étude. Il semblerait plutôt qu’une augmentation de la myéline fausse les mesures en termes de matière grise. 

JNemchinova/iStock

Depuis toujours, le cerveau humain fait l’objet d’études diverses et variées. Dans le passé, de nombreuses recherches ont montré que certaines régions du cortex cérébral s’amincissent au fur et à mesure que les enfants se développent. D’après certains scientifiques, ceux-ci peuvent perdre près de 1 mm de matière grise à l’âge adulte, sans que l’on ne sache exactement pourquoi. Toutefois, selon une nouvelle étude parue le 23 septembre dans la revue PNAS, le cerveau ne s’amincirait pas tant que ça. Il semblerait plutôt qu’une augmentation de la myéline, gaine graisseuse isolante des fibres nerveuses permettant une neurotransmission plus rapide, fausse les mesures.  

C’est en examinant des cerveau d’adultes et d’enfants à l’aide d’une technique d’IRM quantitative (IRMQ) de pointe, que les chercheurs de l’Université de Standford en Californie (Etats-Unis) et de l’Institut Max Plang pour les Sciences cognitives et du cerveau à Leipzig (Allemagne) ont réalisé cela. Dans le détail, la myéline est le "blanc" de la substance blanche. Si son augmentation est une bonne chose, cela peut fausser les estimations de l’épaisseur corticale (matière grise). Ainsi, si la myélinisation augmente alors que le cerveau se développe, la limite entre la matière blanche et grise peut être obscurcie et cette dernière sous-estimée. 

"De façon critique, notre étude souligne l'importance des mesures multimodales des changements micro-structurels et morphologiques des tissus cérébraux dans le développement de l'enfant. Comme l'augmentation de la myéline au cours du développement modifie le contraste de la matière gris-blanc dans les IRM, nos données suggèrent qu'il en résulte un amincissement cortical apparent", notent donc les chercheurs.

Des implications larges

A terme, ces découvertes pourraient avoir des répercussions importantes. En effet, des décennies de recherches devront être réexaminées. Il existe notamment de nombreuses études montrant que l’épaisseur du cortex change lors de l’apprentissage de nouvelles compétences. Il faudra donc déterminer si la myélinisation joue également un rôle.  

"Comme l'amincissement cortical apparent est omniprésent durant l'enfance et tout au long de la vie, nos données ont des ramifications clés pour comprendre le développement cérébral typique et atypique, ainsi que les conditions cliniques impliquant la myéline et la morphologie", notent les chercheurs. Car la dégradation de la myéline peut entraîner des maladies comme la sclérose en plaques, inflammation qui attaque le système nerveux central. Des techniques de mesures de pointe comme l’IRMQ permettraient donc à terme d’améliorer la détection, la surveillance et le traitement d’afflictions de ce type.

De nombreuses études sont régulièrement réalisées au sujet de la matière grise chez les enfants. Il y a quelques années, des chercheurs avaient notamment découvert que la maltraitance infantile faisait des dégâts sur des zones cérébrales variées affectant aussi la cognition. "La maltraitance d’un enfant agit comme facteur de stress et produit une cascade de changements physiologiques et neurobiologiques qui entraînent des altérations durables dans la structure du cerveau", expliquaient ainsi les chercheurs.