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Conflit d’intérêts : l’Ordre des médecins veut toute la transparence

Par Afsané Sabouhi

Les rémunérations pour travaux de recherche ou expertise ne sont pas concernées par le décret visant à faire la transparence sur les liens entre médecins et les industriels. 

Le soupçon est l’ennemi de la confiance. C’est la formule de Marisol Touraine, la ministre de la Santé pour expliquer l’intérêt du décret sur la transparence des liens entre industriels et professionnels de santé publié au Journal Officiel. Ce texte, rebaptisé Sunshine Act à la Française en référence à la législation américaine qui l’a inspiré, est une conséquence directe de l’Affaire Mediator. Pour laver les médicaments des soupçons qui les entourent et éviter les conflits d’intérêts, la loi impose désormais de rendre public les avantages de plus de 10 euros versés par un laboratoire à tout médecin, étudiant, société savante ou association de patients.
Les conventions ou contrats passés entre un professionnel de santé et un industriel devront également être déclarés. Un site internet public unique est en préparation pour centraliser toutes ces informations. L’Agence nationale de sécurité du médicament pourra en contrôler la validité et en cas de fausse déclaration et les amendes pourront aller jusqu’à 45 000 euros.

 

Ce décret attendu depuis 18 mois a suscité des réactions plutôt contrastées. Les industriels critiquent le seuil de 10 euros retenu pour l’obligation de déclaration, dénonçant dans un communiqué du Leem, « la lourdeur d’un système imposant de publier les opérations non significatives en terme de liens d’intérêts ».
Mais c’est du Conseil de l’Ordre des médecins qu’est venue la charge la plus virulente contre ce texte. L’Ordre regrette que la ministre se soit en quelque sorte arrêtée au milieu du gué dans son exigence de transparence. Seuls les avantages versés sans contre-partie aux médecins par l’industrie sont soumis à déclaration. Lorsqu’un industriel passe un contrat avec un médecin et le rémunère pour une expertise ou des travaux de recherche, l’existence du contrat devra être déclarée mais le montant des honoraires perçus par le médecin pourra rester confidentiel.

 

Ecoutez François Rousselot, conseiller national de l’Ordre national des médecins, en charge des relations médecins-industrie : « On peut pas dire qu’on fait de la transparence quand on cache le plus gros »


 

Le ministère a prévu de publier dans les jours qui viennent une circulaire d’interprétation de ce décret relatif au Sunshine Act. Mais pour le Conseil de l’Ordre, c’est « le secret des affaires qui l’emporte sur la protection de la santé publique ». Il envisage donc un recours en Conseil d’Etat, considérant que ce décret d’application trahit la volonté de transparence de la loi du 29 décembre 2011, initiée par Xavier Bertrand en réaction à l’affaire Mediator.